La Pharmacie Française de Matanzas, unique au monde

Partager cet article facebook linkedin email

Dans le Patrimoine mondial de l’humanité

{{}}

Auteur : Yairis Hernández Rodríguez | Source : www.cubadebate.cu

Unique en son genre dans le monde, la Pharmacie Française du Dr. Triolet, aujourd´hui Musée Pharmaceutique, est conservée comme l´un des plus précieuses joyaux des habitants de Matanzas.

Patrimoine cubain depuis 2007, Prix National de Conservation l´année suivante et proposée pour être déclarée Patrimoine Mondial de l’Humanité par l´Organisation des Nations Unies pour l´Éducation, la Science et la Culture (UNESCO), la Pharmacie Française du Dr Ernesto Triolet est comme l´un de ces espaces magiques qui marquent les personnes pour toute la vie.

C´est l´impression que j´ai eu quand j´ai parlé avec Marcia Brito Hernández, sa directrice ; une femme simple et rieuse qui, depuis plus de 30 ans, a pris la responsabilité de sauvegarder les pièces exceptionnelles de cette pharmacie.

Chacune de ses réponses sont précédées de soupires et, plus que ses mots, je parviens à noter dans nom carnet toute l’information contenue dans l´étincelle dans ses yeux, l´enthousiasme de son récit et l´amour qui inonde le deuxième étage d´une petite pièce confortable.

« Nous sommes dans l’unique pharmacie française qui est conservée complète dans le monde », ainsi a commencé une conversation qui aurait durée des milliers d´heures, si j’avais eu le temps.

« Toutes les collections sont originales et elles ont été acquises par les propriétaires. Les médicaments qui figurent dans la collection ont été élaborés ici (...) Avant il y avait deux lignes de commercialisation : les produits importés des laboratoires de France, d’Allemagne, d’Espagne et des États-Unis, pour citer certains pays, et qui sont des pièces très spéciales ayant une grande valeur ; et les médicaments qui étaient préparés dans cet endroit et qui ont été enregistrés dans les livres de recettes.

Ces documents sont considérables, parce qu’ils nous indiquent, d’après leur date, le nombre d´ordonnances qui ont été apportées et quels étaient les médecins qui les prescrivaient, ce sont des livres très importants (...) En plus de la pertinence de ses instruments, entièrement artisanaux, antérieur au XXe siècle et qui ont été utilisés jusqu´au 16 janvier 1964 », explique Marcia Brito en se référant aux valeurs qui distinguent l´endroit.

Un peu d´histoire

La pharmacie a été fondée le 1er janvier 1882, sur l´ancienne Plaza de Armas de la ville de Matanzas, par les docteurs en pharmacie Juan Fermin Figueroa et Ernesto Triolet Teliebre, des amis qui sont devenus des parents après que Maria Justa de Figueroa, la sœur du premier, se soit mariée avec le Dr Ernesto Triolet.

À la mort prématurée de Justa, Ernesto Triolet s’est marié avec la fille de Juan Fermin Figueroa, Doña María de los Dolores, la première femme cubaine qui a reçu le titre de docteur en pharmacie, en 1886, et avec qui il a fondé une famille d´artistes et de scientifiques.

Au cours des années ils ont préparé plus de 150 formules, parmi lesquelles on souligne les sirops, les teintures, les pommades, les essences, les élixirs, les onguents ou les pilules.

Le lieu emblématique, exposant de l´architecture résidentielle néoclassique de la fin du XIXe siècle, a été nationalisé le 23 novembre 1963 et la pharmacie a continué ses travaux, jusqu´à sa fermeture en janvier 1964. Le 1er mai de la même année elle a rouvert, cette fois comme un musée. Lors des dix premières années il a été dirigé par le plus jeune fils du mariage d’Ernesto Triolet Figueroa.

« Toute l´humanité est en dette avec les membres de la famille Triolet Figueroa car ils ont tout laissé dans la pharmacie. Le négoce a été nationalisé mais les biens étaient la propriété des propriétaires ; grâce à Julio Le Riverand et un autre groupe de personnes, on a obtenu que la Pharmacie ne passe pas au Ministère de la Santé Publique, mais au Patrimoine et c’est alors que l’on a décidé de la convertir en le premier Musée Pharmaceutique d´Amérique Latine », a déclaré Marcia.

Aujourd’hui

À ce jour, le Musée compte plus d’un million de visites. En 2011, il a été visité par 47 627 personnes et en 2012 on devrait dépasser le chiffre de 47 800.

Parmi les salles de la pharmacie se trouve celle dédiée à la fille du fondateur, Celia Triolet, une artiste liée aux arts plastique qui s’est consacrée à la conception de vitraux. Aujourd´hui, les mêmes artisans qui ont restauré les vitraux de la maison, exposent et commercialisent, en exclusivité, leurs pièces dans cet endroit.

La collection compte plus de 5 millions de pièces, depuis les étiquettes, les instruments et les médicaments jusqu´aux livres de formules.

Le centre maintient un lien étroit avec la communauté. À maintes reprises ses salles se sont converties en siège de concerts de musique de chambre ou de petit format ; de réunion de jeunes troubadours ou de cercles littéraires.

L’entrevue

J´ai rencontré Marcia deux semaines avant l´entrevue, lors d´une réunion dans laquelle nous avons été présentées. J´avoue que mon intérêt était surtout de connaître le Musée car je ne l´avais jamais visité, même si je passe en face presque tous les jours, et j´ai utilisé l´excuse d’un reportage comme prétexte.

Nous avons parlé plusieurs fois par téléphone pour planifier la réunion, mais elle était toujours occupée lorsque j´avais du temps libre. Il y avait des moments où j´avais de la peine de l´appeler, je craignais être trop insistant, mais les journalistes sont ainsi.

Toute la conversation a été enregistrée et j’étais désolée de ne pas procéder une caméra de télévision, car l´expressivité de son visage n´a pas besoin de mots. Je suis presque tombée follement amoureuse du Musée et nous avons seulement parlé pendant une heure.

Actuellement Marcia travaille sur la préparation d´un livre qui sera publié par la maison d’édition Matanzas, à l´occasion du 50e anniversaire du Musée. Cet ouvrage aborde l’histoire de la Pharmacie et de ses collections, à partir des enquêtes menées au cours de ces années.

Quel est votre plus grand plaisir ?

Mon plus grand plaisir est de faire partie d´un groupe ayant pour mission de garder chaque jour ce musée, de contribuer à maintenir cette Pharmacie comme elle était le premier jour, en 1882.

Quel principe guide les travaux de ce groupe ?

Le principe que nous défendons est celui d´offrir un service d´excellence.

Quelle formule conserve cet endroit presque intact, après tant d´années ?

L´amour, cet endroit se distingue par l’amour… il a été soigneusement préservé par de nombreuses personnes, depuis ses propriétaires jusqu´aux travailleurs actuels. C´est un site authentique, en parfait état de conservation et possédant une collection exceptionnelle.

(Source TV Yumurí)

Nous avons, il y a quelques années, après la visite de la pharmacie et la rencontre avec l’historien de la ville Raul R. Ruiz et à sa demande édité, une plaquette qui retrace la présence française dans ce port cubain : "Memoria Francesa"
RG