LA COURNEUVE. Des palmiers royaux cubains au dur hiver républicain des Brigadistes, au Jarama, à Guadalajara
Merci à Jean Ortiz pour cette chronique publié par le quotidien l’Humanité. Elle rappelle l’importante participation des cubains aux combats des brigades internationales en Espagne. Nous avons publié plusieurs articles à ce sujet, rédigés par notre ami Michel Porcheron, dont Jean Ortiz rappelle, dans sa chronique, la rigueur et le professionnalisme . Nos comités, celui du Gard et celui de l’Hérault ont cnacun réalisé, en 2015, des conférences, largement suvies.RG
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Faire vivre la mémoire, l’actualité, des Brigades Internationales, et la solidarité avec la révolution cubaine !
Comme chaque année notre Fête de l’Huma fera vivre la mémoire, l’actualité, des Brigades Internationales, et la solidarité avec la révolution cubaine : débats, expos, conférences, présentation de livres, récitals, mojito (à boire avec mots de révo), artisanat... L’histoire a jeté des ponts, tissé des liens étroits entre ces deux combats émancipateurs. Beaucoup l’ignorent encore. L’oubli imposé surtout par la « caste », permet, facilite le révisionnisme « libéral », celui des « néocons » et de tous les autres, plus ou moins « cons », le déferlement d’une nouvelle historiographie de « guerre froide » (voir Antony Beevor sur « la Guerre d’Espagne »). Il exacerbe les dangers qui guettent la « démocratie », fût-elle imparfaite.
Sait-on que proportionnellement à la population globale du pays, le groupe des volontaires cubains des BI fut le plus nombreux ? 1101 internationalistes « afro-américains » des Caraïbes, partirent des Etats-Unis, où ils avaient émigré, de Cuba... et quelques-uns se trouvaient de passage en Espagne ou y demeuraient . Une centaine tombèrent, à 8000 km de leur patrie ; 1101 Noirs , Mulâtres, pour combattre aux côtés des Républicains à Madrid, au Jarama, à Belchite, à Guadalajara, à l’Ebre. (Pour l’anecdote : le Galicien de père de Fidel détestait les Républicains).
Les volontaires cubains les plus connus restent le peintre Wifredo Lam et le journaliste Pablo de la Torriente Brau, (l’ami de Miguel Hernandez) embarqué comme correspondant de guerre et mort sous les balles franquistes le 19 décembre 1936 à Majadahonda. Le romancier Alejo Carpentier écrivit ses « chroniques » de 1937 : « L’Espagne sous les bombes ». Nombre d’intellectuels, de créateurs cubains, prirent parti pour les « rouges » : Nicolas Guillen, Juan Marinello, Felix Pita Rodriguez...
L’internationalisme du peuple cubain est ancien, d’avant-même la révolution, qui en a fait l’un de ses moteurs humains et politiques, l’une de ses valeurs phare.
La participation cubaine aux Brigades reste encore une sorte de « trou noir », d’omission à la peau dure, d’oubli des oublis, malgré les ouvrages cubains (A. Bello, etc.), le travail remarquable du poète Victor Casaus et du Centre Culturel Pablo de la Torriente Brau de La Havane, la thèse publiée de Denise Urcelay Maragnès, et les excellents articles de Michel Porcheron, qui dirigea dans les années 1970 le bureau de l’AFP à La Havane, avec une vraie déontologie professionnelle (une rareté aujourd’hui).
Les Cubains des BI étaient rattachés à la fois aux formations espagnoles et à la Brigade internationale Abraham-Lincoln (5000 Américains du nord et du Sud) de la 15ième BI. Leur engagement est d’autant plus exemplaire que l’Espagne, puissance coloniale tutrice (jusqu’en 1898), mena à Cuba une répression inouïe pour combattre deux Guerres d’Indépendance... Mais à Cuba, l’Espagne reste l’Espagne malgré tous les malgrés. Une sorte de cousinage, de lien maternel...
La plupart de ces combattants antifascistes cubains venaient des organisations révolutionnaires de jeunes, de partis « nationalistes », anti-impérialistes, de la « Joven Cuba » de Guiteras et des communistes du PSP. Beaucoup de volontaires se sentaient proches des Républicains par internationalisme, mais aussi par une sorte de parenté, et de frustration face à l’échec de « la révolution de 1933 » à Cuba, une sorte d’impatience révolutionnaire.
Lors de la « Retirada », les brigadistes cubains, notamment ceux qui restèrent jusqu’à la fin, partagèrent la vie de chien des « camps de concentration » français avec ces « indésirables étrangers » : les républicains et antifascistes espagnols. L’un d’eux repose au camp de Gurs.
J’ai retrouvé dans mes vieux papiers le texte d’une « guaracha », rythme populaire cubain, écrit en avril 1939 au camp d’Argelès-sur-Mer... Dans l’enfer de sable. Paroles et musique du Cubain Julio Cueva... Une perle d’émotion.
« Alé alé reculé »
1. Lors de la dernière Retirada
de l’armée de l’est
un groupe de Cubains
fuyant la peste
ont traversé la frontière
convertis en Gitans
« Alé alé reculé »
Une fois arrivés en France
des gardes avec des casques les attendent
et crient avec arrogance
« tous en colonne par trois »
chœur
« Alé alé reculé »
car il faut marcher à pied
de Cerbère à Argelès
2. Voilà qu’ils sont sur la plage
inoubliable, fameuse
belles plages d’Argelès
On y voit les barbelés
le Maure, le Sénégalais
les surveillent gentiment
avec ces si jolies phrases
« Alé alé reculé alé alé »
Vive la France hospitalière
vive sa fameuse devise
liberté, égalité, fraternité, etc., etc. (quatre strophes)