Où tout ce qui brille.

Les Jeux Olympiques...

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Une fois les caméras détournées...

La finesse et la nuance ne sont pas les marques de fabrique de Willy Toledo. L’acteur espagnol, qui ferait passer Pablo Iglesias pour un pâle démocrate-chrétien, avait pourtant touché assez juste, il y a quelques jours, en s’en prenant à son néocompatriote Orlando Ortega, médaillé olympique naturalisé l’an dernier. Le sprinter formé à Cuba et qui courrait encore au plus haut niveau pour la nation caraïbe en 2013 avait ostensiblement rejeté le drapeau cubain qui lui était tendu au terme de sa course pour s’en aller chercher le seul royal étendard.

« C’est un gusano [ver, qualificatif dépréciatif visant les opposants cubains, ndlr] mais aussi un pauvre homme, je ne lui souhaite donc pas tout le mal que se chargera de lui faire cette Espagne misérable et ses misérables ‘autorités’ quand il arrêtera de gagner des médailles », avait chargé Willy Toledo sur son compte Facebook.

Dans le viseur de l’acteur, cette propension de son pays à collectionner les défections d’athlètes de pays du Sud, portés aux nues en cas de médailles pour leur nouvelle nation, ou laissés dans la plus grande précarité si les feux de la rampe ne sont pas au rendez-vous. Symbole d’un capitalisme où tout ce qui brille cache l’essentiel.

Joan Lino, dernier athlète espagnol médaillé aux Jeux avant Ortega, peut en témoigner. Bronzé à Athènes en 2004 mais non-qualifié aux Jeux de Pékin en 2008, l’athlète né à La Havane n’a connu, depuis, qu’exploitation et dénuement – peu préparé à la bataille qui l’attendait à la fin de sa carrière –, très loin du statut privilégié réservé aux ex-sportifs par le gouvernement cubain. « Dans les entretiens d’embauche, on me demande toujours quelle est mon expérience professionnelle mais moi j’ai fait du sport d’élite pendant vingt ans », avait-il récemment confié « avec un fort accent cubain » au journal elconfidencial.com.

Son cas est loin d’être unique. D’autres naturalisés express n’ont même jamais percé et se sont retrouvés à l’aide sociale ou ont dû migrer aux Etats-Unis. Un abandon qui dépasse le cadre sportif : une fois les caméras détournées, des dizaines d’ex-opposants cubains accueillis en grande pompe en Espagne ont eux-mêmes sombré. Au point que certains ont dû reprendre leurs grèves de la faim interrompues outre-Atlantique...

Comme le souligne Willy Toledo dans un second message sur Facebook, une médaille n’efface pas longtemps le statut de « pauvre, Noir et Cubain » qui collera à la peau du néoespagnol une fois passée « son ultime victoire ». Et l’acteur, visé par une vague de protestations, de renchérir sur le mode provocateur en « chiant sept fois sur votre médaille » et « sur son patriotisme aliénant et lucratif ».

Comme il était écrit que la polémique devait connaître un épilogue tragicomique, Facebook s’érigeait lundi soir en censeur et punissait le mal-pensant Willy Toledo en le privant de son compte « pour un mois ». Ce qui lui inspira cette ironique saillie sur Whatsapp : « Mais, la censure, c’est à Cuba ! »