Cuba libre !

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Une Chronique de Jacques Lanctôt publiée sur le site CANOE ;CA.
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Ce fin connaisseur de Cuba (où il a vécu plusieurs années d’exil) nous fait part de ses impressions à la suite de son récent séjour dans la Grande Ile...

Il répond, souvent de façon humoristique, aux "affirmations saugrenues" de chroniqueurs notoires qui se complaisent à noircir la réalité cubaine...

Et malgré tout, Cuba continue de briller par sa culture !

Je suis arrivé à La Havane aux petites heures du matin, lundi dernier. Ma femme et nos deux enfants m’attendaient à l’aéroport. Ils étaient à Cuba depuis presque un mois, soit depuis la fin des classes. Il faut préciser que ma femme y possède une modeste maison qu’habitent à l’année longue sa mère et son beau-père.

Le lendemain, dans la chaleur accablante, prenant mon courage à deux mains, je suis parti à la recherche de ces hordes de journalistes qui, selon un chroniqueur notoire qui reprenait les affirmations saugrenues d’un autre chroniqueur, se font arrêter tous les jours et jeter en prison par la police de Raul Castro. De ces hordes de prostituées « à l’usage des touristes dont la clique militaro-politique tire les principaux bénéfices ». De ces milliers de dissidents qui n’ont pas accès à internet à cause de ce même gouvernement et qui risquent leur vie pour rapporter fidèlement aux médias américains la dure réalité de ce petit pays des Caraïbes, sans autre compensation monétaire que ces quelque milliers de dollars que leur versent les organismes paravents de la CIA américaine.

Je dois avouer que je n’ai rien vu de tout cela. Mais j’y ai vu, il va sans dire, les effets criminels, voire génocidaires, du blocus imposé par le gouvernement américain depuis plus de 50 ans. Il faudrait être aveugle pour ne pas les voir.

Vous pouvez imaginer ce que serait le Québec s’il vivait sous un tel blocus pendant une aussi longue période ? Sans la possibilité de négocier avec qui bon lui semble ? À voir les bateaux et cargos qui nous livrent leurs marchandises interdits pendant six mois d’accoster dans un port américain, c’est-à-dire obligés plus ou moins de repartir à vide vers d’autres continents, et les compagnies avec lesquelles nous ferions affaire pénalisées par des amendes de plusieurs millions et milliards de dollars ? Ce n’est pas avec une telle menace qu’on encourage les investissements.

Sans parler des attaques meurtrières à nos frontières et à l’intérieur du pays, du brouillage et du piratage des ondes, de l’obligation de passer à travers leur système de communication (téléphonique, postal, Internet) pour communiquer avec l’extérieur, qu’il s’agisse de nos parents, d’amis ou de relations commerciales ? Ce ne sont que quelques-uns des effets destructeurs que nous subirions et que l’on peut constater de visu lorsqu’on voyage à Cuba. Le gouvernement cubain estime ces dommages à plusieurs milliards de dollars. Sans parler du prix en vies humaines.

Et malgré tout, ce même gouvernement cubain a été louangé pour ses soins médicaux - un peu avant mon arrivée, ma belle-mère s’est cassé une cheville et en moins de deux heures, elle avait été vue par un médecin à l’urgence de l’hôpital, on lui avait fait des radiographies et on avait mis une partie de sa jambe dans le plâtre -, pour son système d’éducation gratuit et universel - il y a quelques semaines, plus d’un millier d’étudiants ont reçu leur diplôme de médecin, dont près de la moitié proviennent de l’étranger, de ces pays voisins où la médecine est un sport de riche. En Haïti, lorsque quelqu’un doit se rendre pour une consultation chez le médecin, on dit tout simplement qu’il s’en va chez le Cubain. Et c’est gratuit.

Et malgré tout, Cuba se distingue dans le monde entier pour ses découvertes dans le domaine de la recherche médicale et ses percées dans les vaccins contre toutes sortes de maladies. Sans parler de ses exploits sportifs dans différentes disciplines. Aux derniers Jeux panaméricains, Cuba, petit pays de douze millions d’habitants, a terminé quatrième. Mais ce piètre résultat, que le monde de la rue juge sévèrement, s’explique, entre autres, par les nombreuses désertions de l’élite des joueurs de différentes disciplines, encouragées par les lois américaines.

Et malgré tout, Cuba continue de briller par sa culture. Ici, tout le monde est musicien et danseur et peintre dans l’âme et cette culture s’exporte fièrement dans le monde entier.

Comment parler de liberté d’expression lorsqu’un pays est agressé de façon aussi systématique et violente. Lorsqu’on est en guerre, il faut se ranger derrière son chef et suivre les ordres à la lettre. Ainsi fut Cuba au cours des cinquante dernières années. Tous unis derrière leurs dirigeants. Malgré la beauté de ses plages et de ses installations hôtelières, malgré tous ses charmes, Cuba était en guerre et devait prendre les moyens de se défendre pour assurer sa survie, en mettant la santé et l’éducation au sommet de ses priorités