La « cuenta propia » (suite) : Les nouvelles dispositions prises relatives au travail pour son propre compte

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Plusieurs décrets, règlements et circulaires d’application relatifs aux nouvelles dispositions légales mettant en œuvre la politique d’amélioration du travail pour son propre compte,sont publiés ce mardi au journal officiel de la République de Cuba. Ils n’impliquent pas d’éliminations mais des ajustements des activités existantes, ainsi que des changements dans les droits et les obligations, les règles juridiques et les pratiques fiscales. (Cubadebate du 10 juillet 2018).
(Cet article paru dans Cubadebate reprend en les complétant les informations déjà données hier par le journal Juventud Rebelde et, même s’il comporte de nombreuses redites, il nous a paru intéressant de le publier à son tour. PL)

Les nouvelles dispositions, dont quelques unes répondent à des revendications des travailleurs pour leur propre compte, visent à corriger des contournements de la politique établie. Photo : Claudia Camps.

Lors d’une réunion la veille avec la presse, la vice-ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Marta Elena Feitódo Cabrera, a précisé « il n’y a pas de retour en arrière sur le travail pour son propre compte, au contraire, nous devons préserver cette activité économique, mais de manière réglementée "

À cet égard, elle a précisé que le gouvernement est prêt à continuer à développer cette modalité, et comme exemple a souligné qu’en 2010 157 351 travailleurs pour leur propre compte (TCP) étaient enregistrés lorsqu’une série de mesures pour le flexibiliser et le développer a commencé à être appliquée. Le chiffre est passé à 591 456 aujourd’hui, soit 13% des personnes employées dans le pays.

Cela signifie la création de plus de 434 000 nouveaux emplois depuis 2010, a-t-elle dit, notant que le nombre de travailleurs indépendants a connu une croissance continue.

Le travail indépendant a facilité le processus de réorganisation du travail amorcé en 2009 à Cuba. Il contribue à créer des emplois et à libérer progressivement l’État des activités non fondamentales pour qu’il puisse se concentrer sur celles qui sont stratégiques pour la nation. Mais avec les avantages, il y a eu également des déviations que cherche à corriger la nouvelle politique.

Regroupement, nouvelles licences, exercer une seule activité.

Parmi les mesures prises : sept activités sont intégrées dans la catégorie « soins de beauté »( barbier, maquilleuse, masseur, manucure, coiffeuse, coiffeuse styliste de tresses et coiffeur traditionnel) Photo : Elba Salazar Cuba

Les 27 activités gelées s’ouvriront à nouveau avec l’octroi de licences à partir de décembre prochain avec la nouvelle réglementation en vigueur.

En même temps, de nouvelles licences sont créées. Le permis pour l’élaboration de la nourriture et des boissons est modifié ; deux nouvelles catégories sont créées : les services gastronomiques et les restaurants, et les services de bar et de loisirs.

En outre, sont créées les activités de boulanger-pâtissier et propriétaire de moyens de transport.

"Aucune activité ne disparaît, 96 d’entre elles sont regroupées en 28, et sur un total de 201, nous en avons 123", a expliqué la vice-ministre du Travail et de la Sécurité sociale.
Dans certains cas, une seule autorisation, (comme dans l’activité d’esthéticienne où sept activités sont maintenant regroupées), permettra un service plus complet avec la même charge fiscale qu’auparavant.

Les nouveaux règlements établissent également qu’une seule autorisation par personne sera donnée.
En même temps, pourra uniquement être exercée à la même adresse l’une des activités de services alimentaires dans les restaurants, cafétéria ou service de bar et de loisirs.
Aucune autre licence ne sera plus accordée pour les activités suivantes :

  • grossiste de produits agricoles,
  • détaillant de produits agricoles,
  • opérateur ou vendeur de produits agricoles ambulant,
  • acheteur /vendeur de disques
  • opérateur de matériel de loisirs (manèges) une activité dans laquelle les avis techniques préalables à l’exploitation sont essentiels et dans laquelle l’importance de protéger la vie de ses principaux utilisateurs, les enfants, est prise en compte.

Mais,la cessation de l’octroi de ces licences ne signifie pas que ces activités disparaissent. Les travailleurs qui ont déjà été autorisés peuvent continuer à les développer.

Dans d’autres domaines, il y aura aussi des modifications :
les loueurs de maisons, de chambres et de locaux qui jusqu’alors ne pouvaient louer qu’à des personnes physiques peuvent louer à des personnes morales (entreprises, organismes et organisations).

Par ailleurs en cas d’absence, pour un voyage à l’étranger ou pour une autre cause, un chef d’entreprise peut nommer un représentant parmi ses employés pour le remplacer.

Les nouvelles dispositions, dont certaines répondent aux revendications des travailleurs pour leur propre compte eux-mêmes, visent à corriger des contournements et des violations de la politique établie, tels que l’utilisation de matières premières et d’équipements d’origine illicite, le non-respect des obligations fiscales et la sous-déclaration des revenus, l’absence d’affrontement du problème et par conséquent de solutions opportunes, les insuffisances dans le contrôle qui ont permis la prolifération des illégalités et des délits, des déficiences dans l’embauche de travailleurs pour leur propre compte avec des entités étatiques, et la pratique d’activités non approuvées qui sont effectuées par des prête-noms.

"Il s’agit de rectifier les carences afin que le travail indépendant continue d’avancer", a affirmé la vice-ministre.

Aucune activité n’est supprimée. Les activités sont regroupées, les procédures administratives sont réduites et les services sont étendus avec la même charge fiscale.

Esprit de la politique et entrée en vigueur.

La nouvelle politique et ses dispositions entreront en vigueur 150 jours après leur publication au Journal officiel, soit le 7 décembre.
Jusque-là, un processus de formation des TCP sera développé et il y aura des séminaires aux niveaux national et provincial, auxquels s’ajoute la vente dans les kiosques, à partir de fin juillet ou début août, de ce numéro spécial du Journal officiel.

La vice-ministre a également déclaré que 98,4% des travailleurs indépendants du pays sont inclus dans les activités qui sont intégrées ou ne subissent pas de modifications. Seuls les 1,6% restants, soit neuf mille (dont 50% à La Havane), doivent décider d’un changement, pour lequel ils disposeront d’un délai d’une durée maximale de 90 jours après l’entrée en vigueur des dispositions.

Sur cette question, liée au fait que la nouvelle politique n’autorise la délivrance de licences que pour une seule activité approuvée , elle a expliqué qu’il s’agit d’activités qui, de par leur nature, ne peuvent être exercées pendant le même temps et n’ont aucun lien ; il n’y a aucune possibilité de les intégrer dans la même licence.

« Il y a des travailleurs qui ont une cafétéria et qui, en même temps, ont une licence de manucure ou de lavage de voiture ou de fabricant-vendeur de chaussures. Cela n’est pas possible.
En pratique, c’est un propriétaire qui a de nombreuses entreprises, et ce n’est pas l’essence et l’esprit du TCP, qui consiste en des travailleurs exerçant quotidiennement leurs activités »
, a-t-elle dit.

Autres points des nouvelles dispositions :

L’ouverture de nouveaux restaurants sera soumise à partir de décembre à l’approbation des conseils d’administration provinciaux. Photo : Vicente Brito/ Escambray

Le Conseil de l’Administration Provinciale (CAP) sera l’instance qui autorisera les licences des services gastronomiques et des restaurants, des bars et des services de loisirs, et loueurs de maisons.

Les CAP peuvent fixer des limites aux prix et tarifs des produits et services fournis par les TCP lorsque les circonstances l’exigent, en tenant compte des caractéristiques du territoire.

Au niveau municipal, des activités seront autorisées après l’évaluation d’un groupe multidisciplinaire présidé par le conseil municipal afin d’éviter de développer des activités dans des zones qui dérangent le reste de la population (menuiserie, laverie de voitures, huilerie, scierie,etc entres autres).

Les TCP ont le droit de contracter des services artistiques ou d’utiliser des médias audiovisuels ou des services artistiques enregistrés ou en direct, mais ils doivent exécuter le contrat correspondant.

Parmi les contraventions, figurent le non-respect des niveaux sonores normés, et la présentation des contenus qui font un usage abusif des symboles patriotiques, qui sont sexistes, discriminatoires ou incluent la pornographie.
D’autres contraventions sont prévues dans le domaine de la culture comme la commercialisation d’œuvres d’art dans des lieux non autorisés ou par des personnes non inscrites au Registre national du créateur d’œuvres d’arts plastiques et appliqués.

  • Les professeurs de musique et d’autres arts, de sténodactylographie, mécanographie et langues, les instructeurs de pratique sportive ne peuvent constituer des écoles et des académies, ni contracter le service d’autres professeurs ou instructeurs, ni organiser des événements avec ou sans caractère compétitif.
  • Le facilitateur (*ndt équivalent d’agent immobilier en France) des échanges et des achats/ventes de biens immobiliers n’inclut pas dans son profil la création de biens immobiliers, ni leur gérance ni l’embauche de travailleurs, ou la présentation de documents juridiques devant les autorités compétentes.
  • Pour solliciter la licence, il est nécessaire de présenter : une description ou le projet de l’activité à réaliser, une déclaration sous serment de l’origine de la source de financement et les investissements réalisés (dans 13 des activités), le permis de planification physique du ministère de la santé publique en matière d’hygiène, ainsi que la définition des horaires de travail des salariés.

Est-ce que la charge fiscale augmente ?

Bien que cesse l’émission de licences pour quelques activités celles-ci ne disparaissent pas. Photo : Claudia Camps

Les mesures n’entraîneront pas une augmentation de la charge fiscale, mais elles réorganiseront le processus d’adéquation dans un groupe d’activités dans lequel près d’une centaine sont réunies en 28, ce qui nécessite une définition du régime fiscal.

L’exonération du paiement de l’impôt pour l’embauche de cinq travailleurs au maximum est supprimée
, et à son tour l’assiette de l’impôt minimum est ajustée pour le paiement de cette taxe, dont le taux d’imposition continue d’être de 5%.
Ces modifications couvrent toutes les formes de gestion non étatique, ce qui inclut les artistes et les créateurs et les coopératives non agricoles.

Pour l’utilisation de la force de travail, la base imposable minimale à laquelle s’applique le taux d’imposition de 5%, sera appliquée jusqu’à cinq travailleurs, soit l’équivalent du salaire moyen du territoire ; de six à dix, deux salaires moyens ; de 11 et jusqu’à 20, trois salaires moyens, et plus de 20, six salaires moyens.

La définition des quotas fiscaux par rapport au reste du pays est différente pour La Havane. Sur la base de cette définition, une augmentation est créée pour la capitale dans 41 activités qui ont été unifiées et dans 20 pour le reste du pays. Ces augmentations touchent environ 25 000 contribuables, soit 4% du nombre total d’inscrits.
Les augmentations, de 63%, vont de 5 à 40 pesos ; seulement 2% auront des augmentations entre 100 et 300 pesos. Dans le même temps, il y a une réduction des quotas de 39 activités,= et 22 à La Havane.

Sont créés des comptes bancaires fiscaux pour les services gastronomiques, la location de logements, les services de construction et le transport dans la capitale (véhicules de 4 à 14 passagers). Les principales opérations pécuniaires du TCP doivent transiter par ces comptes.

Mesures à l’intention des délinquants.

La nouvelle politique regroupe dans un seul corps juridique les mesures pour infraction et avec une plus grande sévérité, allant des notifications préventives à des amendes à la suspension de l’autorisation jusqu’à deux ans, à la confiscation ou à l’annulation définitive de l’autorisation d’exercer pour son propre compte.

Par exemple, peuvent entraîner une annulation définitive les faits suivants :

  • si une personne autorisée agit pour un tiers non autorisé ;
  • s’il y a trafic de drogue, proxénétisme et prostitution ou autres actes constituant un crime (indépendamment de la sanction pénale appliquée) ;
  • ou encore l’emploi d’enfants de moins de 15 ans, ou des jeunes entre 15 et 16 ans travaillant sans l’autorisation correspondante établie par le Code du travail.

Modifications et nouveautés dans le transport


Dans ce secteur, il a été décidé de modifier la réglementation de 1996 sur la licence de transport et d’unifier en une seule norme juridique les questions liées aux procédures de licences des personnes physiques et morales.

Dans ce domaine, le transport de passagers et de marchandises sur le territoire national et les services auxiliaires et connexes sont inclus.
Selon Marta Oramas, vice-ministre des Transports, il existe actuellement 5 421 licences d’exploitation de transport, avec 57 182 titres associés accordés à des personnes morales, et 57 289 licences accordées à des personnes physiques uniquement pour fournir des services de transport pour le fret et les passagers, ainsi que 12 000 accordées par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale pour les services auxiliaires et connexes.

Parmi les principales modifications du règlement relatif aux licences de transport (accordées par le ministère des transport) dans le cas des personnes physiques, on peut citer :

  • on commence par accorder une licence d’exploitation de transport aux personnes physiques qui fourniront des services auxiliaires et connexes (pour cette première occasion, gratuitement).
    -l’extension nationale, provinciale et municipale de la licence d’exploitation de transport est rétablie (actuellement toutes les licences existantes dans le pays ont une extension nationale).
  • une exigence générale pour les personnes physiques est ajoutée lors de l’octroi de la licence d’exploitation de transport : avoir la qualification formelle ou avoir le permis de conduire de la catégorie du véhicule utilisé.
  • si le permis demandé concerne le transport par autobus, camionnettes ou camions, le demandeur doit prouver trois années d’expérience en tant que conducteur et doit être accrédité par une personne morale : cela signifie que, obligatoirement, il doit avoir été préalablement chauffeur professionnel, ou prouver qu’il s’agit d’un moyen de transport.
  • aujourd’hui, une personne physique ne peut demander une licence que si elle a son propre moyen de transport ou s’il est loué à une personne morale. Ce point est modifié et, comme est créé le statut de bailleur de moyens de transport, une personne physique peut demander une licence pour le service de transport de passagers avec un moyen loué à une autre personne physique, titulaire d’une licence de loueur de moyens de transport.

    Une nouvelle classification du service des passagers en taxis est faite :
  • service de taxi de route, services de taxis libres, et confort élevé ou service classique. Les trois services sont exclusifs.
  • les licences ont une date d’expiration. Dans ce règlement, la validité de la licence pour le transport de passagers et de fret est fixée à un an (actuellement cinq ans, avec renouvellement annuel). Dans le cas du bailleur de moyens de transport, c’est aussi un an. Pour les services auxiliaires et connexes, trois.

De plus dans ce secteur à La Havane, une expérience est autorisée, consistant à réaliser, en tenant compte de tous les principes ci-dessus, le service fourni par les transporteurs privés avec des véhicules de type auto,jeep et minibus, avec des capacités entre quatre et 14 passagers.

Après quatre mois, l’expérience s’étendra aux provinces d’Artemisa et Mayabeque, et au reste des moyens de transport de La Havane qui n’étaient pas inclus dans cette opportunité et dépassent la capacité de 14 passagers. En un an, elle passera dans le reste du pays.

« Il est question de rectifier les défauts pour que le travail pour son propre compte continue d’avancer » a affirmé Feitó. Photo : Claudia Camps.


http://www.cubadebate.cu/noticias/2018/07/10/emiten-las-nuevas-disposiciones-para-el-trabajo-por-cuenta-propia/#boletin20180710