Restauration des mosaïques vénitiennes du théâtre Tomás Terry de Cienfuegos.

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Merci à la société SEGAT qui par son apport financier en matière de mécénat, a permis la réalisation des travaux de restauration de ces splendides mosaïques, qui retrouveront ainsi leur éclat d’antan pour le 200e anniversaire de Cienfuegos, la "Perle du Sud" RG

En 1863, Tomás Terry, richissime homme d’affaires qui a fait fortune dans le commerce d’esclaves et l’exploitation sucrière, offre 50 000 pesos au gouverneur de Cuba pour construire, suivant les modes occidentales et notamment parisiennes, un grand théâtre dans sa ville de Cienfuegos, mais le projet n’aboutit pas. À sa mort, en 1886 à Paris, ses héritiers décident d’accomplir son vœu et placent à cet effet une somme de 115 000 pesos. Un concours est lancé et un jury français, constitué pour l’occasion, retient le projet de l’architecte militaire Lino Sánchez Mármol. La première pierre est posée le 19 décembre 1887, à l’emplacement de l’ancien théâtre Isabelle II, et les travaux se poursuivent jusqu’en novembre 1889. Sarah Bernhardt et Enrico Caruso se produiront dans ce théâtre qui a été classé Monument national.
Nicole Bedez

À Cienfuegos on restaure les mosaïques vénitiennes de grande valeur du théâtre Tomás-Terry

L’artiste italien Verdiano Marzi est responsable de la restauration des mosaïques vénitiennes du théâtre Tomás-Terry- Photo : Ismary Barcia

Elles se dressent au-dessus du porche principal du théâtre. Trois images allégoriques de la tragédie, de la comédie et de la musique sont visibles depuis les toits, depuis les immeubles les plus élevés du centre historique, héritage de la première moitié du XXème siècle, depuis les nombreuses coupoles de la ville ; elles resplendissent au soleil couchant, face au parc José Martí.

Elles font partie de l’image emblématique de la Cienfuegos de la mer… mais elles cesseront de l’être durant quelques mois. De même que le théâtre qu’elles couronnent, ce qui nous privera des meilleurs évènements culturels du pays tandis que l’on rénovera ses vieilles structures, murs, escaliers, plafond, œuvres d’art… ainsi que ses mosaïques vénitiennes, dans l’attente du bicentenaire de la cité.

Des élèves et des diplômés de l’école des métiers d’art du Bureau du conservateur de la ville participent à la restauration des mosaïques – Photo : Ismary Barcia

Grâce aux fonds gérés par Cuba Coopération France, les travaux redonneront leur splendeur à l’un des rares exemples de l’influence de l’art byzantin à Cuba.

Sur le trottoir du théâtre, les échafaudages nous signalent les dangers liés aux travaux mais ne dévoilent pas le patient travail de quatre jeunes de Cienfuegos et de leur maître, venu expressément d’Italie, pour détacher trois joyaux de ce Monument national.

Chaque fragment est scrupuleusement déposé dans l’un des locaux du théâtre, comme le montre Bernard Montagne, secrétaire général de l’association Cuba Coopération France, laquelle compte plus de trente projets réalisés sur notre territoire.

Son projet le plus récent a rapporté « 50 000 euros pour financer la restauration de ces mosaïques provenant de la maison vénitienne Salviati, installées lors de l’inauguration du théâtre le 12 février 1890 ».

Dès le début du diagnostic des pièces, en 2014, l’association n’a rien laissé au hasard. En mars, elle a fait venir l’artiste italien Verdiano Marzi qui a formé des élèves et des diplômés de l’école des métiers d’art du Bureau du conservateur de la ville.

Ils ont réalisé in situ le calque minutieux de chaque élément, tel une sorte de mémoire graphique pour les interventions futures. Ils ont ensuite préparé le travail, validé l’échafaudage et, dans la dernière semaine de juin, ont commencé l’encollage de la surface avec application d’une gaze de coton pur qui permet de retirer, sans en perdre un seul, chaque fragment des précieuses tesselles.

« Chaque travail de restauration est différent, affirme Marzi. Ici la spécificité se situe dans l’intérêt porté par Cuba Coopération France à la collaboration avec le peuple cubain, particulièrement avec les jeunes de Cienfuegos, en leur dispensant un enseignement ; cela m’a beaucoup motivé. »

De la capitale de l’art de la mosaïque à Cienfuegos.

À l’âge de neuf ans, Verdiano Marzi s’est initié à l’art de la mosaïque. Il a appris dans sa ville natale de Ravenne ce langage universel complexe utilisé pour composer avec des tesselles, ces petits morceaux de pierres, de céramique ou de verre, des images artistiques, figuratives ou abstraites, « un langage universel » comme il aime à le dire.

« Ravenne est une ville considérée comme la capitale des mosaïques paléochrétiennes byzantines de la première période crétoise, entre les Vème et VIème siècles. C’est un art qui a été peu considéré et apprécié mais qui renaît aujourd’hui. Quand j’ai évalué l’état des œuvres du théâtre Terry, j’en ai recommandé la restauration immédiate car les éléments en étaient grandement détériorés. J’ai remarqué la mosaïque du centre, la plus détériorée ; ensuite j’ai constaté, en la comparant avec les deux autres et en les touchant, que les tesselles étaient séparées. »

La Direction provinciale de la culture, celle du théâtre, les administrations locales et provinciales, le Bureau du conservateur ont collaboré, selon l’énumération faite par l’artiste qui affirme que « l’intérêt des autorités est grand et que la logistique et l’organisation ont été excellentes ».

Cuba Coopération France a fourni les matériaux et mortiers spéciaux pour restaurer chaque fragment. Pendant la deuxième étape des travaux, qui se déroulera de novembre 2018 à janvier 2019, le maître espère que « les mosaïques seront restituées à l’identique des originales ».

Ces jours-ci, il supervise l’enlèvement et la dépose des trois grandes pièces, à vingt mètres de hauteur, que les jeunes de Cienfuegos qu’il a formés nettoieront et prépareront en attendant son retour en novembre prochain.

Commencera alors la deuxième étape de la restauration puis la réinstallation à l’emplacement initial, comme couronnement, une nouvelle fois, du porche du théâtre Tomás Terry, un évènement prévu pour janvier 2019, trois mois avant le bicentenaire de la ville naguère appelée Fernandina de Jagua.


http://www.5septiembre.cu/restauran-valiosos-mosaicos-venecianos-del-teatro-tomas-terry/