19 ans de passion pour un Festival de cinéma français

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Publié sur le site CUBARTE Source Granma Internacional 17.05.2016

Le Festival du film français est de retour à Cuba. À l’occasion de sa 19e édition, il revient comme chaque année avec un grand nombre de longs métrages représentant la diversité de cette filmographie et une délégation de réalisateurs et d’acteurs pour présenter leurs films.

Ses organisateurs, les cinéastes Christophe Barratier et Noureddine Essadi, qui ont créé ce festival avec le groupe Cinemania, sont convaincus de son succès du fait de l’incontestable passion avec laquelle le public cubain accueille leurs propositions.

Le plus important dans le monde, quant au public !

Lors d’un bref dialogue après une conférence de presse à l’Hôtel Telegrafo La Havane, Barratier a déclaré : « Quand je suis arrivé à Cuba pour la première fois en 1998 pour présenter le film Microcosmos, ce fut comme un coup de foudre avec le public, et depuis lors j’ai décidé de travailler pour revenir. Le public cubain m’a profondément touché. C’est désormais une histoire d’amour. Je suis convaincu que le Festival du film français à Cuba est le plus important dans le monde quant au public. »

Le large éventail de genres cinématographiques distingue le cinéma français et à cette occasion – du 29 avril au 21 mai – des drames, des comédies, des thrillers, des biographies et des documentaires sont au programme : 19 films produits entre 2014 et 2016, et neuf classiques du patrimoine cinématographique français.

Barratier, producteur du documentaire Microcosmos (1995), a réalisé trois films à succès, tous présentés en exclusivité à Cuba : Les Choristes (2004), Paris 36 (2008) et La guerre des boutons (2011).

Le Festival a ouvert ses portes au cinéma Chaplin avec la projection en première mondiale du quatrième film de Barratier, L’Outsider, inspiré par l’un des plus grands scandales de l’histoire de la finance, le cas du trader français Jérôme Kerviel.

Le thème de la crise financière est très attractif, mais qu’est-ce-qui a motivé Barratier ? C’est la première question posée à la conférence de presse avec toute la délégation participant au Festival.

« Je ne savais rien du monde de la finance et cela ne m’intéressait pas non plus. J’ai eu connaissance du scandale financier dans la presse, puis j’ai rencontré personnellement Kerviel. Il m’a raconté ce qui est arrivé depuis son entrée dans la banque, en 2000, et son ascension fulgurante jusqu’à devenir trader.

« Je me suis intéressé au côté humain, aux labyrinthes psychologiques et financiers et je me suis laissé prendre par l’histoire. J’ai dû beaucoup me documenter pour transmettre ce monde. J’ajoute que la Société générale est une entreprise très puissante et j’ai rencontré certains obstacles. Le film s’achève au moment où l’affaire éclate. »

Quant à l’acteur qui incarne Kerviel, le jeune Arthur Dupont, il a évoqué l’audition pour obtenir le rôle, les essais et le fait de rencontrer personnellement Kerviel, et combien il a été fasciné par le drame de cet homme à plusieurs facettes.

UN OURAGAN EN 4K

Ouragan (Ouragan, l’Odyssée d’un vent), plus qu’un documentaire, est un spectacle de la photographie impressionnante et la musique du compositeur Yann Tiersen. Une œuvre qui séduit le spectateur.

Réalisé par Cyril Barbançan, Andy Byatt et Jacqueline Farmer, sa première mondiale a également eu lieu à La Havane et ce fut l’occasion de voir au cinéma Chaplin, pour la première fois, une projection en résolution graphique 4k, un événement véritable technologique.

Deux de ses réalisateurs, Cyril Barbançan et Jacqueline Farmeur ont présenté le documentaire dans lequel on peut suivre en détail l’impressionnant voyage de 15 000 kilomètres d’un puissant événement météorologique d’une violence dévastatrice.

Farmer a déclaré qu’Ouragan est le résultat d’un projet qui a duré six ans dans lequel ils tentent de « démontrer la relation entre les êtres humains et la nature, la nécessité de la comprendre et même de la canaliser ».

Concernant l’approche du sujet, la codirectrice a déclaré : « J’ai été attirée par l’évolution d’un phénomène météorologique de ce genre à partir de mon expérience. Je suis écossaise, mais je vis dans le sud de la France où les forts vents du mistral sévissent constamment dans la région et ont une grand incidence sur la vie des gens. »

Pour sa part, Barbançan a rappelé que ce projet a duré six ans « parce que nous cherchions la trajectoire d’un ouragan tropical depuis la naissance comme un petit nuage sur les côtes de l’Afrique jusqu’à son passage dans les eaux de l’Atlantique ».

Le météorologue cubain, le Dr. Jose Rubiera, fait partie du documentaire, et « il nous a fourni une vision générale d’un sujet de cette envergure », a déclaré Farmer, qui a également signalé qu’ils ont travaillé « avec la NASA, qui dispose de nombreux moyens et de progrès technologiques. Ils nous ont aidés avec des images, comme l’entrée d’un avion de reconnaissance dans l’œil de l’ouragan, ainsi que des entretiens avec des astronautes sur l’ouragan Lucy (qui dévasta El Yunque à Porto Rico, la province cubaine de Pinar del Rio et la Louisiane, aux États-Unis) ».

UN PEU PLUS QUE VIOLENCE ET SEXE

Parmi les invités français se trouvait le cinéaste consacré Jean Becker, un nom difficile de ne pas reconnaître, un réalisateur qui entre sur la scène mondiale dans les années 60 avec des titres comme Échappement libre (1964) ; L’été meurtrier (1983) et Elisa (1995), dont chacun a laissé son empreinte dans le paysage du cinéma français.

Si cela n’était pas suffisant, Jean est le fils d’un autre grand, Jacques Becker, dont il suffit de ne mentionner qu’un un seul titre : Casque d’or (1952) avec Simone Signoret. De leur relation, plus que filiale, professionnelle, il a déclaré lors de la conférence de presse : « Je serai bref, j’ai tout appris de lui, ce fut un cinéaste et un homme merveilleux avec un cœur énorme. »

Sa comédie Bon rétablissement, avec Gérard Lanvin, sera présentée au Festival. « Je me suis intéressé à l’histoire insolite d’un homme qui tombe dans la Seine. Après avoir été sauvé, il a perdu la mémoire. Le personnage fait face à une partie de sa vie, ce misogyne qu’il était voit sa famille avec une perspective différente. »

Ce qui l’intéresse dans un film, a dit Becker, « ce sont les rapports humains, la façon dont ils évoluent au cours de l’histoire. J’ai hérité cela de mon père. C’est une façon de faire des films, de faire en sorte que les gens se sentent attirés par autre chose que la violence et le sexe. »

VOIR LA DIVERSITÉ

Émilie Grandperret qui a tourné à Cuba avec son père Patrick , le film Fui banquero (2015) avec Pierre Richard, était présente à la conférence de presse.

Parmi les films en première dans l’île présentés au Festival et réalisés entre 2014 et 2016 figurent t : La loi du marché, de Stéphane Brizé, qui a valu àVincent Lindon le prix du Meilleur Acteur et la mention du Jury œcuménique au Festival de Cannes, et le prix César du meilleur acteur.

Un film pour lequel il faut remercier le Festival, c’est Mustang, de la réalisatrice d’origine turque Deniz Gamze Ergüven. Ce long métrage a reçu 28 prix, dont quatre César, cinq autre au Festival de Valladolid ; le Discovery (meilleur premier film) au prix du cinéma européen ; le Goya du meilleur film européen et des nominations à l’Oscar et au Golden Globe du meilleur film en langue non anglaise.

Signalons également les films d’auteur La rançon de la gloire (Xavier Beauvois) et Jeune et jolie (François Ozon) ; Marguerite (Xavier Giannoli), et, inspiré par de faits réels, le thriller La French (Cédric Jimenez) ; Les héritiers (Marie-Castille Mention-Schaar) et Diplomatie (Volker Schlöndorff), basé sur des événements qui eurent lieu peu avant la libération de Paris pendant la Deuxième Guerre mondiale.

On pourra voir également la comédie musicale La famille Bélier (Éric Lartigau), dont les membres sont sourds et muets, à l’exception de la fille Paula qui a un grand talent pour le chant, et Eden (Mia Hansen-Løve) sur la musique électronique dans la vie nocturne parisienne, où un jeune homme fait ses premiers pas en tant que DJ.

DES CLASSIQUES RESTAURÉS

Les regarder aujourd’hui, c’est comme les voir pour la première fois grâce à l’excellent travail de restauration de l’image et du son. Neuf classiques du cinéma français à voir uniquement cinéma La Rampa, avec une grande qualité de projection grâce à l’équipement numérique dans cette salle à la suite d’un projet de coopération entre Cuba et la France.

Les titres ? Pepe Le Moko, Julien Duvivier (1937) avec Jean Gabin ; French Cancan, Jean Renoir (1954), avec l’excellente interprétation de la diva mexicaine Maria Félix ; Jour de fête, Jacques Tati (1949) ; Capitaine Conan et La vie et rien d’autre, de Bertrand Tavernier (1989) ; Le Joli Mai, (1963) Chris Marker, Pierre Lhomme ; Les parapluies de Cherbourg (1964) de Jacques Demy, avec Catherine Deneuve, et Melo, (1986) d’Alain Resnais.

Au programme également, Loin du Vietnam (1967) des réalisateurs Claude Lelouch, Agnès Varda, Jean-Luc Godard, Chris Marker, Alain Resnais, Joris Ivens et William Klein, contre l’intervention des États-Unis dans ce pays asiatique.

Le Festival du film français, en sa dix-neuvième édition, ne cède la place en importance qu’au Festival international du Nouveau cinéma latino-américain

Que prévoyez-vous pour le 20e Festival ? L’un des organisateurs, Nouredine Essadi, a répondu : « Ce sera une surprise, mais nous viendrons comme d‘habitude pour le public cubain, son assiduité, son intérêt, sa passion pour le cinéma français. »