191 contre 2 : le monde entier pour la levée du blocus contre Cuba

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L’Assemblée générale des Nations Unies a voté la levée du blocus des États-Unis contre Cuba. Selon plusieurs organisations, réunies dans la Coordination pour la levée du blocus contre Cuba, « le seul pays qui se retrouve isolé sont les États-Unis eux-mêmes, et non Cuba ».

Nous reproduisons ci-dessous l’article écrit par la Coordination belge pour la levée du blocus contre Cuba et paru dans le journal du PTB (Parti du Travail de Belgique) le 3 novembre 2017.

L’Assemblée générale des Nations-Unies au siège de l’organisation à New York, le 12 septembre. Photo ONU/Cia Pak

L’Europe condamne, mais se résigne.

Après le passage de l’ouragan Irma à Cuba, une série d’ONG ont récolté des fonds pour la reconstruction du pays. Cependant, ils ne parviennent pas à faire virer l’argent via une banque belge. En cause : le blocus des États-Unis contre l’île.

Ce 1er novembre, l’isolement des États-Unis sur ce sujet est clairement apparu au sein de l’Assemblée générale des Nations Unies. Avec 191 voix pour et 2 voix contre, le monde entier a voté pour la levée des sanctions étasuniennes contre Cuba.

Le seul pays qui se retrouve isolé sont les États-Unis eux-mêmes, et non Cuba.

Les sanctions économiques et financières des États-Unis contre Cuba interdisent aux entreprises étasuniennes de faire du commerce avec l’île. Mais le blocus a aussi des conséquences extraterritoriales qui ont aussi des effets jusque chez nous. Exemple : dans notre propre pays, plusieurs ONG se sont vu confisquer des paiements par les autorités des États-Unis, pour la seule et unique raison que le nom de Cuba était mentionné dans la communication.

On ne peut donc pas sous-estimer les conséquences du blocus. Cuba, un pays très dépendant de l’importation de produits de base, est ainsi obligé de s’adresser aux marchés éloignés et plus coûteux de l’Europe et de l’Asie. Pertes estimées, entre avril 2016 et juin 2017 : 4,3 milliards de dollars.

Ceci représente presque le double de ce dont Cuba a besoin en termes d’investissements étrangers afin de réaliser son plan de croissance économique. Le préjudice social est énorme. Les avantageux acquis sociaux comme l’éducation et les soins de santé gratuits souffrent d’avoir à faire des économies au niveau des infrastructures et des moyens de fonctionnement. 

Pourquoi les États-Unis maintiennent-ils le blocus, après plus de 55 ans ?

Obama était arrivé à la conclusion que le blocus rate complètement son but, car le seul pays qui se retrouve isolé sont les États-Unis eux-mêmes, et non Cuba. Le président précédent a rétabli les relations diplomatiques avec Cuba et fait quelques démarches en vue d’une normalisation des relations. Cependant, aussi sous Obama, le blocus financier et économique était maintenu, car celui-ci est consolidé par des sévères lois de blocus que seul le Congrès peut modifier.

Cuba veut maintenir des relations internationales avec tous les pays, sur une base de respect et d’égalité.

Avec le président Trump au pouvoir, nous avons vite entendu un tout autre son de cloche. Il dispose en effet du pouvoir d’annuler d’un trait de plume la politique récente envers Cuba. Si Obama optait pour le rapprochement, Trump vise clairement la confrontation. La carotte ou le bâton, c’est bien une différence en termes stratégiques, mais le but final reste le même : ouvrir Cuba aux entreprises privées (étasuniennes) et, si possible, en finir en même temps avec le régime du parti unique. Par ailleurs, les entreprises étasuniennes sont prêtes à investir dans l’île.

Cuba, de son côté, a tout intérêt à ce que le blocus cesse le plus vite possible. Les entreprises cubaines pâtissent d’un matériel de production obsolète, et ils ont un besoin urgent de capital étranger afin d’édifier une économie moderne. Cuba utilise même des pratiques libérales d’exonération d’impôts, de participations majoritaires, de zones de libre-échange visant à séduire des investisseurs étrangers.

Si Cuba ouvre ses portes, pourquoi le président Trump en revient-il encore à la politique agressive de la confrontation ?

Trump se trompe, non seulement de stratégie mais aussi de cible. Cuba ne cédera pas aux pressions politiques ou économiques. Car 58 ans de révolution cubaine ont doté le pays et son peuple d’une grande fierté et d’une confiance en soi, ce que les pays occidentaux sous-estiment.

Cuba a survécu à la chute de l’Union soviétique, la mort de Fidel n’a pas engendré l’implosion.

Lorsque, l’année prochaine, Raoul et « les dirigeants historiques de la révolution » vont passer le flambeau à la génération suivante, personne ne s’attend à la fin de l’expérience socialiste.

Cuba n’accepte pas que les États-Unis lui donnent des leçons unilatérales en matière de droits de l’Homme et refusent d’avoir un dialogue en ce qui concerne les violations dans ce pays, comme les interventions policières brutales, les nombreuses victimes des armes à feu, les quelques 23 millions de citoyens des États-Unis qui, suite à la suppression de l’Obama-care, risquent de perdre leur assurance soins de santé.

Pour les cubains, le discours de Trump sur la défense des droits démocratiques paraît hypocrite : il y a quelques semaines, il a conclu des marchés valant des milliards avec l’Arabie saoudite pour l’achat d’armes, un pays guère exemplaire pour sa démocratie.

L’Europe se distancie clairement des États-Unis, et elle appelle ce pays à lever le blocus.

Cuba veut maintenir des relations internationales avec tous les pays, sur une base de respect et d’égalité. Sous ces conditions, on peut parler de tout, y compris de Droits de l’Homme et de démocratie.

L’Europe l’a compris. Le nouvel accord bilatéral entre l’UE et Cuba, qui est entré en vigueur ce 1er novembre 2017, crée un cadre permettant plus de commerce et de coopération économique. En même temps, le dialogue politique est poursuivi, y compris en matière de Droits de l’Homme.

L’Europe croit au « dialogue et à la coopération avec Cuba comme le meilleur instrument pour développer une relation constructive et tournée vers l’avenir, au bénéfice des citoyens des deux côtés de l’océan », a dit la membre du Parlement européen Elena Valenciano, lors de l’adoption de l’accord.

Avec cette position, l’Europe se distancie clairement des États-Unis, et elle appelle ce pays à lever le blocus. Cependant, la voix européenne reste faible, car l’Union se montre impuissante à neutraliser les effets du blocus dans nos propres régions.