Les aéronefs : une passion cubaine (II)

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« De sorte que Matías crut apprendre suffisamment pour devenir un parfait aéronaute et dépasser tous ses semblables ».

Deuxième partie de l’article publié sur le site CUBANIA

2ème partie : Un vol à la Matías Pérez

Les stores des boutiques étaient un signe distinctif de La Havane de l’époque. Presque tous les établissements en possédaient car en plus d’être décoratifs, ils étaient très pratiques face au climat de Cuba : ils protégeaient ainsi les piétons de la pluie et du soleil tropical.

Ils servaient aussi à faire la publicité des établissements auxquels ils appartenaient tels que La Isabelita, El León de Oro, Palo Gordo, Delicias de Las Damas et beaucoup d’autres encore. Parfois, ils s’étendaient d’un trottoir à l’autre et donnaient à la rue l’aspect d’un bazar ou d’un boulevard.

Le métier de fabricant de stores était assez rémunérateur surtout quand celui qui l’exerçait portait le surnom de « Roi des stores ». C’est ainsi qu’on appelait Matías Pérez. Il s’agissait d’un ex-marin portugais spécialiste dans la fabrication et la réparation des voiles. Il savait aussi les préparer à résister au vent. Ce portugais voulut rivaliser avec Christophe Colomb, ce dernier dans les mers et lui, dans les cieux.

Il était aussi l’assistant de Godard (voir 1ère partie) et c’est lui qui se chargeait de remplir les conditions préalables aux vols : vérifier le tuyau conducteur de gaz, superviser les instruments et lancer les ballons pilotes pour connaître la direction du vent.

De sorte que Matías crut apprendre suffisamment pour devenir un parfait aéronaute et dépasser tous ses semblables. Il acheta à Godard le ballon « La ville de Paris » pour 1250 pesos et avec son aéronef il se dirigea vers le Champ de Mars. C’était le 12 juin 1856.

Matías Pérez, timbre-poste S’il ne fut pas une référence dans le domaine de l’aéronautique, une phrase lui est restée associée : « c’est un vol à la Matías Pérez ».
Matías Pérez, timbre-poste, 1965.
Les havanais venaient de toutes parts afin d’assister à l’ascension du nouvel aéronaute. Le Champ de Mars était plein à craquer et un orchestre animait l’évènement. Dès que « la Ville de Paris » commença à prendre de la hauteur, des milliers de mouchoirs s’agitèrent et on entendit la clameur de la foule. Mais alors qu’il était déjà à une certaine hauteur, le ballon commença à redescendre rapidement, ce qui laissa penser aux spectateurs que la toile s’était déchirée. En réalité, la corde qui actionnait la soupape du ballon s’était emmêlée et Matías Pérez dut grimper aux cordes qui maintenaient la nacelle. Il ouvrit la bouche du ballon et la garda maintenue avec ses bras pour que l’air y pénètre et permit ainsi de réduire la vitesse de descente. L’aéronef se posa près de la Demeure Palatino à côté du fleuve Almendares.

A deux autres reprises, le public se rendit au Champ de Mars mais les vols durent être annulés en raison du mauvais temps. Finalement le navigateur intrépide des airs fit de nouveau son apparition au Champ de Mars avec son ballon… mais finit par disparaître dans l’espace et demeurer à tout jamais dans le souvenir des cubains.

Les derniers à l’apercevoir furent des pêcheurs qui travaillaient du côté de la Tour de la Chorrea. Ils étaient près de la côte et lui ordonnèrent de descendre mais l’aéronaute leur répondit en jetant des sacs de sable et en s’enfonçant dans la mer.

S’il ne fut pas une référence dans le domaine de l’aéronautique, une phrase lui est restée associée : « c’est un vol à la Matías Pérez ».

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