Présence FRANCO-BELGE dans la vieille Havane

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QUATRE GUIDES POUR
CENT PAIRES D’YEUX ET D’OREILLES
A LA DECOUVERTE DE LA VIEILLE HAVANE !

Comme d’habitude depuis huit ans, le Bureau de l’Historien de la Ville de La Havane organise un programme de visites connu comme Rutas y Andares à l’intention des familles cubaines pendant l’été. Pour 5 pesos (moins de 20 centimes d’euro) des familles complètes, jusqu’à trois adultes et trois enfants, ont eu accès à un éventail très large de propositions culturelles.
La Maison Victor Hugo a participé l’année dernière pour la première fois, avec trois promenades sur la présence française au centre de la Vieille Havane.

TROIS DES QUATRE GUIDES...

Cette fois, nous nous sommes alliés à la Vitrine de Wallonie pour un Andar sur la présence franco-belge dans la zone.
13 août 2008. La chaleur et les jeux olympiques semblaient jouer un mauvais tour à notre Andar. Pourtant, plus d’une centaine de personnes se sont donnés rendez-vous, ponctuels, à l’entrée du Musée de la Ville. Nous avons dû nous « diviser pour mieux régner ». Un groupe est parti avec moi et Irina, un deuxième avec Alain et Iradia.

FRANCE, BLEGIQUE, ESPAGNE
Ce qu’elles ont de commun avec CUBA !

La France, la Belgique et l’Espagne ont, par moments, eu une histoire commune et cela a son reflet à Cuba. Il suffit de rappeler que Flandres fit partie de l’Empire Espagnol pendant plus de deux cents ans entre fin du XV siècle et début du XVIII siècle et que l’Espagne fut « française » pendant un peu plus d’un siècle sous la dynastie des Bourbons jusqu’à la chute de l’empire de Napoléon à 15 km au sud de Bruxelles : à Waterloo.
On commence par le Palais des Capitaines Généraux où les français et les belges se serrent la main au salon du café. L’existence même de ce type de salle est l’apport des français. Sur un des murs, un paysage peint par un belge né à Watou, Henri Cleenewerck.
A peine sortant du Palais, sur la rue Obispo, nos pieds marchent sur des pavés belges introduits lors de l’intervention américaine en 1898.
Le Musée de l’orfèvrerie à côté est un deuxième exemple de présence franco-belge. Un des premiers orfèvres au XVIème siècle fut le flamand Don Diego de Lara ; les techniques de galvanoplastie ont été développées par deux français : Christofle et Bouilhet ; la congrégation de bijoutiers de La Havane porte le nom du saint patron des orfèvres né à Limoges, Saint-Eloi. Enfin, nombreuses ont été les bijouteries françaises telles Le Trianon, Le Palais Royal ou La Rivière.
Mais en plus de bijouteries, il y avait des horlogeries, des parfumeries, des tailleurs et des magasins de mode, entre autres, et le cuisinier français était de rigueur chez les familles aisées, d’après la Comtesse de Merlin.

L’AXE CENTRAL DU PARCOURS…

L’axe principal de notre parcours est la rue Mercaderes. À ses extrêmes : la rue O’Reilly où les belges ont été bien présents, et la rue Teniente Rey, animée par les français. D’un côté des portes art nouveau ; tout de suite après, la salle qui rend hommage aux Frères Louis et Auguste Lumière, inventeurs du cinématographe, la première projection de cinéma, il faut le dire, eut lieu pas très loin d’ici en 1897, juste deux ans après avoir été créé.

La Maison de l’Obrapía garde la VW de Carpentier qui a roulé à Paris pendant les années soixante. Ici Humberto Solás a tourné sa version cinématographique du roman de Carpentier qui mieux retrace l’influence de la Révolution Française dans la formation de la nation cubaine : Le siècle des Lumières.
À la parfumerie Havane 1791, où se trouve aussi un musée, on rappelle combien on doit à la parfumerie européenne, mais surtout à la française. Parmi les principales maisons parisiennes établies à La Havane au XIX siècle se détachent Guerlain et Molinard. Le savon de Marseille vend ce précieux produit élaboré selon des recettes de fabrication ancestrale dont le secret se transmet de génération en génération.
En passant à côté de l’Arméria, on ne peut pas oublier l’explosion du bateau français La Coubre. Chargé d’explosifs provenant du port d’Ambères, ce bateau a été la cible d’un sabotage qui a fait plus de trois cents victimes en mars 1960.
La Maison de la Croix Verte, ainsi appelée à cause d’une des croix qui marquaient le via crucis le long de la rue Amargura, est actuellement le Musée du chocolat. Cette croix, par ailleurs, rappelle la Croix de Lorraine.

LE CHOCOLAT ET LE CAFE !
Ce sont les immigrants français qui ont introduit les techniques de culture et de fabrication du cacao à partir, surtout, de la Révolution Haïtienne, mais c’est le Musée du Chocolat de la Place Royale de Bruxelles qui a apporté l’aide financière pour la restauration de cette maison et a donné aussi son savoir faire dans le domaine du chocolat.
L’habitude tellement cubaine du café -qui a remplacé celle du chocolat à l’espagnole- est aussi l’héritage des français. A l’angle de Mercaderes et Teniente Rey, la premier Café de La Havane, ouvert par un français : Jean-Baptiste Tabern en 1770 ou 1772.
Personne n’appelle cette rue par son vrai nom, -Brasil depuis 1927- mais par Teniente Rey, le nom d’un fils de français : Félix du Roi, qui fut Lieutenant du Gouverneur. La liste des français qui peuplèrent cette rue serait trop longue, il suffit de citer, entre autres, un consul, une banque, un hôtel, une lithographie, une horlogerie, deux bourrelleries, une liquoristerie et un magasin de chapeaux. Paradoxalement, c’est un architecte français, N. Forestier, qui a failli faire table rase de la rue Teniente Rey dans les années 20 du XX siècle pour élargir la vue et la voie face au Capitole qui venait de s’élever à l’extrême opposé.
Au début même de la rue, au Couvent de Saint François d’Assis, un ex-vicaire de Paris a donné des cours de français à partir de 1838. Là où se trouve l’Hostal Los Frailes, vit le Marquis Pierre-Claude Duquesne, capitaine de navire de l’Armée française, passé au service de la couronne espagnole en 1793, fut Directeur de L’Arsenal de La Havane et l’amphitryon principal des trois princes français qui ont marché sur ces rues bien avant nous en 1798, dont le Duc d’Orléans, futur roi Louis-Philippe I.

Au milieu de la Plaza Vieja, règne une fontaine réalisé en Italie d’après le modèle d’une gravure d’Hyppolite Garneray, artiste français qui a travaillé dans l’atelier d’un autre français, S. Lessieur, qui a introduit la lithographie à Cuba en 1822 à deux pas d’ici. On ne peut pas oublier d’ailleurs, que la mémoire graphique de la ville de La Havane existe grâce au talent des artistes comme Garneray, Mialhe, Laplante et Vermay, entre autres.
La maison où se trouve le restaurant Santo Angel était autrefois la résidence de Pierre Roustan d’Estrade, dont une fille a épousé le Marquis Duquesne et une autre le colonel Antoine Raffelin, de Paris. Le fils de celui-ci a été un compositeur important de musique religieuse et directeur de la Société Philharmonique de La Havane qui eut son siège à côté, dans cette maison jaune qui est aujourd’hui le Centre des Arts Visuels.
Et puisqu’on arrive « au Royaume de Belgique », force est de donner au roi ce qui est au roi. La première œuvre d’imprimerie à Cuba, en 1720, est due à un belge : Charles Habré, qui avait son atelier près de l’Eglise del Espíritu Santo, et le Centre Gallego, ainsi que le Palais Présidentiel furent l’œuvre d’un architecte belge : Jean-Paul Beleau.
Notre Andar finit à la Vitrine de Wallonie qui occupe le rez-de-chaussée d’une immense demeure restaurée en 2006 grâce à la contribution financière de cette région francophone du sud de la Belgique, l’ancienne Casa del Conde de Cañongo, située à San Ignacio Nº 358, entre Muralla et Teniente Rey, Plaza Vieja. Ce centre développe un projet culturel principalement adressé aux enfants et aux adolescents centré, au départ, dans le domaine des bandes dessinés si cher aux belges, mais qui de plus en plus s’élargit sur d’autres champs, tel le guignol et le cinéma.

Résumé rédigé par Ana Maria REYES et mis en ligne par Roger GREVOUL

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