A Cuba, deux monnaies qui n’en seront bientôt qu’une

Partager cet article facebook linkedin email

En lieu et place des excellentes brèves de notre ami Philippe Mano, qui a pris une semaine de vacances, bien méritées, nous publions cet article sur un évènement important qui ne saurait tarder...

Cuba se prépare à unifier les deux monnaies qui circulent sur l’île : le CUP, le peso cubain, et le CUC ou peso convertible.

Aucune date n’a pour l’heure été officiellement fixée, mais plusieurs signes montrent que le processus est déjà en cours

Cuba se prépare à unifier les deux monnaies qui circulent sur l’île : le CUP, le peso cubain, et le CUC ou peso convertible. Aucune date n’a pour l’heure été officiellement fixée, mais plusieurs signes montrent que le processus est déjà en cours. 

L’idée est de conserver le CUP (24 unités pour un dollar) au détriment du CUC (équivalent à un dollar). Mais subsiste une difficulté : la suppression du taux de change préférentiel dont bénéficient les entreprises publiques (1 CUP pour un dollar), qui représentent 85% de l’économie.

’Il n’y a pas de course contre la montre’, a déclaré à l’AFP le ministre de l’Economie, Alejandro Gil. Plusieurs éléments montrent cependant que le processus est d’ores et déjà engagé : 

1. Le retour du dollar

Le dollar n’était plus en circulation depuis 2004 à Cuba et le CUC s’échangeait contre les devises qu’amènent les touristes dans des bureaux de change officiels.

Mais depuis le 28 octobre, les Cubains peuvent avoir des comptes nationaux en dollars pour acheter notamment des appareils ménagers, à des prix compétitifs, dans des magasins d’Etat.

Il s’agit pour l’Etat cubain d’obtenir des devises, indispensables pour sesopérations financières internationales, rendues toujours plus compliquées en raison de l’embargo des Etats-Unis, en vigueur depuis 1962. 

2. Finis les CUC dans les duty free

Le gouvernement a interdit aux voyageurs l’entrée et la sortie de CUC. Au duty free de l’aéroport international de La Havane, seuls les CUP et les devises étrangères sont acceptés.

’C’est pour ne pas alimenter un marché des changes de CUC à l’extérieur de Cuba’, explique l’économiste cubain Pavel Vidal, de l’Université Javeriana de Colombie.

3. Augmentation de salaires et rendu de monnaie en CUP

En juillet, le salaire moyen des employés d’Etat est passé de 667 à 1.067 CUP dans les entreprises et services non productifs.

A La Havane, quelques supermarchés qui acceptent les CUC et les CUP ont commencé en décembre à ne rendre la monnaie qu’en CUP. 

’Il a été décidé de lancer l’expérience, parmi les mesures de mise en ordre monétaire que mène le pays’, a indiqué le quotidien d’Etat Granma.

4. Payer en dollars

’Merci de noter que désormais nous acceptons également les paiements en monnaie étrangère’, a indiqué dans son dernier bulletin d’information hebdomadaire unétablissement scolaire international de La Havane. 

Plusieurs entreprises privées de vente de denrées alimentaires ou d’importation de produits se font d’ores et déjà payer en dollars ou en euros. 

Face à la demande de devises, sur le marché parallèle, 1,14 CUC s’échange contre un dollar, contre 0,97 pour un dollar il y a encore quelques mois. 

’La reconnaissance de la dévaluation du CUC a commencé avec l’approbation d’achats en monnaie convertible (...) pour éviter la fuite de dollars à l’extérieur. Pour cela, les gens changent les CUC contre des monnaies convertibles’, souligne l’économiste cubain Omar Everleny Pérez.

5. En suspens : le taux préférentiel

La plus grande difficulté de cette unification monétaire devrait être l’élimination du taux de change préférentiel dont bénéficient les entreprises publiques cubaines, soit un CUP pour un dollar (et non 24 CUP contre un dollar comme sur le marché des changes).

Ce taux préférentiel permet au secteur économique d’Etat de payer des services et d’importer de façon subventionnée, mais cela provoque des distorsions dans l’économie.

En cas de suppression, les importations vont coûter plus cher et l’augmentation des prix va se répercuter sur les consommateurs, alors que Cuba importe la majorité des denrées alimentaires.

’Eliminer la dualité monétaire ne résout pas le problème, si cela ne s’accompagne pas d’une dévaluation du taux de change avec lequel fonctionnent les entreprises du pays (...) et d’une réforme productive pour éviter une crise inflationniste, en raison de l’augmentation des prix et du manque de certains produits’, estime M. Everleny Pérez.