MAI 2008 riche mission santé de CUBA COOP !

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La santé à Cuba, c’est tout un programme !
Depuis bientôt 10 ans, notre ami Roger PELLOUX, kiné de profession, et amoureux de Cuba, de son peuple, et de ses réalisations, anime des actions de coopération qu’il réalise avec l’aide de plusieurs autres professionnels de diverses disciplines. Missions à Cuba, échanges avec les spécialistes cubains, accueil dans les structures de santé en France...

Deux fois par an, les animateurs du secteur santé de l’association se rendent en mission à Cuba. C’est le compte rendu de celle qui vient d’avoir lieu en mai dernier.
Au delà du compte rendu, c’est plus un récit et la narration des différentes rencontres qu’ont eues Roger PELLOUX, Richard DESCROIX et Daniel ROUVIERE...

Au retour de la « Mission Santé du 1er Mai » à Cuba

Par Roger Pelloux, Richard Descroix et Daniel Rouvière

Place José Marti, la tribune a rajeuni. Dans le rang des officiels, les visages de ministres quadragénaires dominent. Tout semble différent, ce 1er mai 2008 à La Havane, c’est l’évidence depuis dix années de nos séjours réguliers à Cuba. Fidel est absent, Raoul ne tient aucun discours marathon, Ricardo Alarcon non plus ; par contre, le président du Syndicat des travailleurs parle dix minutes, guère plus. A La Havane, le 1er mai est redevenu la Fête du travail. Peu de slogans rabâchés, mais pendant deux heures le défilé. Une fois écoulé, à la fin, une banderole optimiste : « Un autre monde est possible ! » C’en est fini du défilé par corporations, par catégories tirées au cordeau, mais des centaines de milliers de Cubains dans un désordre joyeux… Avec les Amis de Cuba du Havre, du Portugal, de Chine, dans notre coin de tribune, c’est la stupéfaction : au loin, dans la chaleur vibrante, au travers des bosquets, quatre bannières américaines, immenses, avancent. C’est une délégation des étudiants américains pauvres, qui poursuivent leurs études de médecine gratuites à Cuba. L’internationalisme demeure.

Autour d’un café noir, trois médecins de La Havane nous racontent comment l’épidémie de dengue qui ravage l’Amérique latine, qui tue, ainsi le chikungugna dans l’Océan indien, à l’île de la Réunion, est en passe d’être éradiquée à Cuba. Un maillage populaire est constitué à partir des écoles, où les enseignants éduquent les élèves, à l’étonnement des experts de l’OMS. Grâce aux gosses, grâce aux familles, des mesures d’hygiène publique, de prophylaxie, se répandent dans le pays tout entier. Quand on se balade dans la vieille Havane, on se retrouve parfois dans des nuages de fumigation destinés à éliminer les larves des moustiques nichées dans les poutres multiséculaires qui descendent des échafaudages au bout de leurs filins. A la campagne, les mares, les écoulements sont partout asséchés et traités.

L’orphelinat de la Lisa, à taille humaine, (la ville est jumelé avec Ivry-sur-Seine), est constitué de petits pavillons de bois tropicaux coquets, mais il reste un gros travail pour rénover le système d’alimentation de la piscine et la réparation des conduites. Allez Ivry !
A Vinales, notre mission remet au service des urgences de la polyclinique des kits de pansements stériles et des kits de transfusion, qui manquent toujours.

A Cienfuego, nos traductrices, des étudiantes haïtiennes à La Havane, nous accompagnent sous l’immense tribune du stadium de base-ball, où un centre de santé est géré par nos confrères kinésithérapeutes. Ils travaillent sur les maux provoqués par le stress, car à Cuba comme ailleurs c’est la maladie du siècle. Les appareils curatifs à ultrason sont en panne, notre mission se mettra en chasse en France, mais nos collègues cubains, qui connaissent l’effet placebo des machines inopérantes, les utilisent tout de même…
Le Centre national de prévention des MST et du Sida poursuit un impressionnant travail au Palais de la Santé. On ne le sait pas, mais dans les années 80, près de vingt mille soldats cubains sont revenus séropositifs d’Afrique centrale. Alors, démentant les idées reçues en Europe, hommes et femmes homosexuels assument eux-mêmes l’action contre l’épidémie. Dans les rues, partout, des distributeurs de préservatifs Vigor, un service ininterrompu, « LineAyuda 830 31 56 », répond au téléphone, conseille, calme les inquiétudes et informe les patients séropositifs.

Au cours des trois dernières années, les équipements de santé, les centres hospitaliers ont été rénovés. Ainsi la capitale dispose de nombreux établissements hospitaliers, le Centre William Soller, animé par la pédiatre Aleida Guevara, sa directrice, à qui nous remettons une scie à plâtre. Le plus ancien hôpital de Cuba, Galixto Garcia, rénové peu à peu, car, à la demande de Fidel, n’a jamais été fermé pour cause de travaux. Dans cet hôpital des pauvres, nous rencontrons le docteur Alexis Alonso Rodriguez, directeur du service de psychiatrie, qui nous présente à la directrice de l’université. Avec elle, nous envisageons le stage prochain de deux infirmières drômoises d’une école de la Croix-Rouge de Valence. Nous remettons à nos collègues la deuxième scie à plâtre que notre mission a rapportée de France. La pénurie se niche parfois dans d’anodins détails : ainsi, depuis des dizaines d’années, nos collègues utilisaient des tournevis aiguisés pour ébrécher et ouvrir les plâtres. Autre manque pour la fine chirurgie des petits os de la main et du pied, la mission procurera à nos amis un engin à pile, dont l’encoche permet de traiter en dix minutes les traumas, en s’épargnant l’ancienne méthode qui nécessitait deux heures d’intervention à l’aide d’un maillet et d’un ciseau d’acier… Un soir, à une réunion des cardiologues France-Cuba avec des amis médecins venus en stage à Paris et à Lyon, l’idée vient de créer par spécialités, chirurgien, obstétricien, que sais-je encore, des associations professionnelles Cuba-France plus unies, plus efficaces encore.

La Havane paraît tranquille, apaisée. La récente réforme de l’agriculture, la mise de lopins à disposition des Cubains, le commerce libéré des contraintes ont transformé l’atmosphère des rues des villes et des villages : chaque jour désormais, se tiennent partout de petits marchés de fruits et de légumes, de viandes et de volailles. Après des années de travaux, les façades du Malecon ont retrouvé leurs couleurs vives, dans la vieille Havane les échafaudages des entreprises chinoises font peur tant leur équilibre est précaire. Le soir, Le Bolero de Ravel dirigé par le chorégraphe Eduardo Veitia est apprécié au Gran Teatro de La Havane, parfaitement réhabilité, il fête son cent-soixante-dixième anniversaire…

Au large de la Marina Hemingway, les bateaux de pêche au gros rentrent au port, tandis que des navires de plaisance du monde entier sont au mouillage, les bungalows populaires, restaurés à leur tour, bruissent de vie. Cuba a changé. Pour l’heure, la rue espère : Barak Obama, possible président des Etats-Unis, signifierait qu’une nouvelle génération des Amériques serait à l’œuvre.
Cuba était dans l’attente, son peuple bouge, il avance, enfin !

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