Blocus contre Cuba : 5 milliards de dollars de dommages en un an

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La Havane soumet une nouvelle fois à l’examen de l’Assemblée générale de l’ONU une résolution sur la nécessité de mettre fin au blocus économique, commercial et financier imposé par Washington depuis plus de soixante ans.

Un article de Luis Reygada dans quotidien l’Humanité de ce jour.
(Le logo de cet article est du dessinateur cubain FALCO.)

Cuba fait face à un blocus économique imposé par les États-Unis depuis 1962. Une sanction dévastatrice pour l’économie de l’île et une entrave aux droits du peuple cubain © AFP

Renforcé par Trump, Cuba fait face à un blocus économique imposé par les Etats-Unis depuis 1962. Une sanction dévastatrice pour l’économie de l’île et une entrave aux droits du peuple cubain, particulièrement en cette période de pandémie. © AFP
Cuba fait face à un blocus économique imposé par les États-Unis depuis 1962. Une sanction dévastatrice pour l’économie de l’île et une entrave aux droits du peuple cubain © AFP
Pour la trente et unième année consécutive, le gouvernement Cubain présente le 1er et le 2 novembre un projet de résolution à l’ONU visant à dénoncer le blocus économique, commercial et financier que lui imposent les États-Unis depuis 1962.

Le texte, soumis à l’examen de l’Assemblée générale, sera une nouvelle fois accompagné d’un rapport sur les dommages causés durant l’année écoulée sur la Grande Île. Récemment présenté par le ministère des affaires étrangères cubain, sa lecture provoque un constat sans équivoque : loin de reprendre la politique de détente amorcée par Barack Obama, l’administration du président Joe Biden semble plutôt avoir pris le relais de Donald Trump pour asphyxier Cuba.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En un an, le blocus aurait causé des dommages sur l’économie de l’île estimés par les autorités à 4,8 milliards de dollars et limité la croissance à 2 %, alors qu’elle aurait pu atteindre les 9 %. Avec « un impact négatif sur tous les secteurs de l’économie nationale » : un milliard de dollars de manque à gagner dans le tourisme, 3 milliards de préjudices pour le commerce extérieur, 467 millions de préjudices pour l’industrie, 273 pour l’agriculture, 75.5 pour l’éducation, 202 pour les transports, 89 pour le BTP… Alors que l’État cubain a misé depuis plusieurs années sur le développement des biotechnologies et l’industrie pharmaceutique – parvenant par exemple à développer trois vaccins contre la Covid-19 ou encore le seul médicament existant au monde pour traiter l’ulcère du pied diabétique – les préjudices infligés à ce secteur se chiffrent à 143 millions de dollars.

Et tandis que, comme tous les pays du Sud, Cuba a été fortement touché par la crise du Covid-19, le rapport signale un préjudice de près de 240 millions de dollars sur le secteur de la santé durant l’année écoulée. L’effet de dissuasion qu’exercent les sanctions unilatérales des États-Unis continue d’avoir un impact féroce sur ce secteur avec « des dizaines de fournisseurs de par le monde qui ont interrompu leurs relations commerciales avec Cuba, provoquant des tensions sans précédents découlant de la rupture des canaux d’approvisionnement ». Conséquences : un impact terrible sur la qualité des services médicaux prêtés à la population. Manque de médicaments, retards dans les prises en charge, longues listes d’attente pour les soins spécialisés… Ce qui se reflète dans les indicateurs nationaux, avec par exemple une hausse du taux de mortalité infantile passé de 5 décès pour mille naissances en 2019 à 7,5 aujourd’hui.

« une politique relevant du génocide »

Néanmoins, d’autres répercussions sont plus difficilement quantifiables, comme les « niveaux de désenchantement, de désespoir et d’insatisfaction de la population », ou encore « les dommages psychologiques » . « 80 % de la population actuelle n’a connu son pays que sous blocus alors que les répercussions sur la qualité de vie, sur les services publics et sur nos acquis sociaux sont incontestables » , a déclaré ce mardi l’ambassadeur de Cuba en France, Otto Vaillant Frias, lors d’une conférence de presse. « Jamais notre peuple n’avait connu des carences en matière de médicaments, d’aliments ou de carburant aussi extrêmes que ces dernières années. Ces circonstances dégradent non seulement les conditions de vie matérielles des Cubains mais blessent aussi leur dignité humaine », a-t-il dénoncé en évoquant un contexte qui pousse une quantité importante de personnes à émigrer.

« Il s’agit d’une guerre contre notre économie ; une politique relevant du génocide -tel que défini par la Convention de 1948- qui vise à utiliser tous les moyens possibles pour provoquer famine, désespoir et le renversement du gouvernement », a exprimé le diplomate, rappelant les objectifs définis dès 1960 par le sous-secrétaire d’État aux affaires inter-américaines Lester Mallory.

Entraves en matière d’exportation, d’investissement et de financement, surcoûts logistiques, manques à gagner et restrictions commerciales de tout ordre, menaces contre les potentiels partenaires économiques tiers, sanctions financières, pénuries provoquées… Sur plus de cinquante pages, le rapport du gouvernement cubain décortique les conséquences de la kyrielle de lois et règlements mis en place par Washington depuis plus de soixante ans pour mettre à genoux la révolution cubaine. Des mécanismes de pressions mortifères basées sur des leviers juridiques illégaux au regard du droit international (comme l’application extraterritoriale des lois étasuniennes) et visant des objectifs qui violent la Charte des Nations Unies. Mais si Cuba est isolée économiquement, elle est loin de l’être politiquement. L’année dernière, l’Assemblée générale de l’ONU a approuvé à l’écrasante majorité la résolution présentée par La Havane, avec 185 pays sur 193. Sans effet en raison du véto états-unien.

Luis Reygada