XXIème Congrès de la CTC

Article tiré de : Bohemia (Revue cubaine d’actualité générale fondée en 1908) par Heriberto Rosabal - Juventud Rebelde par Marianela Martin Gonzalo, José Alejandro Rodriguez, Ana Maria Dominguez Cruz - Cubadebate par Thalia Fuentes Puebla, Edilberto Carmona Tamayo.

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Le XXIème Congrès de la Centrale des Travailleurs de Cuba, qui célèbre aussi cette année son 80ème anniversaire, s’est tenu du 20 au 24 avril à La Havane où plus de mille délégués se sont réunis.
Sa préparation a fait l’objet de très nombreuses réunions à travers tout le pays depuis son lancement en Août 2018 (voir nos publications précédentes).
Plusieurs médias locaux ont suivi les débats et en ont rapporté les principales interventions et les thèmes abordés. Notre propos est de reprendre ces textes et d’en tirer les points principaux.

Ce Congrès a été l’occasion de faire un point détaillé et sans concession sur la situation économique, sociale et politique dans le pays et de tracer le chemin syndical pour participer à la résolution des nombreux et difficiles problèmes que rencontre la population (transport, alimentation, production, balance commerciale…). La principale responsabilité en revient, encore, toujours et honteusement, au blocus imposé par les Etats-Unis et son Président Trump qui renforce la loi Helms-Burton qui date de 1996 en réactivant des articles jusque-là tenus en sommeil. Mais les congressistes ont également souligné les dysfonctionnements internes tant au niveau de la Direction du pays, de l’administration et des différents organismes et dont la propre CTC n’est pas exempte.

Dans la revue Bohemia, Heriberto Rosabal nous livre plutôt une vision générale de la situation dans laquelle se trouve le monde du travail à Cuba. En rappelant la Loi U.S. dite Helms-Burton, la circulation de la double monnaie (en réalité la triple monnaie car le CUC n’a pas le même taux de change selon qu’il s’applique aux entreprises ou à la population et les touristes via la CADECA), les pénuries de produits de première nécessité, il place la vie et le travail syndicaux à un haut niveau de responsabilité.

« Le XXIème Congrès de la Centrale des travailleurs de Cuba a entamé sa première journée ce samedi 20 avril. La réunion se tient au cœur d’une situation économico-financière nationale tendue et complexe, qui en ce moment même a des répercussions par exemple sur le marché intérieur où des denrées comme le poulet, l’huile, les œufs et les saucisses ainsi que d’autres de première nécessité ont une présence intermittente, pratiquement absents par moment.

Il apparaît également dans les annonces du gouvernement des Etats-Unis, l’éternel harceleur, la volonté d’appliquer des options de la loi Helms-Burton, approuvée en 1996 sous la gouvernance de William Clinton, dans le but d’accentuer le blocus économique, commercial et financier contre l’île afin d’éliminer définitivement sa Révolution et son système socialiste.
(…)
Cette nouvelle ingérence des Etats-Unis, pas seulement contre Cuba mais également contre le Vénézuéla et le Nicaragua, pays qui avec la Bolivie et d’autres nations des caraïbes insulaires, font partie de l’ALBA (Alliance Bolivarienne pour les Amériques), mécanisme d’intégration solidaire fondé par les Commandants Hugo Chavez et Fidel Castro, (…)
(…)
Le conclave syndical se place, de fait, dans des processus internes pour le socialisme cubain, comme l’actualisation du modèle de développement économique et social(…)
Comme c’était prévisible, l’économie en général et l’efficience économique en particulier sont des sujets cardinaux de ce Congrès(…)

Entre les nombreuses pièces du casse-tête insoluble que l’économie cubaine semble être parfois, malgré l’abondance de projets de solutions, on trouve l’amélioration de la gestion de son acteur principal, l’entreprise d’Etat, le contrôle et l’usage plus efficace des ressources humaines, matérielles et financières, le perfectionnement de la planification, le développement des sources d’énergie renouvelable, les mesures pour encourager l’épargne et éviter le vol de combustible et une meilleure discipline fiscale.
(…)
Ce blocus – que certains avec les « bloqueurs » tentent d’habiller du mot « embargo » pour éviter qu’il soit vu comme ce qu’il est réellement, une politique cruelle, génocide – représente objectivement le frein principal au développement et à l’accès à une vie meilleure que Cuba et les Cubains méritent, comme n’importe quel autre pays ou peuple de ce monde. Sur ce point, pensez seulement que selon certains calculs conservateurs, de différentes manières (…) le blocus coûte quotidiennement à nous qui vivons sur « le caïman » environ 12 millions de Dollars US, 4 380 millions par an.
(…)
C’est dire que le scénario n’est pas simple comme ne sont pas mineurs les difficultés, les défis pour les plus de quatre millions de travailleurs cubains.

L’article paru dans Juventud Rebelde met surtout l’accent sur les critiques qui sont régulièrement émises sur les insuffisances, l’inefficience, l’utilisation des ressources, le vol… dans la production agricole et l’industrie laitière ainsi que le secteur ferroviaire.

« Après le travail des commissions sur l’analyse des thèmes fondamentaux du mouvement syndical et son rôle dans l’actualisation du modèle socialiste cubain, la séance plénière fut ouverte (…) par Alberto Zaldivar Almaguer du Syndicat sucrier de Las Tunas, (…)qui a « rappelé la volonté des membres présents de relever les défis énoncés dans ce congrès pour que le mouvement syndical renforce son rôle dirigeant avec la combativité nécessaire pour affronter les délits, les insuffisances de production, les indisciplines, le manque de transparence de l’information et d’autres distorsions ou irrégularités. Il est l’heure de tout redresser, de changer de vérité, faire face à ce qui est particulier et laisser de côté les généralisations. La troupe est prête pour le combat » a-t-il déclaré. Cette première parole fut le clairon pour une parole franche et courageuse. »

« Comment dans l’assemblée du Syndicat, on peut ne pas discuter la liste des investissements ? Comment on peut ne pas discuter des indisciplines et des tendances comme le vol ?

Avec ces interrogations, le membre du Bureau Politique et Secrétaire général de la CTC, Ulises Guilarte de Nacimento après avoir écouté les divers intervenants et souligné le manque de ressources financières et leur contrôle qui doivent être optimisés, a mis en questions au cours de la journée de clôture « le rôle du Syndicat comme force motrice pour impulser l’efficience … et être le garant d’un réel pouvoir dans l’édification d’un socialisme prospère et soutenable auquel nous aspirons ».
Plusieurs interventions ont souligné le rôle central, dans le développement de l’économie de l’île, qu’a toujours joué et joue encore l’agriculture et ses industries dérivées notamment l’industrie laitière ou bien le réseau ferroviaire. « Le conducteur de trains Orlando Pérez, qui s’est senti fier d’être un « petit paysan » qui peut s’asseoir dans le Palais des Conventions et peut même parler en séance plénière, a dit se sentir blessé par la situation du Chemin de fer dans l’île mais il garde confiance dans sa récupération puisqu’il existe un programme de réactivation de ce service vital ».

L’article de Cubadebate.
Plus détaillé que les deux autres, le journal intitule son article « Principales inquiétudes des travailleurs cubains, en faits ».

Bien sûr qu’en reprenant la teneur des débats, on retrouve les grands thèmes décrits ci-dessus. Nous n’y reviendrons pas.

Comme l’indique le titre de l’article, il est mis l’accent sur les difficultés que rencontrent le monde du travail et la population en général.
« Les ouvriers ont réaffirmé qu’ils croient et ont confiance en leurs syndicats en même temps qu’ils ont listé les principales difficultés et inquiétudes qui aujourd’hui lacèrent les collectifs de travail.

Dans le processus de préparation et de convocation du Congrès, Ulises Guilarte de Nacimento, secrétaire général de la CTC, a assuré que l’analyse du recueil des discussions ainsi que du document « Bases pour le renforcement de la mission du mouvement syndical cubain » a constitué un processus démocratique, participatif et enrichissant. De plus, il a ajouté que cela a permis de bien identifier les tendances qui marquent les pensées des travailleurs sur le monde du travail et syndical.
(…)
L’exposé des données
Au cours de la préparation du congrès, 184 000 interventions ont été formulées dont 154 851 propositions.
58% d’entre elles faisaient référence à la bataille économique dont 32 657 au sujet des salaires et de l’insatisfaction du montant des pensions. La revendication sur la stimulation matérielle a été citée dans 22 907 propositions et l’insuffisance du pouvoir d’achat dans 9 694. Concernant d’autres propositions (35 483), 35 % ont porté sur l’amélioration du fonctionnement syndical (…). Dans le secteur non-Etat, 10 318 propositions ont été formulées pour exiger une meilleure prise en compte qui aille de la section syndicale jusqu’à l’attention personnalisée et différenciée des travailleurs de ce secteur, de leurs inquiétudes et préoccupations.

L’article de Cubadebate insiste sur les principales critiques qui ont été émises au cours du Congrès et en fait la liste en 11 points où l’on retrouve principalement la question des salaires et pensions insuffisants assortis d’une demande de reconnaissance du travail accompli, des résultats qu’il permet, en bref, une demande de mise en place d’un salaire au mérite. Les paragraphes de l’article est même intitulé « le talon d’Achille…le salaire ». On trouve également la revendication d’une meilleure participation des travailleurs à la prise de décisions, la demande de « à travail égal, salaire égal » ce qui ne semble pas être le cas, plus de rigueur dans la gestion des ressources matérielles et financières et une demande d’un meilleur fonctionnement syndical. Dans ce dernier cas, les cadres syndicaux sont appelés à plus d’exigence, de rigueur, de transparence et d’implication.

Les revendications sont ensuite rassemblées en 28 points sous le titre « les points qui enrichiront les débats dans les conclusions du XXIème Congrès ». En plus des 11 points résumés ci-dessus, on trouve des demandes vis-à-vis des administrations pour que leur efficience soit fortement améliorée ce qui permettra, en cascade, un meilleur fonctionnement des entreprises, la demande renforcée de formation de cadres syndicaux, la demande à « la plus haute direction du pays de réaliser une réforme salariale, de travailler à un meilleur système de rémunération avec l’objectif de résoudre les problèmes de distribution salariale ».

Sont également abordés la question de mise en place d’un âge différencié selon la nature du travail pour faire valoir ses droits à retraite notamment pour les femmes qui sont désavantagées pour parvenir au quota qui ouvre le droit à taux plein.
L’article se termine ainsi :
« Malgré toutes les conquêtes déjà obtenues, il reste encore des espaces et des tâches à entreprendre pour que le travail de la CTC dans sa défense des travailleurs englobe plus de sujets et puisse ainsi résoudre bon nombre d’insatisfactions qui existent aujourd’hui dans les collectifs de travail sur la représentativité du syndicat.
Les débats de ce Congrès peuvent être ce scénario où tous les travailleurs cubains voient leurs inquiétudes prises en compte et être, en plus, un canalisateur de ces préoccupations.


cubadebate.cu/especiales/2019/04/17/en-datos-principales-inquietudes-de-los-trabajadores-cubanos-infografias/#boletin20190417

juventudrebelde.cu/cuba/2019-04-20/un-sindicato-exigente-con-liderazgo-y-negociador

bohemia.cu/opinion/2019/04/cuba-y-el-congreso-de-la-ctc/