Protéger la douce saveur du miel

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Nos amis Alain Benoît et Mariette Mercier de la Cité de l’Abeille, sise à Viscomtat dans le Puy de Dôme, reviennent de Cuba au terme de l’exposition « Un baiser pour les abeilles de la terre » qu’ils ont présentée à la Maison Victor Hugo, en plein centre historique de La Havane.
La tête pleine de souvenirs, ils nous font part de leurs impressions :
« Tout s’est bien passé pendant ces 46 jours à Cuba. À la casa Victor Hugo, quel honneur d’exposer dans ce magnifique lieu.
L’expo était prévue du 9 février au 2 mars mais elle est restée installée jusqu’au 7 mars.
Le nouveau directeur Deivy Colina ainsi que les autres personnes ont été tip top.
Jean Marie Bruno, ambassadeur de France à Cuba est venu au vernissage. Il est ensuite resté plus d’une heure à se faire expliquer l’expo, à discuter avec les gens. »
Le comité Cuba Coopération du Puy de Dôme et CCF sont heureux d’avoir facilité les contacts entre la Cité de l’Abeille et la MVH.
L’engagement d’Alain et Mariette n’était pas seulement culturel : un projet de solidarité en faveur d’apiculteurs cubains sinistrés de l’ouragan Irma, lancé sur le site Ulule avec le soutien du siège et du comité Puy de Dôme, a permis d’indemniser huit familles au lieu de six comme prévu.
Pour faire suite à cette exposition (cf notre compte-rendu du 19.02 dans la rubrique "activités" de la Maison Victor Hugo), nous publions aujourd’hui un article de Granma à propos de ce produit exploité avec rigueur et grande qualité à Cuba.

Garantir l’innocuité du miel exige la mise en œuvre d’un protocole rigoureux, visant à conserver toutes ses propriétés.

Isidro connaît les bonnes pratiques et les applique pour garantir la santé de ses ruches. Photo : Leidys María Labrador Herrera

Las Tunas. — Ses propriétés curatives, ses différents usages dans l’alimentation ou son utilisation en tant que matière première dans les industries pharmaceutiques et biotechnologiques, font du miel un produit à forte demande au niveau international.
Le fait qu’il se soit consolidé en tant qu’article exportable a exigé de multiplier les efforts pour élever la culture des apiculteurs, dans le but d’obtenir une gestion plus efficace de ce produit. En ce sens, l’entreprise apicole a mis au point des stratégies qui reposent principalement sur le contact direct avec les producteurs.
C’est à partir de ces principes que travaille l’unité d’entreprises de base apicole de Las Tunas. La diffusion de manuels de bonnes pratiques de production, la formation individuelle et collective, ainsi que des « rencontres plénières sur le miel » figurent parmi les outils mis à disposition des apiculteurs afin de garantir trois éléments essentiels : la productivité, la qualité et la sécurité.

La qualité à partir d’un système de gestion intégrée

Aujourd’hui, l’UEB* de La Tunas compte 328 ruchers productifs (composés par un nombre « X » de ruches), appartenant à 127 producteurs. Ces derniers sont membres de 36 coopératives de crédit et de services, à travers lesquels sont passés les marchés.
(*UEB : Unidad Empresarial de Base)

Comme d’autres productions, le miel est classé par catégories en fonction du respect de paramètres de qualité. Le paiement aux apiculteurs dépend de ces paramètres. À ce sujet, Isabel Yanet Carbonell Jorge, spécialiste en gestion de la qualité de l’UEB de Las Tunas, nous a apporté quelques précisions.

« Nous avons mis en place un système intégré de gestion de la qualité qui évalue de façon constante les aspects susceptibles d’affecter cet indicateur. Nous réalisons les tests d’humidité et de couleur dans notre laboratoire (en fonction du type de fleurs butinées). « Nous effectuons également le test organoleptique : odeur, goût et apparence du miel. Nous évaluons aussi le dosage quantitatif de HMF (Hydroxyméthylfurfural) : lorsque ce dernier augmente, nous considérons cela comme un indicateur de perte de qualité du miel due au vieillissement et au mauvais entreposage ou une manipulation incorrecte du produit. Tous ces éléments sont pris en compte au moment de déterminer la qualité.

« Il existe aussi une documentation rigoureuse qui permet de déterminer la quantité de miel, de bidons et les ruchers d’où il provient. Cela permet la traçabilité de cette production, de sorte qu’en cas de problème dans un lot, après l’exportation, il est possible de savoir quels sont les producteurs concernés.

« Ces aspects sont pris en compte pour le paiement, qui est effectué en fonction du prix sur le marché international. Par exemple, au mois de février, nous avons payé 17 900 pesos la tonne. Une tonne de miel de première qualité sur le marché international est de l’ordre de 3 000 à 3 200 euros. Bien sûr, il s’agit d’un prix de vente parmi les plus élevés en ce moment, car le prix du miel fluctue aussi : à certains moments, nous travaillons avec des prix moyens et bas ».

Cependant, certaines particularités dans notre région exigent un suivi strict. En effet, les négliger nuirait aux paramètres de qualité, indispensables au miel.

Les techniques de transhumance

Dans la région de Las Tunas, la floraison des plantes mellifères, comme le romarin, est la plus importante. Cependant, à la fin de la période optimale, la dispersion des fleurs oblige les producteurs à procéder à ce que l’on connaît en apiculture comme « la transhumance ». En d’autres termes, le déplacement des ruches d’une zone à une autre dans le but de tirer un maximum de profit d’une floraison.

Cette pratique apporte d’importants avantages, que l’on retrouve principalement dans la productivité, mais cela peut entraîner des difficultés si la gestion des ruchers n’est pas parfaite.

Les zones côtières sont riches en fleurs, c’est pourquoi il n’est pas rare que les producteurs transhumants de miel y emmènent leurs ruches. Cependant, le miel en provenance de ces plantes présente en général un taux d’humidité élevé, qui peut dépasser 20 à 21 %, si bien que ne respectant pas le maximum de 19,6 %, il ne peut être classé en première catégorie. Pour résoudre ce problème, plusieurs producteurs expérimentés, comme Carlos Duarte, savent très bien comment s’y prendre.

« En général, les miels les plus humides sont les miels côtiers et ceux du bejuco indio ou leñatero. Dans ces cas, le producteur doit s’assurer que ces miels mûrissent le plus possible. Dans certaines floraisons, il est possible de prélever le miel des rayons avec un pourcentage de fermeture des alvéoles de 70 % ou plus, mais dans ces floraisons, il faut que la fermeture soit de 100 %. »

Si l’on considère que le miel doit être un produit sans danger, les apiculteurs doivent veiller à certains aspects pour installer leurs ruches. Par exemple, dans les zones d’agriculture intensive, il existe des probabilités élevées de pollution, compte tenu de l’utilisation d’engrais, d’herbicides et autres produits chimiques. L’hygiène des lieux est également vitale, l’emplacement des ruchers, afin d’éviter les prédateurs ou la présence de rongeurs.

En outre, il faut remplacer les éléments de la ruche, préalablement désinfectés, en temps utile. Le nettoyage de tous les équipements et ustensiles qui entrent en contact avec le miel est un autre atout de bonne pratique, comme l’affirme Isidro Silva.

« Nous devons faire très attention à tous les outils que nous utilisons parce que nous courons le risque de contaminer le miel. C’est la raison pour laquelle l’entreprise nous a vendu un module de prélèvement du miel où tous les composants sont en acier inoxydable, ce qui facilite grandement l’assainissement. Par ailleurs, du fait que nous réutilisons les bidons, nous devons les laver soigneusement, uniquement avec de l’eau et les laisser sécher complètement avant de les remplir de nouveau. »

Bien que cela puisse sembler une mesure extrême, garantir la sécurité exige également un contrôle sanitaire constant de l’apiculteur lui-même, afin d’empêcher que toute infection dont il souffrirait, susceptible d’être transmise par des aliments, puisse contaminer le produit final.

Dans cette région, il n’y a pas d’usine de transformation, de sorte que le miel collecté est transporté, à Contramaestre, à Santiago de Cuba. Il convient de signaler que, bien que le laboratoire de l’UEB ne soit pas en mesure de pratiquer tous les tests nécessaires, ses résultats sont généralement conformes à ceux de l’usine de transformation.

Vision de l’avenir

Avec l’augmentation des exigences des consommateurs, le marché international demande de plus en plus des miels biologiques et spécifiques (produit d’une même floraison). Même si pour l’instant cela n’est pas possible dans la province, des études sont en cours pour progresser vers ces modes de production.
Parallèlement, la formation continue des apiculteurs est la principale garantie de qualité. L’apiculture est un type d’élevage très complexe, qui exige une bonne maîtrise des pratiques, de chacune des manipulations, en particulier si l’on considère que la production de miel dans le pays est encore artisanale.


http://fr.granma.cu/cuba/2018-03-29/proteger-la-douce-saveur-du-miel