CE 1ER MAI JUAN FORMELL, CHEF D’ORCHESTRE DES VAN VAN, EST MORT À LA HAVANE

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En janvier 2005, le journaliste et écrivain Hernando Calvo Ospina a interviewé Juan Formell, l’un des plus grands créateurs de musique populaire cubaine.

Comme à son habitude, Hernando souleva des points de controverse. Formell lui répondit en toute franchise et en détails, même aux questions les plus délicates. Voici pour nos lecteurs l’intégralité de cet entretien, dont le contenu n’a pas pris une ride.*

A la fin des années 1970, Gérard MEYS, producteur et ami de Jean Ferrat, a été le seul à produire en France le groupe et à publier ses disques...

En photo/logo Juan Formell et H. Calvo Ospina, La Havane, janvier 2005)

« Souvent je me suis mis à pleurer en repensant aux grandes choses qu’on peut réaliser »

vendredi 2 mai 2014, par Hernando Calvo Ospina

« En considération de sa carrière artistique longue et remarquable, de ses apports dans le domaine de la musique, de sa lutte constante pour la défense des valeurs culturelles de notre nation et de son travail hautement créateur pour le plaisir de notre peuple, qui a contribué à l’enrichissement de notre culture nationale (…). Parce qu’il s’est consacré au développement de la musique populaire cubaine, y reflétant les plus authentiques sentiments de notre peuple, son optimisme et sa vitalité exprimés avec une cubanité proverbiale et des valeurs esthétiques et artistiques élevées ; et pour sa loyauté envers le peuple et la Patrie qu’il a servie avec humilité et désintéressement . »

Voilà ce que stipulait la décision du Conseil d’Etat de Cuba, signée par le président Fidel Castro, en concédant la très haute distinction « Ordre Félix Varela » de premier niveau, au compositeur, bassiste et directeur du Groupe Van Van, Juan Formel. La cérémonie de remise eut lieu le 10 mars 2002, au Mémorial José Martí de la Place de la Révolution.

Au moment de s’adresser aux assistants, Formell affirma que pour lui cette récompense avait plus de signification que le Grammy, un prix convoité par les artistes du monde entier, et qu’il avait obtenu avec les Van Van deux ans auparavant.

Le bassiste, né en août 1942, déclara ce soir-là d’une voix posée : « Le fait de recevoir cet Ordre est une reconnaissance de la musique populaire cubaine. C’est un fait historique, car cette musique a été longtemps marginalisée. C’est une reconnaissance des musiciens qui sont à Cuba et qui ont fait leur travail à partir du quotidien de ce pays sans que personne ne le leur raconte. ».

Une haute grille empêche de voir l’intérieur de la maison de Formell, située dans un quartier populaire de La Havane. Je crois que c’est la seule chose qui la distingue de ses voisines. En la regardant, et connaissant le luxe et l’excentricité que s’infligent les artistes célèbres hors de Cuba, je ne peux cacher ma surprise. Ici vit un homme qui est catalogué comme le plus important créateur de musique populaire dansante du dernier quart de siècle à Cuba, et l’un des plus brillants du continent américain.

En 1999, durant une tournée dans vingt-six villes étasuniennes, le journal Los Angeles Times écrit que Formell dirige « l’un des orchestres de danse les plus influents dans l’histoire de la musique afro-cubaine ». Le New York Times affirme carrément que les Van Van sont « les Rolling Stones de la salsa ».

On me conduit dans un grand salon. Hormis la table de billard, la sobriété de la décoration est frappante. L’aimable hôtesse m’invite à m’asseoir sur l’un des fauteuils en cuir et m’offre de l’eau et du jus de fruit. En amenant les boissons, elle me prie de patienter quelques instants, le temps que l’artiste en ait terminé avec ses visiteurs précédents. Je reste seul quelques minutes dans une atmosphère extrêmement calme.

Formell, le créateur de quelque huit cents compositions, arrive le sourire aux lèvres, aimable, en s’excusant de son retard. J’accepte son invitation à un verre de rhum, et il revient avec une bouteille qu’il met à ma disposition. Quand je commence à lui énumérer les sujets que je désire aborder, il pose son verre d’eau, me regarde à travers ses lunettes d’un air amusé et me dit : « Ne perds pas de temps. Pose tes questions. » Puis il me confie qu’il est en train de travailler sur une sorte de biographie avec un journaliste cubain.

Lire la suite : http://hcalvospina.free.fr/spip.php?article511

* Cette interview est publiée dans le livre « Sur un air de Cuba », Le Temps des Cerises. Paris, septembre 2005.

Traduction : Karine Alvarez et Martial Leduc.