Scan du "paquet hebdomadaire" 1

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Par José Raúl Concepción Llanes (Cubadebate) et traduction Françoise Lopez.

Le paquet hebdomadaire a gagné du terrain parmi les offres culturelles de Cuba jusqu’à devenir le média alternatif le plus populaire de ces dernières années. C’est un ensemble qui comprend toutes sortes de propositions depuis les différentes sortes d’émissions de télévision jusqu’aux applications informatiques.

Le média alternatif le plus populaire de ces dernières années

Dans deux articles sur ce sujet, Cubadebate décrit, à partir du travail d’investigation de l’auteur pour sa thèse de licence en Journalisme, le système de distribution et de gestion du paquet ainsi que sa vente et son influence dans le contexte culturel de l’Ile.

L’ingéniosité est une des caractéristiques qui a traditionnellement défini le peuple cubain. Devant chaque difficulté, il a réagi avec une solution adéquate. Bien qu’on ait beaucoup discuté à propos de cet ensemble de matériels, celui qui a créé le premier paquet hebdomadaire reste encore un mystère. Mais son évolution et son rôle sont dus à la capacité inhérente au peuple d’affronter la réalité en dépassant les problèmes et à trouver des réponses ingénieuses. La qualité et la provenance des produits sont, au moins, des sujets polémiques, cependant, son utilité comme fournisseur de contenus a été prouvée.

"Le paquet hebdomadaire est le résultat de la capacité inventive du Cubain face aux limitations de l’accès à internet, à l’absence de télévision par câble et d’autres options qui existent au niveau international pour la diffusion de messages culturels", assure l’ex Ministre de la Culture et actuel conseiller du Président du Conseil d’Etat et des Ministres, Abel Prieto. Le paquet est une réponse spontanée aux carences de l’offre d’Etat, une voie pour satisfaire l’avidité d’information.

Et combiner les telenovelas les plus populaires avec des séries de nationalités diverses, des films de toutes sortes, des informations thématiques, des vidéos humoristiques, des revues nationales et internationales, des applications et des programmes informatiques et beaucoup d’autres choses est un exemple de la lucidité pour trouver des alternatives viables dans ce cas face aux difficultés de l’accès à internet, un problème que l’Etat cherche à résoudre progressivement.

Nous ne prétendons ni glorifier ni condamner le paquet (aussi appelé el cargue dans certains endroits du pays) mais l’analyser, répondre à des questions sur sa distribution et son achat. Aller au-delà des opinions personnelles. Pourquoi surgit le paquet hebdomadaire ? Comment circule-t-il ? quels sont ses avantages et ses désavantages ?

Les raisons qui expliquent l’apparition et ensuite le succès du paquet hebdomadaire sont multiples, depuis la popularisation peu à peu de la technologie utilisée pour sa circulation jusqu’à la légalisation du marché alternatif de commercialisation des audiovisuels. Sans les ordinateurs personnels, les reproducteurs de vidéos et les clefs USB, il n’aurait pas été possible de créer un produit comme le paquet. Par conséquent, la propagation relative de ces matériels dans notre pays est le premier pas pour son développement.

Ont aussi été déterminantes l’inefficacité ou l’absence de mécanismes d’Etat pour fournir à la population les produits que le paquet distribue ainsi que les limites de la télévision nationale et les difficultés pour accéder à internet. Enfin, la légalisation du marché informel pour acquérir des audiovisuels a donné aux distributeurs une plus grande liberté pour promouvoir le produit.

Coup d’oeil rétrospectif

L’entrée à Cuba des nouvelles technologies a coïncidé avec la profonde crise économique des années 1990. La production et la distribution nationale d’audiovisuels a baissé en même temps qu’ont surgi des alternatives pour décentraliser la circulation de contenus et le marché noir est devenu naturel pour fournir toutes sortes d’articles.

Le paquet hebdomadaire n’est pas un produit isolé mais il faitpartie d’un phénomène plus large : la consommation audiovisuelle non officielle, enracinée à Cuba depuis plus de 2 décennies. Ses débuts remontent aux "banques" de films en format VHS qui concurrençaient les films dès les années 90 et le début de ce siècle.

Ensuite, l’évolution technologique céda le pas aux DVD et les cassettes VHS furent abandonnées pour un support plus fiable. Les mémoires flash et les disques durs externes sont deux dispositifs qui permettent la circulation du paquet et bien que celui-ci coexiste encore avec les DVD, par sa portée et sa viabilité, il a gagné du terrain. Le paquet hebdomadaire constitue la manifestation de ces temps d’un phénomène qui le précède.

Comment est géré et distribué le paquet ?

Pour répondre à cette question, nous nous rapprochons d’Elio Héctor López, connu comme El Transporta2r, qui dirige une équipe de travail chargée de confectionner un paquet, d’une personne qui fait partie d’un autre groupe qui se consacre à la même chose et de 4 distributeurs du produit. Sur demande expresse des personnes interviewées, à l’exception de Lopez, nous ne donnerons pas leurs noms complets.

a partir de l’information révélée dans ces rencontres, nous construisons la chaîne de distribution suivante et nous expliquons, da manière synthétique, la fonction de chacune de ses parties : fournisseurs - matrices - distributeurs de première main - petits distributeurs - consommateurs.

Le paquet fonctionne avec autant d’efficacité et de dynamisme toutes les semaines de l’année à cause d’un système de travail bien organisé en petites équipes (entre 5 et 12 personnes) qui se partagent les fonctions et se spécialisent dans la recherche de différents types de matériels. Ainsi, ceux qui sont chargés de la gestion et de l’organisation de la musique, des films, des reality shows, etc. Chaque dimanche, le travail est termné et le lundi commence à se développer le grand réseau qui s’étend sur toute Cuba.

Le premier pas de la chaîne dépend des "fournisseurs" qui sont les personnes chargées de charger les contenus d’internet et de les vendre aux "matrices". Ces dernières ne sont rien de plus que les équipes de travail déjà mentionnées qui organisent toute l’information en dossiers thématiques.

Eduardo, une des matrices interviewées, explique la fonction des fournisseurs : "ils chargent l’information, enlèvent les publicités et la vendent à ceux qui font le paquet qui la regroupent pour le consommateur en utilisant un programme qui facilite le travail".

Les "distributeurs de première main" (entre 3 et 7 pour chaque province) par le contact drect avec les matrices, gèrent l’arrivée sur leur territoire par les bus provinciaux et ensuitent les vendent à des intermédiaires de moindre rang. De cette façon, bien que les matrices soient à La Havane, la circulation dans otut le pays ne prend pas plus de 24 heures.

Ensuite, les "petits distributeurs" travaillent au niveau du quartier. Ils n’ont aucun lien direct avec ceux qui sont chargés de faire le paquet et travaillent à domicile ou sur des points de vente.

Dalvin, qui commercialise le paquet dans la municipalité de la capitale de San Miguel del Padrón, explique : "depuis 2 ans, j’ai commencé à vendre le paquet sur cartes mémoires. Toutes les semaines, j’achète le paquet pour 2 CUC et ensuite, je le revnds à des personnes qui apportent une carte mémoire chez moi. On l’achète à un ami qui, à son tour, l’obtient par la même voie : c’est une chaîne de vente".

Le dernier maillon de cette chaîne, ce sont les "consommateurs" pour qui travaillent toutes les personnes mentionnées auparavant. Ceux-ci peuvent obtenir le paquet par différentes voies :

  • Un distributeur à domicile : les prix oscillent entre 1 et 5 CUC, peuvent varier selon la distance que le distributeur doit parcourir, la nouveauté de l’information et la province où on se trouve.
  • Un point de vente : A La Havane, pe rix standard pour copier le paquet complet est de 2 CUC mais il existe d’autres façon de payer selon le nombre de Gigas du dispositif de stockage du consommateur. "Les gens viennent avec des cartes mémoires de différentes puissances et ils les emmènent pleines de matériels. Pour celles de 8 gigas, cela coûte 10 CUP, pour celles de 16, 15 CUP et pour celles de 32 : 1 CUC ou 25 CUP", explique Dalvin. Il existe aussi un système de vente par chapitres, essentiellement pour les séries, telenovelas, les reality show et les émissions appréciées. "je les vends pas cher, 1 peso le chapitre", signale Eleonor, qui a son commerce à Playa.
  • Location de cartes mémoires : Cette méthode est la moins fréquente et est basée sur la location par des personnes qui n’ont pas de mémoires portatives, comme les anciennes banques de films en format VHS.

Une fois le produit obtenu, les consommateurs sont libres de partager les contenus. Etant donné la facilité relative avec laquelle on peut copier l’information digitale, il est fréquent que de nombreuses personnes accèdent au paquet gratuitement. Selon une étude du Centre de Recherches Sociales (CIS) qui fait partie de l’Institut Cubain de Radio et de Télévision, 70% des consommateurs du paquet dans la capitale l’obtiennent sans aucun coût.

C’est là l’un des grands avantages du paquet : il est relativement facile de l’acquérir. Si tu as les moyens technologies et économiques, il suffit de le demander à un camarade de travail ou d’école, à un voisin, à un ami ou d’utiliser une des voies mentionnées auparavant pour l’obtenir. Précisément, ces facilités constituent un point faible des alternatives institutionnelles comme Mi Mochila, une espèce de paquet d’Etat distribué à travers les Joven Club de Computación (clubs d’informatique) et qui par conséquent, fonctionne à heures fixes et dans un endroit déterminé, cela rendant très incommode son obtention. De plus, la fréquence de sortie et la quantité de matériels sont considérablement inférieures.

Cependant, et paradoxalement, le point faible du paquet hebdomadaire réside aussi dans l’accès. Bien qu’il soit un phénomène national, tout le monde ne peut pas arriver jusqu’à lui car une partie considérable de la population ne possède pas les dispositifs nécessaires pour cela. Selon l’étude du CIS déjà mentionnée, le paquet est vendu dans seulement 39% des foyers de la capitale. Ce chiffre est assez peu fiable parce que beaucoup de personnes consomment ces matériels sans en avoir conscience. Il est tellement facile à détourner, passe par tellement de mains, qu’il est possible d’accéder à son contenu sans le savoir.

Même ainsi, il y a beaucoup de foyers où il n’arrive jamais. Sur le problème de l’accessibilité, le spécialiste de l’Institut Cubain de Recherches Culturelles, et professeur de a Faculté de Psychologie de l’Université de La Havane Pedro Emilio Moras, Juan Marinello réfléchit : "on doit concrétiser quelle portée a le phénomène du paquet hebdomadaire. Ca me semble un phénomène curieux mais pas massif parce qu’il est centré sur les personnes qui ont de l’argent pour payer le produit et un ordinateur et un disque dur pour l’obtenir".

De la même façon, le paquet s’est enraciné de telle façon qu’actuellement, il est devenu un média de communication de plus. Certains Cubains préfèrent la télévision, d’autres la presse, d’autres la radio, d’autres lepaquet hebdomadaire qui n’a pas la portée du petit écran mais a pris de la place dans l’utilisation du temps libre de ceux qui le consomment.

Beaucoup de débats à ce sujet se sont centrés sur la qualité (pas visuelle mais artistique et culturelle) des matériels que divulgue le paquet, cependant, l’offre n’est pas aussi importante que la consommation. Quels sont les produits les plus consommés du paquet hebdomadaire ?Peut-il réellement être considéré comme un substitut à internet ? Quels défis amène l’irruption d’un média alternatif privé pour les institutions culturelles cubaines ? Ces thématiques seront celles de notre prochain article sur le paquet hebdomadaire et nous leur incorporerons des analyses d’intellectuels connus et de chercheurs.

Source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/noticias/2015/10/19/el-paquete-semanal-i-infografia/#.ViXubdY4YRE
URL de cet article :

http://cubasifranceprovence.over-blog.com/2015/10/cuba-scan-du-paquet-hebdomadaire-1.html