Cuba lutte contre le virus en pleine chute libre de son économie

Abel Gilbert Buenos Aires - mardi 05/05/2020 - 17:09

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Malgré la précarité, les autorités ont contrôlé la propagation du covid-19
Le gouvernement s’attend à une forte baisse du PIB en raison de la forte baisse du tourisme et des envois de fonds de l’étranger

DPA / GUILLERMO NOVA
"Il n’est pas possible de prédire avec précision l’ampleur de ses conséquences", a reconnu le président de Cuba, Miguel Díaz Canel , lors d’une conférence virtuelle du Mouvement des pays non alignés (MNA). Et bien qu’il ait parlé de « l’ impact dévastateur » du covid-19 « dans un monde de plus en plus interconnecté », ses mots ne peuvent manquer d’être vus à travers une clé interne en raison de la réalité matérielle et sanitaire de l’île elle-même.
Les trois premiers cas positifs ont été connus le 11 mars. Depuis lors, 69 personnes sont décédées des suites du coronavirus à Cuba et près de 1 700 infections ont été signalées. Le ministère de la Santé effectue chaque jour 800 tests pour détecter le virus. Environ 10 000 habitants sont isolés jusqu’à vérification de leur infection ou non.
Des milliers de touristes bloqués dans l’île observent une quarantaine rigoureuse dans les hôtels internationaux.
Le gouvernement surveille la situation épidémiologique " maison par maison ".
Les téléphones portables sont devenus un appareil de plus pour suivre la pandémie. Des brigades d’étudiants en médecine parcourent les rues des principales villes afin de détecter d’éventuelles infections.

Centres universitaires

Les centres de santé se sont adaptés pour recevoir des milliers de patients si nécessaire. Des hôpitaux de campagne ont été installés dans les écoles et les centres universitaires. Considérant que 110 000 foyers seulement disposent d’un service Internet, la télévision propose des tâches éducatives virtuelles.
L’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) estime qu’en vertu des stratégies conçues par les autorités sanitaires, Cuba est dans un scénario favorable pour faire face à une éventuelle courbe de contagion.
Chaque fois qu’un cas positif est confirmé, les médecins recourent à l’antirétroviral Kaletra, la chloriquine, et en particulier l’interféron Alfa 2b. C’est un antiviral de production local et coproduit avec la Chine.
Bien que le ministère de la Santé ait signalé que le traitement avec ce médicament a donné des résultats positifs, l’OMS a souligné qu’ à l’heure actuelle" aucun médicament particulier n’est recommandé pour prévenir ou traiter l’infection.
Sous les efforts que déploie l’État pour contrôler la propagation du Covid-19 apparaît une anxiété sous-jacente.
La pandémie représente un coup supplémentaire et brutal pour l’économie d’une île déjà exposée aux sanctions économiques du gouvernement de Donald Trump et à sa propre crise structurelle.

Bien que la Commission économique pour l’Amérique latine (CEPALC) ait estimé la baisse du PIB en 2020 à 3,7% , il n’est pas exclu que l’effondrement atteigne 5%.
À Cuba, 70% de la population travaille pour l’État et 600 000 personnes exercent une activité indépendante.
L’économie est principalement soutenue par deux secteurs, le tourisme et l’utilisation des envois de fonds sur le marché intérieur, la monnaie étrangère qui entre dans le pays venant des Cubains vivant à l’étranger. En raison de la fermeture des aéroports, le tourisme, qui a généré 3,7 milliards de dollars en 2018, est paralysé.

Envoi de devises

La question des envois de fonds a une gravité analogue : Havana Consulting Group, basé à Miami, la ville d’où proviennent 87% des transferts d’argent, calcule que, sur les 3 700 millions de dollars, seuls arriveront au mieux 2 500 millions . L’une des raisons de cette baisse est due au fait que 50% de la « fula » , (nom de la monnaie américaine sur l’île), arrive à Cuba par des voies informelles et par des voyageurs.
La pénurie de devises a déjà un impact sur les importations alimentaires.
Le conseil des ministres a averti ce lundi que des temps très difficiles arrivent. La possibilité de revivre les épreuves causées par la chute de l’ Union soviétique dans les années 1990 hérisse la peau des Cubains [1].

[1(ndt appelée période spéciale)