Ajaccio à l’heure de Cuba

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Vu dans CONNAISSANCE DES ARTS sous la plume d’Hervé Grandsart

En 2010, lors d’une visite officielle à Ajaccio, (dont notre association avait été à l’initiative) l’ambassadeur de Cuba en France proposa à la ville une collaboration culturelle acceptée avec empressement par les intervenants des deux pays.

Fruit de cette volonté politique, l’exposition du musée Fesch, accompagnée d’animations/rencontres dans la cité, rassemble des œuvres de trois grandes institutions muséales de La Havane : le musée des beaux-arts, le centre d’art contemporain ainsi que la photothèque.

Musée-Palais Fesch
50-52 rue Cardinal Fesch
20000 Ajaccio
Jusqu’au lundi 31 août 2015

Large panorama de la création artistique de Cuba ...

Occasion de découvrir de rares œuvres européennes expatriées depuis longtemps sous les tropiques, ainsi qu’un large panorama de la création artistique de l’île, du XIXe siècle à nos jours.

La présence d’importantes peintures françaises du XIXe siècle généreusement envoyées à Ajaccio surprendrait si l’on oubliait que la culture française imprégna longtemps la riche société cubaine dès avant la guerre (1894-1898) qui entraîna la fin de la domination coloniale espagnole, suivie, en 1902, de la proclamation de l’indépendance de l’île.

Des peintures de Delacroix et de Courbet voisinent ainsi avec celles de l’école de Barbizon et de peintres académiques de la fin du siècle. Le parcours consacré à la peinture proprement cubaine met à l’honneur le paysage, souvent mêlé à la représentation de la vie économique et quotidienne. Des artistes d’origine française, tels Esteban Chartrand (1840-1884) et Edouard Laplante, évoqués une première fois dans une exposition bordelaise de 2013 consacrée aux voyageurs français à Cuba, participèrent à l’éclosion de cet art cubain du paysage affranchi des modèles européens et qui s’épanouit jusqu’à un Domingo Ramos (1894-1956).

L’avant-garde ne se développa qu’après la première guerre mondiale, cette fois en rapport avec l’activité artistique européenne, notamment française. Si le peintre d’origine cubaine Wifredo Lam (1902-1982) acquit, au gré d’une carrière placée sous le sceau de l’itinérance, une renommée mondiale, l’exposition attire l’attention sur d’autres personnalités, telle Amelia Peláez (1896-1968), réinstallée à Cuba en 1934 après un voyage de formation à Paris.

Autre aspect de l’activité artistique à Cuba, la photographie fut, à partir de la révolution castriste de 1959, le medium préféré de l’engagement et de la propagande pour lesquelles un Alberto Korda (1928-2001), autant témoin qu’acteur de la Révolution, réalisa un fameux portrait du « Che » qui fit le tour du monde.

Le dernier volet de l’exposition concerne l’art contemporain cubain. Le régime n’ayant jamais fermé la porte à l’art informel, la liberté d’inspiration peut s’affirmer de nos jours avec un regard plus distancié envers les questions politiques, sans que la couleur et l’imagination, marques de cet intense et attachant foyer créatif cubain, ne soient oubliées.