Le monde verra ce que nous sommes capables de réaliser et le monde nous accompagnera dans notre résistance

Discours de Miguel Diaz-Canel Bermudez

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Je suis conscient que je prends la parole aujourd’hui au nom des reconnaissants, de ceux d’entre nous qui font face au défi de faire avancer un pays, a déclaré le président du Conseil d’État et du Conseil des ministres Miguel Diaz-Canel Bermudez à l’occasion du 66e anniversaire de l’attaque des casernes Moncada et Carlos Manuel de Céspedes, sur la Place de la Patrie, à Bayamo, Granma, le 26 juillet 2019 « Année 61 de la Révolution »

(Traduction de la version sténographique du Conseil d’État)

• Cher général d’armée Raul Castro Ruz, Premier Secrétaire du Comité Central du Parti communiste de Cuba,

Compañero Machado,

Commandants de la Révolution,

Compañero Lazo,

Peuple héroïque de Granma (Applaudissements) :

Face à la Génération historique qui nous accompagne, je prononcerai les paroles centrales de cette cérémonie, sur cette même place où le commandant en chef, à cette même date, en 2006, a présidé pour la dernière fois et prononcé le discours de clôture d’une commémoration de la Journée de la Rébellion Nationale.

Lorsque la direction de notre Parti m’a chargé de prendre la parole ici aujourd’hui, je me suis souvenu de ce moment et j’ai pensé à la signification de cette tradition qui a commencé voilà 60 ans. Lors d’un voyage dans le sens inverse du nôtre, des milliers de paysans à cheval ont pris la Place de la Révolution José Marti de La Havane, avec à leur tête Camilo Cienfuegos. Au moins deux d’entre eux ont grimpé sur les réverbères, comme si c’étaient des palmiers, pour saluer Fidel.

Ces paysans, leur machette à la main, montraient au monde le visage le plus authentique d’une Révolution des humbles, par les humbles et pour les humbles.

C’est par cet acte qu’ont débuté les activités commémoratives du 26 Juillet, une date que la haine avait ensanglantée et que l’amour a transformée en une fête en hommage aux enfants de la Génération du Centenaire.

Je me suis demandé comment et au nom de qui je devais prendre la parole aujourd’hui, sachant qu’à ces cérémonies, par tradition, deux discours sont toujours prononcés : celui de la province, siège de la célébration et celui des protagonistes de l’Histoire.

Federico Hernandez, Premier Secrétaire du Parti dans la province, a parlé au nom des habitants de Granma. Les paroles centrales de toutes les commémorations précédentes ont été seulement à la charge de Fidel, Raul, Ramiro Valdés et Machado Ventura.

Cela pourrait paraître un détail, mais il est important que les protagonistes de l’Histoire, vivants, lucides, actifs dans leur direction politique, confient à la nouvelle génération de dirigeants du pays le soin de prononcer les paroles centrales de l’une des commémorations les plus transcendantes de l’histoire révolutionnaire (Applaudissements).

Je suis conscient que je prends la parole aujourd’hui au nom des reconnaissants, de ceux d’entre nous qui font face au défi de faire avancer un pays – comme le dit le poème de Miguel Barnet –, conscients de l’histoire extraordinaire dont nous avons hérité et de l’engagement de ne décevoir ni les héros de la Patrie ni le peuple dont nous sommes issus.

Je le dis tout au début pour que vous soyez compréhensifs au cas où, à un moment donné, comme c’est généralement le cas, l’émotion me fait oublier un mot ou un nom qui nous est cher.

Je tiens à dire à Raul, à Ramiro et à tous les participants à l’attaque qui sont ici présents : Merci pour votre confiance, pour l’exemple et pour l’héritage ! (Applaudissements).

L’Histoire ! Quel poids immense l’Histoire n’a-t-elle pas dans nos vies ! Il est juste de le dire ici, où elle a commencé à s’exprimer en tant que nation voilà 151 ans.

Lequel d’entre nous qui se sent et se dit cubain peut-il passer par La Demajagua, par Yara, par Manzanillo, par Jiguani, par Dos Rios, par La Plata, par Guisa, par Bayamo, par ses rues et ses places, sans percevoir que l’Histoire nous juge ?

Qui peut traverser la Cauto, grimper les collines de la Sierra Maestra, ou mouiller ses pieds sur la plage de Las Coloradas sans frémir de respect et de culte à l’héroïsme ?

Qui, à la lecture de L’Histoire m’acquittera, peut-il oublier les paroles de Fidel lorsqu’il expliqua pourquoi ce fut la forteresse militaire de Bayamo qui fut choisie pour l’une des attaques ? Et je cite :

« Nous avons attaqué précisément Bayamo pour situer[GG1] nos avant-postes près de la rivière Cauto. N’oubliez jamais que cette province – il faisait référence à l’ancienne province d’Oriente – qui compte aujourd’hui un million et demi d’habitants, est sans aucun doute la plus guerrière et la plus patriotique de Cuba ; c’est elle qui a entretenu la flamme de la lutte pour l’indépendance pendant 30 ans et qui a payé le plus lourd tribut en sang, en sacrifice et en héroïsme. En Oriente, on respire encore l’air de la glorieuse épopée et, à l’aube, quand les coqs chantent comme des clairons sonnant la diane et que le soleil radieux se lève sur les montagnes escarpées, il semble que chaque jour sera à nouveau celui de Yara ou de Baire. »

C’est pourquoi en vous saluant aujourd’hui, je vous disais : peuple héroïque de Granma.

Cette province, qui a été honorée du nom de l’embarcation qui amena 82 de ses enfants sur le sol cubain, prêts à être libre ou martyrs en 1956, est aussi le berceau de notre nationalité, de notre hymne, de la Révolution commencée par Céspedes en 1868 et de l’Armée rebelle qui l’a conduite jusqu’à nos jours avec Fidel à sa tête.

Ce n’est donc pas un hasard si c’est à Granma que se trouve la deuxième caserne attaquée ce matin-là de la Saint-Anne, la caserne Carlos Manuel de Céspedes de Bayamo, qui aujourd’hui, transformée en parc muséal, porte le nom respecté de Ñico Lopez, l’un des chefs de l’action dans cette ville ; un grand ami de Raul, dans le bureau duquel la photo du jeune homme aux grands lunettes noires occupe une place d’honneur.

Ñico est une source d’inspiration un jour comme aujourd’hui à Bayamo. Nos enfants et les enfants de leurs enfants doivent connaître l’histoire de ce jeune homme, un descendant d’émigrants galiciens, qui n’était pas originaire de Bayamo mais de La Havane, qui dut abandonner l’école et travailler dès l’enfance pour aider sa famille ; qui fut l’un des organisateurs des actions d’il y a 66 ans et qui réussit à sauver sa vie en se battant héroïquement dans les rues de cette ville. Une fois dans la capitale, il se réfugia dans une ambassade et émigra au Guatemala de Jacobo Arbenz, à l’époque en effervescence. C’est là qu’il rencontra le Dr Ernesto Guevara et, paraît-il, c’est Ñico qui lui donna le surnom sous lequel le monde le connaît : Che.

Ñico fut assassiné dans les heures qui suivirent le débarquement du Granma, également sur les terres de cette province, mais il n’a pas été absent une seule minute de l’œuvre révolutionnaire à laquelle il se donna avec tant de passion et de foi dans la victoire, pour laquelle il a souffert de la faim et de pénuries de toutes sortes, sans jamais perdre son enthousiasme ni son sourire.

Il est intéressant de noter que plusieurs institutions importantes, comme la raffinerie de Regla ou l’École supérieure du Parti, portent pour nom, non pas le nom officiel d’Antonio Lopez, mais celui de Ñico. Ces quatre lettres de son surnom familier portent un message : la camaraderie et l’amitié sans limites, comme l’une des valeurs de la Génération du Centenaire.

C’étaient des frères : Fidel, Raul, Almeida, Ramiro et ces hommes et ces femmes qui ont mis en avant la nation, qui ont pensé le pays comme une famille.

Nous, nous venons d’eux et il est très important que notre hommage, annuel ou quotidien, ne reste pas enfermé dans une cérémonie, dans quelques vers ou quelques mots sur une éphéméride.

La Révolution, qui a besoin à l’heure actuelle que nous menions la grande bataille pour la défense et pour l’économie, que nous brisions le plan de l’ennemi de nous détruire et de nous asphyxier, a besoin, en même temps, que nous renforcions dans notre peuple la spiritualité, le civisme, la décence, la solidarité, la discipline sociale et le sens du service public. Car c’est l’un des grands héritages de nos grands hommes, que la Génération du Centenaire a défendus. Et parce qu’aucun progrès ne serait durable si le corps social se décomposait moralement.

Passons brièvement en revue les événements d’il y a 66 ans : les actions du 26 juillet 1953 n’ont pas atteint les objectifs que se proposaient les assaillants : le facteur surprise a échoué, tous ne sont pas parvenus à échapper à la répression, qui fut violente et cruelle.

Des hommes photographiés vivants, comme José Luis Tasende, blessé seulement à une jambe, ont été brutalement torturés, puis déclarés morts au combat.

Les douloureux témoignages graphiques et oraux recueillis par les historiens et les journalistes tout au long de ces années continuent de nous bouleverser, dont le plus insupportable : imaginer les yeux d’Abel entre les mains de sicaires.

En dépit de la douleur, de la perte physique de ces « êtres d’un autre monde » tels que les décrit la Cancion del elegido, de Silvio [Rodriguez], les survivants de cette épopée, sous la conduite de Fidel, ne se sont jamais plaints, ils ne sont pas allés pleurer dans un coin leurs camarades morts ou assassinés. Ils ont créé un mouvement avec un programme libérateur qui a conservé toute son actualité et ils ont transformé cet événement en motivation pour d’autres combats : le petit moteur a embrasé le grand.

Cinq ans, cinq mois et cinq jours après l’attaque des casernes de Santiago de Cuba et de Bayamo, refusant le soi-disant échec de 1953, arriverait le triomphe de 1959. Le revers s’était transformé en victoire (applaudissements).

L’explication du miracle qui a fait qu’un groupe d’hommes finisse par vaincre l’une des armées la mieux armée du continent, ne peut se trouver que dans les valeurs humaines les plus exceptionnelles de la Génération du Centenaire : le sens de la justice, la loyauté envers une cause, le respect de la parole engagée, la confiance dans la victoire, la foi inébranlable dans la peuple et l’unité pour principe.

Au cours de la récente discussion de la Loi sur les Symboles nationaux, il a beaucoup été question de cette force. L’unité apparaît représentée dans le blason, depuis les temps de la fondation, par le faisceau serré de baguettes qui va de la base à la partie postérieure, telle une colonne vertébrale de la nation.

Nos pères et nos maîtres nous ont enseigné qu’il était plus facile de briser les bâtons séparés, mais qu’il était impossible de casser un faisceau de bâtons unis.

Lorsque nous appelons à penser en tant que pays, nous pensons à la force physique absolue qu’il existe dans un fagot de bâtons, qui seuls pourraient se briser facilement.

Il nous incombe de penser comme un pays car personne ne va penser pour nous.

Et il y a longtemps que le géant aux bottes de sept lieux qui vole dans les cieux, en dévorant le monde, a cessé d’être une métaphore visionnaire de Marti pour se transformer en une cruelle certitude de ce qui nous attend si, par ingénuité ou par ignorance, nous sous-estimons ou nous croyons que le plan de réappropriation de Notre Amérique que l’empire a lancé sous la bannière de la Doctrine Monroe plantée au mat de son vaisseau pirate ne nous concerne pas.

Le Venezuela encerclé, dépouillé, assiégé littéralement avec l’approbation ou le silence complice d’autres puissantes nations, et ce qui est pire, avec la collaboration honteuse de gouvernements latino-américains, est aujourd’hui le scénario le plus dramatique de la cruauté des politique de l’empire décadent, qui combine des comportements de police du monde avec celui de juge suprême du hameau mondial.

L’OEA, de plus en plus discréditée, servile, déroule le tapis rouge à la possibilité d’une intervention militaire. La Zone de paix, décidée par la CELAC à La Havane afin de préserver la région de la violence de la guerre conventionnelle, a bien du mal à survivre grâce à la volonté de nations dignes d’Amérique latine et des Caraïbes.

Et également grâce à la résistance intelligente, héroïque et exemplaire de l’alliance civique et militaire du Venezuela, de son gouvernement et de son peuple à la guerre non conventionnelle, avec laquelle ils essaient tous les jours de nouvelles modalités pour les vaincre.

Avec un mépris absolu pour ce qui fut un jour la conquête la plus sacrée de la communauté des nations de la planète : la légalité internationale, l’actuelle administration étasunienne vit en menaçant le monde entier, y compris ses associés traditionnels et en attaquant mêmes ses serviteurs inconditionnels.

Le monde entier le sait. L’Assemblée générale des Nations Unies, dont l’empire ignore les résolutions, le reconnaît.

Nous en souffrons depuis 60 ans. Plusieurs générations de Cubaines et de Cubains, empêchés de construire une nation à la mesure de nos rêves.

Et de quel crime nous punit-on ?

Nos pères ont eu l’audace de mettre un terme à l’abus et de récupérer ce qui avait été arraché à la nation à maintes reprises pendant des siècles : en premier lieu la terre, achetée par des transnationales yankees au prix ridicule de six dollars l’hectare, au terme de la longue et cruelle guerre de 30 ans qui s’acheva sur un pacte entre l’empire florissant en gestation et la vieille métropole décadente au passage des siècles. La néocolonie remplacée par la néocolonie.

Pourquoi la réforme agraire ? Telle était la question que se sont posés les auteurs de l’Enquête sur les travailleurs agricoles cubains réalisée par l’Association catholique universitaire en 1956-1957, une étude que la Loi Helms-Burton nous oblige à dépoussiérer.

« ...dans les campagnes, et en particulier les travailleurs agricoles vivent dans des conditions de stagnation, de misère et de désespoir difficiles à croire », affirmaient les auteurs de l’étude.

L’un d’entre eux, le Dr José Ignacio Lasaga, a reconnu à l’époque que dans tous ses voyages en Europe, en Amérique et en Afrique, il avait rarement vu des paysans qui vivaient plus misérablement que le Cubain.

Inutile de dire que travailler de la terre ne signifiait pas la posséder. Lorsque l’on demandait à ces travailleurs agricoles mal nourris, analphabètes et désespérés quel était leur plus grand besoin, pratiquement tous ne demandaient rien d’autre que du travail. Ce droit ne leur était même pas garanti pendant la moitié de l’année.

Le niveau de pauvreté matérielle et sociale dans nos campagnes impressionna à ce point les enquêteurs que dans leurs conclusions ils affirmaient :

« Il est désormais temps pour notre nation de cesser d’être le fief privé de certains puissants, nous avons le ferme espoir que dans quelques années Cuba sera non pas la propriété de quelques-uns, mais la vraie Patrie de tous les Cubains... »

La Constitution de 1940, pratiquement conquise par le sang et par le feu par les révolutionnaires de l’époque, avait soulevé la question de la Réforme agraire, mais la Loi n’arriva qu’en mai 1959.

Jusqu’alors, notre terre était le fief d’entreprises étasuniennes en collusion avec des politiciens corrompus et sous la protection des forces militaires sous le commandement du dictateur Fulgencio Batista qui, en 1958, possédait des droits, à des degrés divers, sur neuf sucreries, une banque, trois compagnies aériennes, plusieurs stations de radio, une station de télévision, des journaux, magazines, une usine de matériaux de construction, une compagnie maritime, un centre touristique, diverses propriétés urbaines et rurales, etc. selon le livre Los propietarios de Cuba 1958 (Les propriétaires de Cuba 1958).

Il est affirmé dans cette enquête qu’un peu plus de 500 personnes étaient propriétaires du pays. La plupart d’entre eux ont fui au triomphe de la Révolution, en abandonnant leurs biens mal acquis et obtenus grâce à l’abus de pouvoir et d’innombrables crimes commis par des partisans et des complices du dictateur Batista.

Ce sont les propriétés de ces escrocs que la Révolution a confisquées.

Les nationalisations sont une autre histoire : un droit que le Droit international reconnaît à toutes les nations souveraines – d’où son nom –en fonction du bien public. Il s’appuie également sur une loi que garantit la Constitution de 1940 et prévoyait des indemnisations que Cuba a négociées avec d’autres gouvernements – comme sont négociées les nationalisations –, sauf avec celui des États-Unis, qui a refusé de le faire, convaincus qu’ils pourraient tout récupérer par la force en peu de temps.

La loi de Réforme agraire fut la première grande nationalisation et le plus grand acte de justice sociale exigé par le peuple. Et ce fut aussi le point de rupture, la traversée du Rubicon, comme l’a déclaré le général d’armée Raul Castro Ruz.

Ceux qui se croyaient propriétaires de Cuba, qui refusaient de la perdre, ont déclenché depuis lors cette guerre non déclarée, qui a connu de brèves pauses mais n’a pas pris fin.

Afin de confondre l’opinion publique et donner à cette confrontation une légalité qu’elle n’a pas, la Loi Helms-Burton a été élaborée ; un instrument juridique dans lequel se mêlent les prétentions impériales de domination sur nos destinées et le revanchisme nostalgique du gouvernement de Batista.

C’est de cette espèce immorale et antipatriotique qui a pillé le pays que sont issus ceux qui réclament actuellement les biens qui voilà 60 ans sont enfin passés entre les mains du peuple.

Incapables de le faire par eux-mêmes, les brigands de cette époque s’abritent aujourd’hui derrière une loi qui n’a aucun pouvoir sur Cuba, pour récupérer des biens confisqués du fait qu’ils étaient le fruit de malversations ou abandonnés par crainte de la justice populaire.

Je me permets de leur avertir que les descendants de cette cavalerie mambise et paysanne qui prit la Place en 1959 pour saluer la Révolution victorieuse ont hérité la terre et les machettes de leurs aïeux et qu’ils n’hésiteraient pas à les brandir bien affûtées contre ceux qui tenteraient de leur arracher la terre que la Révolution leur a remise (Applaudissement).

« Non, nous ne nous entendons pas » et nous ne nous entendrons jamais avec ceux qui prétendent ramener Cuba à l’état des choses qui, en 1953, a conduit le meilleur de la jeunesse cubaine à prendre d’assaut deux casernes militaires avec plus de morale que d’armes.

Le Programme de la Moncada, brillamment présenté par le jeune Fidel Castro dans son plaidoyer de défense, parle clairement des raisons qui les ont conduits à combattre ce 26 juillet :

« Le problème de la terre, le problème de l’industrialisation, le problème du logement, le problème du chômage, le problème de l’éducation et le problème de la santé du peuple, ce sont les six points concrets vers lesquels nos efforts auraient été résolument orientés, avec la conquête des libertés publiques et de la démocratie politique.

« Cette exposition peut avoir l’air froid et théorique si l’on ignore la tragédie épouvantable que vit le pays dans ces six domaines, ce à quoi s’ajoute l’oppression politique la plus humiliante. »

Seule une Révolution pouvait changer ce panorama qui, quatre ans après l’assaut, s’était tellement aggravé qu’en 1957, une organisation religieuse telle que celle que j’ai mentionnée terminait son enquête en demandant un changement radical et définitif dans le pays.

Cuba a changé, mais les prétentions de son puissant voisin de la posséder n’ont pas changé, avec la collaboration enthousiaste des faucons et des apatrides serviles du sud de la Floride.

Ils ne peuvent pas s’approprier Cuba, comme l’a averti Maceo, et ils décident de la persécuter, de la traquer, de l’asphyxier. Le siège dont souffrent toutes nos opérations commerciales et financières s’est intensifié ces dernières années et ces derniers mois pour atteindre des niveaux extraterritoriaux, illégaux et criminels.

Je vais donner un chiffre récent qui permettra au monde de juger : rien que l’année dernière, de mars 2018 à avril 2019, le blocus a entraîné des pertes de 4,343 milliards de dollars.

Je préviens que cette donnée ne reflète pas les effets causés par les dernières mesures de l’administration actuelle qui limitent les permis de voyage, interdisent l’accostage des navires de croisière et renforcent les restrictions financières, ce qui frappe directement le tourisme et les activités connexes qui profitent au secteur non étatique croissant de l’économie.

Ce sont ces restrictions et la traque financière contre Cuba qui sont les principales causes des pénuries d’aliments et de carburant et de la difficulté d’acquérir les pièces de rechange indispensables pour soutenir la vitalité du système électro-énergétique national, qui nous ont touchés ces dernières semaines et ces derniers mois et auxquelles nous faisons face avec créativité avec la ferme volonté de résister et de vaincre.

Après six décennies de harcèlement de la transaction cubaine la plus simple, les pertes accumulées atteignent à l’heure actuelle 922,63 milliards de dollars, compte tenu de la dévaluation du billet vert face à l’or.

Le siège se referme de plus en plus sur notre pays comme autour du Venezuela, du Nicaragua et de toute autre nation qui refuse d’accepter le plan impérial comme destinée.

Aujourd’hui, je dénonce face au peuple cubain et au monde que l’administration étasunienne a commencé à agir avec une plus grande agressivité pour empêcher l’arrivée de carburant à Cuba.

À travers les cruelles actions extraterritoriales de blocus, il s’agit aujourd’hui d’empêcher par tous les moyens l’arrivée dans les ports cubains des pétroliers, en menaçant brutalement les compagnies maritimes, les gouvernements des pays où ces navires sont enregistrés et les compagnies d’assurance.

Le plan génocidaire vise à nuire davantage à la qualité de vie de la population, à ses progrès et même à ses espérances, dans le but de porter préjudice à la famille cubaine dans sa vie quotidienne, dans ses besoins fondamentaux, et en même temps d’accuser le gouvernement cubain d’inefficacité. Ce qu’ils recherchent, c’est une explosion sociale.

Comme ils nous connaissent mal ! Quand finiront-ils par comprendre que l’héroïque famille cubaine est capable d’affronter et de résister avec dignité aux pires assauts et de continuer à aimer, même depuis la distance, parce que rien ni personne ne peut la diviser ? (Applaudissements).

Ils veulent nous couper l’électricité, l’eau et même l’air pour nous arracher des concessions politiques. Ils ne se cachent pas pour le faire. Ils déclarent publiquement les fonds destinés à la subversion à Cuba, ils inventent des prétextes faux et hypocrites pour nous réinscrire sur leurs listes fallacieuses et justifier l’intensification du blocus.

Au comble du cynisme, ils font appel au chantage.

Ignorant l’histoire et les principes de la politique extérieure de la Révolution cubaine, ils nous proposent de négocier une éventuelle réconciliation en échange de l’abandon de la voie choisie et défendue par notre peuple, aujourd’hui comme avant. Ils nous suggèrent de trahir les amis, de jeter à la poubelle 60 ans de dignité.

Non, messieurs les impérialistes, nous ne nous entendons pas ! (Applaudissements). Cuba, qui connaît les distances éthiques et politiques entre cette administration étasunienne et les citoyens les plus nobles de ce pays, n’a pas renoncé à sa volonté déclarée de construire une relation civilisée avec les États-Unis, mais elle doit être basée sur le respect mutuel de nos profondes différences.

Toute proposition qui s’écarterait du respect entre égaux ne nous intéresse pas !

Et quant au peuple étasunien, il est invité de façon permanente à Cuba. Nos portes sont ouvertes. Venez, regardez et connaissez la vraie réalité du pays que l’on vous interdit de visiter au nom de la liberté, un droit humain essentiel qui, selon eux, manque à Cuba et abonde là-bas.

Pour notre part, nous ne nous laisserons pas distraire par des pressions et des menaces. Nous avons trop de défis à relever et nous allons nous concentrer sur eux : en tout premier lieu, l’invulnérabilité économique et militaire du pays, l’ordonnancement juridique, la défaite de tout obstacle interne et externe qui persisterait : que ce soit le bureaucratisme, l’insensibilité ou la corruption, qui ne sauraient être acceptés dans le socialisme.

Et à l’impérialisme, « pas même un tout petit peu, ainsi », une phrase du Che et un enseignement permanent de la Révolution. (Applaudissements)

Ces messages de la Cuba aux principes politiques invariables, nous allons les apporter au Forum de Sao Paulo, qui se réunit à Caracas cette semaine, afin de renforcer l’intégration des forces de gauche et leur mobilisation face à l’offensive impériale qui a décidé de nous briser, de nous diviser et de nous opposer.

Chers compatriotes,

Ce que nous avons constaté au cours de nos tournées dans cette province et entendu dans le discours de son Premier secrétaire, Federico Hernandez, sont des résultats économiques et sociaux importants. Le territoire a mérité le siège [de cette cérémonie] pour ses progrès incontestables (Applaudissements).

Je souligne principalement les 80% d’exploitation des terres cultivables et l’impulsion donnée aux pôles de production visant l’auto-approvisionnement municipal, pour la contribution qu’ils peuvent apporter au remplacement des importations de produits tels que le riz, un aliment de base dans l’alimentation de la famille cubaine. Mais – et il y a toujours des mais –, les autorités du territoire reconnaissent que, même avec des records de production importants, ils sont loin de leurs potentialités.

Il s’agit d’une réalité commune à l’ensemble du pays, où la bataille pour le développement est une course d’obstacles de toutes sortes, intense et fatigante. Le premier et déterminant, le blocus des États-Unis ; le second, les pratiques incompatibles avec le socialisme, que nous avons déjà signalées dans les interventions devant les économistes, les intellectuels, les artistes et à l’Assemblée nationale.

Je ne me lasserai pas d’insister sur le devoir de penser en tant que pays, de chasser l’égoïsme, la vanité, l’apathie, le travail bâclé, le « on ne peut pas ».

Cessons de croire et d’affirmer que c’est l’autre qui a tort, sans regarder auparavant ce que chacun d’entre nous fait, crée, apporte.

Compte tenu de la situation d’attaque brutale de nos opérations financières que j’ai décrite précédemment, nous avons tous le devoir de prendre soin comme de « la prunelle de nos yeux », des investissements coûteux entrepris dans les transports, l’industrie, les communications et les travaux en cours dans d’autres secteurs.

Prétendre que la mentalité va se transformer du jour au lendemain à la vitesse maximale que peuvent atteindre nos trains, pourrait sembler utopique si nous ne croyions pas dans le peuple et dans ses réserves morales et ses aspirations à une croissance avec de la beauté.

Mais ces changements ne sortent pas d’un chapeau. Nous ne sommes pas des magiciens.

Notre Conseil de ministres ne travaille pas à partir d’illusions. Il nous revient de diriger et de bien diriger les maigres ressources disponibles pour assurer la répartition équitable et juste des biens créés.

Nous encourageons la production nationale avec efficience et compétitivité, les exportations et le remplacement des importations, l’investissement étranger, les enchaînements de production, l’utilisation de la science, de la technologie et du talent de nos universités pour innover, le gouvernement électronique et la communication comme élément fondamental dans la bataille pour désentraver et arracher un morceau, aussi grand que possible, aux problèmes que nous rencontrons chaque jour.

On constate un niveau de réponse que porte à l’enthousiasme, mais ce n’est pas suffisant. Les circonstances nous obligent aujourd’hui, comme elles nous ont toujours obligés, à imposer un rythme de progrès supérieur à nos objectifs, à exiger, à contrôler, à bannir la routine et à vérifier dans les faits si la formule que nous avons utilisée hier est efficace ou doit être renouvelée.

Nous devons sanctionner fermement et opportunément ceux qui ne comprennent pas qu’aujourd’hui défendre la Patrie passe par prendre soin et protéger ses maigres biens matériels.

Si le gouvernement consacre tous ses efforts à améliorer la vie de nos citoyens, le gouvernement et les citoyens doivent empêcher que l’on maltraite, salisse ou néglige ce qu’il a été si coûteux d’acquérir.

Confrontés au vieux dilemme d’augmenter les salaires dès maintenant ou d’attendre des résultats productifs pour soutenir ces dépenses, nous avons décidé de les augmenter. Pas du double, mais de plusieurs fois la valeur de ce même salaire.

Nous n’avons pas attendu non plus de terminer l’année pour commencer à appliquer cette mesure qui aussi populaire et dépendante aussi de ce que nous sommes tous capables de faire pour qu’elle se traduise en croissance.

Mais, pour soutenir cette mesure et toutes les mesures d’intérêt social possibles, il nous faut produire davantage et améliorer la qualité des services.

De nouvelles mesures, proposées par le peuple, devront être adoptées dans les semaines et les mois à venir.

« Nous allons pour plus ! », ce n’est pas un slogan. C’est la traduction en langage de gouvernement de la réponse politique à l’ennemi : avec ceux qui veulent voler notre terre, notre maison, nos écoles, nos hôpitaux, nos jardins d’enfants, nos usines, nos plages, nos ports et nos aéroports... On ne s’entend pas !

C’est la réalisation dans la pratique de notre volonté de ne pas nous laisser distraire par les pressions et les menaces et de résister avec créativité sans renoncer au développement.

« Les dures années imposées par le siège de l’impérialisme ne peuvent cacher des vérités comme des poings sous le manteau de l’oubli », écrivait l’intellectuelle bien-aimée Graziella Pogolotti dans son article le plus récent, dans lequel elle nous rappelle aussi que : « Parce que la lutte n’est pas terminée, c’est toujours le 26. (Applaudissements).

Oui, le 26 Juillet sera toujours une grande source d’inspiration. Et en pensant comme un pays, je veux reprendre un slogan de mes années de travail en province, lorsque nous appelions le peuple, motivés par l’importance de cette date :

Travaillons tous à faire que chaque jour du calendrier soit un 26, que chaque mois du calendrier soit un juillet, que chaque engagement soit une Moncada victorieuse !

Le monde verra ce que nous sommes capables de faire et le monde nous accompagnera dans notre résistance. Il est temps de lancer un nouvel appel urgent à sa conscience.

Nous pouvons commencer ou achever cet appel, avec quelques vers de celui qui a toujours dit Oui à la Révolution : Roberto Fernandez Retamar, essayiste et poète, immense intellectuel qui vient de nous quitter. Expliquons avec ses belles paroles ce que nous sommes et ce que nous faisons, malgré les feux et les sièges.

Dans son poème « Pour qui cela pourrait intéresser », Roberto a écrit :

Tout au long de l’Île, nous sommes moins nombreux que ceux qui chaque jour errent dans une grande ville.

Nous sommes moins : une poignée d’hommes sur un ruban de terre

Battu par la mer. Mais

Nous avons construit une joie oubliée.

C’est pour cette joie que nous continuons à construire : Nous allons pour plus ! Parce que tous, nous sommes Cuba ! Nous sommes Continuité !

La Patrie ou la mort !

Venceremos !

(Ovation).