Lise London est morte !

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Décédée samedi 30 mars, Lise London a vécu dans sa chair la tragédie des purges staliniennes. Yves Montand a incarné à l’écran son mari Artur dans « L’Aveu ».

Restée communiste jusqu’à la fin de sa vie, Lise London l’avait annoncé aux procureurs de Prague : « J’étais, je suis et je resterai communiste, avec ou sans carte du Parti ». Elle fut une femme libre, de convictions, dans un PCF qui connut des pages douloureuses dans son histoire moderne, trop longtemps proche de l’orthodoxie de Moscou

Lise London est morte

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Posté par Michel Porcheron

L’ancienne résistante communiste Lise London, un des derniers acteurs des Brigades Internationales durant la Guerre d’Espagne, veuve d’Artur London, dont le procès stalinien en Tchécoslovaquie a été rendu célèbre par le film « L’Aveu », est décédée samedi à Paris à l’âge de 96 ans.

Militante jusqu’au bout, Lise London, est restée adhérente au Parti communiste français, en dénonçant « le dévoiement du socialisme par Staline »

Ses obsèques auront lieu jeudi 5 avril à 10h30 au cimetière parisien d’Ivry.

Née en 1916 à Montceau-les-Mines, de parents espagnols, engagée très tôt au PCF, Elisabeth Ricol, sténodactylographe aux Usines Berliet de Venissieux, rencontre à Moscou en 1935 le communiste tchèque Artur London, qu’elle épouse avant de s’engager dans la guerre civile espagnole.

A son retour en France, à l’été 36, elle travaille comme secrétaire auprès du responsable de la MOI (Main-d’œuvre immigrée) et prend part à la mise en place des Brigades Internationales avec les Républicains espagnols, à Paris, puis à Albacete (Espagne).

Rejointe par son époux à Paris en février 1939, Lise London, mère d’une petite Françoise née en février 1938, s’engage rapidement dans la Résistance, sous les ordres d’Henry Rol-Tanguy, devenant capitaine des Francs-Tireurs et Partisans (FTP).

Arrêtée en 1942 par la police française, elle est jugée en 1943 par le tribunal d’Etat français, qui requiert sa condamnation à mort. Sa peine sera commuée en travaux forcés à perpétuité. Son deuxième enfant, Gérard, nait en avril 1943 à la prison La Petite Roquette à Paris. Livrée aux Allemands, Lise London sera déportée en juin 1944 à Ravensbrück. Son père, son frère ont eux aussi été emprisonnés. Artur London fut lui aussi déporté.

Après la guerre, elle s’installe en Tchécoslovaquie où son mari devient vice-ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement communiste installé par l’URSS. Mais dans le cadre des purges staliniennes, Artur London tombe en disgrâce et est arrêté en 1951
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C’est durant ses années de prison, qu’il écrit en français les textes qui serviront de canevas à « L’Aveu » et qu’il transmet clandestinement à sa femme, glissés dans des paquets de papier à cigarettes. Dans ces documents, destinés, non à être publiés, mais à informer le Parti communiste français, London décrit les interrogatoires, tortures et procès infligés par le régime stalinien afin de lui extorquer des "aveux".

Artur London, finalement libéré et réhabilité en 1956, gagne la France avec sa femme en 1963.Le livre « L’Aveu », publié en 1968 chez Gallimard, au moment du « Printemps de Prague » écrasé par les chars soviétiques, sera porté deux ans plus tard à l’écran par Constantin Costa-Gavras, avec Yves Montand dans le rôle d’Artur et Simone Signoret dans celui de Lise.

Lise London, mère d’un troisième enfant, et dont le mari est mort en 1986, livre les moments forts de sa vie et de l’histoire en publiant notamment "La mégère de la rue Daguerre" (Seuil 1995) et "Le Printemps des camarades" (Seuil 1996).

La polémique autour de la publication du livre de Karel Bartosek "Les aveux des archives" (Le Seuil, novembre 1996), où l’historien tchèque accuse London d’avoir été lui-même une sorte de commissaire rouge avant d’être victime à son tour du régime, est à l’origine de la publication des pages rédigées par London en prison. Car Lise London, pour faire taire une "campagne pleine d’ignominies", contre-attaque en les dévoilant au public ("Aux sources de l’Aveu" Gallimard, avril 1997).

Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, a rendu hommage dans un communiqué à l"engagement communiste," ainsi qu’à "sa résistance à la folie stalinienne".

Saluant « une femme exceptionnelle », Pierre Laurent, secrétaire national du PCF a repris les mots de Lise London pour lui rendre hommage : « Ouvrez grands les yeux, ne vous laissez pas enfermer dans les certitudes, n’hésitez pas à douter, battez-vous contre les injustices, Ne laissez pas la perversion salir les idéaux communistes. Soyez vous-mêmes », dira notre camarade Lise London à ceux qui l’interrogeaient encore sur son engagement communiste présent ».

Elle a été Présidente d’honneur des « Amis des Combattants en Espagne républicaine », l’ACER qui dans une déclaration publiée le samedi 31 mars 2012, souligne que « dans sa façon de parler de l’Espagne républicaine, de son travail pour les Brigades Internationales, nous ressentions passer jusqu’à nous ce grand souffle de l’Histoire qui avait emporté tant d’hommes et de femmes sur la terre d’Espagne.

Elle restait un des derniers acteurs de cette histoire, et jusqu’au bout elle a témoigné pour que l’on n’oublie pas, qu’on ne dénature pas ce magnifique élan de fraternité internationale que furent les Brigades Internationales, pour toujours associées au souvenir de son mari ».

On peut lire :
http://www.humanite.fr/m/article/0/493602 (Où on peut voir une vidéo : Lise London parle de son engagement lors de la guerre civile espagnole)
Lise London, combattante depuis son enfance : http://www.humanite.fr/m/article/0/493604
http://www.pcf.fr/21857
(mp)