Gérard Noiriel : "Chocolat, tu t’es battu, tu as été l’acteur de ta vie"

Partager cet article facebook linkedin email

En photo/logo Le clown Chocolat, héros des enfants de l’hôpital Hérold, à Paris, en 1910. Photo M.-L. Branger. Roger-Viollet. Fonds documentaire de l’association Daja

L’historien Gérard Noiriel est le biographe inspiré de Rafael, petit esclave cubain devenu clown noir à Paris. Et il fait l’éloge d’une identité distanciée.

Rafael s’est battu pour échapper au stéréotype du Noir martyrisé par les Blancs ...

Sur le pont du bateau qui quitte La Havane, il y a un garçon noir d’une dizaine d’années. Il s’appelle Rafael et c’est un petit esclave qui vient d’être acheté 18 onces par son nouveau maître.

Rafael mourra à Bordeaux à 51 ans en 1917, sans jamais avoir revu Cuba. Entre-temps, il sera devenu le clown Chocolat, il aura connu la gloire puis l’oubli à Paris, avant de finir sa vie dans une grande pauvreté.

Dans un précédent livre (1) paru en 2012, l’historien Gérard Noiriel s’était intéressé à l’image de Chocolat, le premier artiste noir de la scène française. Dans celui qui paraît ces jours-ci, il a enquêté sur sa vie, allant jusqu’à Bilbao et Cuba, exhumant les rares sources écrites et retrouvant les descendants de Chocolat, mais aussi ceux de Castaño, le maître qui l’a amené en Europe.

Cet ouvrage retrace l’histoire d’une époque, les années 1880 à 1915, et d’un lieu, la rue Saint-Honoré à Paris, où artistes, journalistes et écrivains se croisent de jour comme de nuit dans toutes sortes de cafés, restaurants et salles de spectacle.

Gérard Noiriel fait revivre ce monde de la Belle Epoque où se mélange, au moins pour quelques heures, tout un peuple parisien de duchesses et d’écuyères, de fêtards et d’enfants. Mais, surtout, il décrit le statut des premiers Noirs de Paris, globalement considérés comme de sympathiques bêtes curieuses.

Rafael est toléré, on ne peut pas dire qu’il suscite d’hostilité mais, « dès qu’il veut franchir les limites qui lui ont été fixées, dès qu’il veut aller dans un espace réservé à une élite, le théâtre, on lui dit : "Reste à ta place" », remarque l’historien.

En même temps, son talent est reconnu par des journalistes, notamment « le chef de la rubrique théâtre du Figaro, devant qui tout le monde tremble, et qui le considère comme un artiste de premier plan ».

Il est reconnu aussi par les milliers d’enfants et d’adultes qui, année après année, viennent l’applaudir au Nouveau Cirque à l’Hippodrome du Champ-de-Mars ou aux Folies Bergère. Une des qualités du livre est de montrer l’ambivalence des Parisiens face à cet homme noir.

Lire la suite de cet article :http://next.liberation.fr/livres/2016/01/06/gerard-noiriel-chocolat-tu-t-es-battu-tu-as-ete-l-acteur-de-ta-vie_1424688

A lire sur le sujet les excellents articles de Michel Porcheron :

3 avril 2014
http://cubacoop.org/spip.php?page=article&id_article=1547

4 septembre 2014
http://cubacoop.org/spip.php?page=article&id_article=1733

26 octobre 2014
http://cubacoop.org/spip.php?page=article&id_article=1802

3 novembre 2014
http://cubacoop.org/spip.php?page=article&id_article=1820

5 janvier 2015
http://cubacoop.org/spip.php?page=article&id_article=1926