Café Guamuhaya

Un projet artisanal au cœur de grands enjeux économiques - Troisième partie : le projet

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Après avoir jeté un coup d’œil sur le café dans le Monde et à Cuba, nous allons découvrir le projet que mène un groupe de gens talentueux et engagés de Cienfuegos avec l’aide de Cuba Coopération France.

Le Projet de Développement Local (PDL)

La « Route du café Guamuhaya » est un Projet de Développement Local (PDL). Cette forme d’organisation a été instituée par le décret-loi n° 33 du 11 mars 2021. Ses membres animent un ancien café, le « Centro Mercantil » à Cienfuegos, où on peut, bien sûr, déguster le délicieux café de la région.
Le groupe organise des concerts de musique cubaine en fin de semaine et parfois des projections de vieux films.

Le café dans le massif de Guamuhaya

Le massif de Guamuhaya (que l’on appelle parfois à tort « Escambray ») dépend de trois provinces (Sancti Spiritu, Villa Clara et Cienfuegos). Les zones d’altitudes comprises entre 700 m et 900 m permettent la culture d’un café qui est reconnu comme le meilleur de l’île grâce au climat et à la qualité des sols.

On y cultive principalement des cafés Arabica de haute qualité gustative et en moindre quantité des cafés Robusta offrant de plus grands rendements mais de plus faible qualité.
La production s’établit à environ 600 T. La partie du massif dépendant de Cienfuegos produit environ 135 T dont une grande partie est exportés (Japon) compte tenu de la haute qualité de la production (on y trouve le fameux Crystal Moutain qui peut atteindre 11 000 $ les 1 000 kg).

Un millier de personnes sont organisées en 20 formes de production différentes (coopératives, unités de production, unités entrepreneuriales).
L’entreprise Elodio Machin qui traite le café à Cumanayagua (dépulpage, séchage, triage et mise en sac du café vert), dépasse les prévisions pour la récolte du café, pour les ventes à l’exportation (90 % de sa production) et pour la consommation nationale.

La production est principalement vendue sous forme de café vert. Cependant, une entreprise de Cienfuegos torréfie, moud et emballe dans des sachets de plastique, une partie du café produit dans la région et surtout du café importé, pour la consommation locale.

Les petits agriculteurs sont usufruitiers des terres sur lesquelles ils cultivent. Ils sont regroupés dans des coopératives qui leur achètent les cerises de café (non dépulpées) à un prix fixé en accord avec le gouvernement cubain.
Le paysan peut disposer de la récolte venant de son jardin (patio) pour la consommation personnelle de sa famille. Bien entendu, il n’a pas le droit d’alimenter le marché noir avec cette production.

Le projet

L’objectif du projet est d’améliorer les conditions de vie des populations de la zone montagneuse de Guamuhaya en soutenant la production personnelle de café des petits paysans de la région afin d’éviter les migrations vers les villes et l’étranger et contribuer ainsi à préserver la culture du café qui fait partie du patrimoine du pays.

L’idée est d’acheter, à un prix supérieur à celui fixé avec les coopératives, la production des jardins (patios) aux paysans, procéder au dépulpage et au séchage près des lieux de récolte avec du matériel mis à disposition des paysans.
Les grains partiront ensuite à Cienfuegos pour être torréfiés, moulus et emballés en paquets dans les locaux du Café Mercantil en utilisant des méthodes artisanales puis vendus au public et en gros. Les excédents réalisés seront utilisés pour étendre le projet à d’autres communautés et améliorer les conditions de vie des populations de la région.

Quand je leur ai demandé pourquoi ils ne se contentaient pas de vendre le café vert à des torréfacteurs étrangers, les membres du PDL ont répondu que cet échange correspond à une situation coloniale où l’acheteur fixe les prix grâce à ses capacités d’achat et réalise le plus gros de la marge sur le dos des producteurs. On ne pouvait qu’être d’accord !

La récupération de ce profit devra permettre d’améliorer les conditions de vie des populations de la région, en accroissant leurs revenus, en permettant des créations d’emplois, en fournissant du matériels aux paysans (vêtements de travail, machettes, matériel d’affutage, scies mécaniques collectives) ce qui leur permettra de développer la production dans les jardins mais aussi sur les terres en usufruit.

L’expérience va commencer avec la communauté de San Blas (520 habitants), où les contacts existent depuis plusieurs années et où des liens de confiance se sont tissés avec entre les producteurs et les membres du PDL.
Dès que nous aurons obtenus les financements nécessaires, nous procéderons à l’achat du matériel.

  • Une partie de celui-ci ira à San Blas pour assurer le traitement qui suit la récolte (dépulpage, lavage, séchage, déparcharge et mise en sac).
  • L’autre partie ira au Centre Mercantil à Cienfuegos pour la torréfaction, la mouture, la mise en sachet et la vente (au détail et en gros).

    Il s’agit d’un produit artisanale et biologique, dont la qualité supérieure sera contrôlée par des tests professionnels effectués tout au long de la chaîne de production, depuis le jardin, jusqu’au sachet emballé.

Une étude faite par le PDL auprès d’un échantillon de 19 producteurs estime leur capacité de vente à environ 2,3 tonnes. La région comprend 12 communautés, ce qui permet d’espérer un achat total de l’ordre de 20 à 25 tonnes dans le futur.

Ce projet, qui comprend aussi un volet touristique, peut changer la vie des 5 100 habitants (dont 500 à 600 petits producteurs) de la région en leur permettant de vivre et travailler au pays.