Cuba et l’UNESCO : 75 ans d’une relation historique.

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Nous avons le plaisir et l’honneur de publier ci-dessous une contribution de Mme Yahima Esquivel Moynelo, Ambassadrice de Cuba auprès de l’UNESCO, à l’occasion du 75e anniversaire de la relation de la République de Cuba avec cet important organisme mondial.

Merci à elle de nous rappeler les étapes de cette relation et les résultats du travail commun. Nous lui renouvelons notre reconnaissance pour nous avoir permis de célébrer à ses cotés et à ceux de Madame la Directrice Générale, la mémoire de notre cher Eusebio Leal, dans les locaux du siège national de l’Organisme.

Et grand merci à nos amies traductrices et ami traducteur .

RG

Mme Yahima Esquivel Moynelo, Ambassadrice de Cuba auprès de l’UNESCO

L’histoire des relations diplomatiques entre Cuba et l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (UNESCO) remonte aux origines de la création de l’Organisation.

La République de Cuba a officiellement rejoint l’UNESCO le 29 août 1947, formalisant ainsi la relation historique de l’Organisation avec notre pays.

Cette décision a été complétée le 17 novembre 1947, avec la création de la Commission Nationale Cubaine pour l’UNESCO (CNCU), qui aurait la charge de promouvoir la coopération entre la communauté internationale et les institutions et organismes nationaux dans tous les domaines de compétence de l’Organisation.

Un événement important dans cette phase initiale des relations entre Cuba et l’UNESCO a eu lieu en 1948, lorsque la troisième Conférence Générale de l’Organisation a adopté la première décision établissant un Bureau de l’UNESCO hors de son siège à Paris.

La Havane devait accueillir un centre régional de l’UNESCO pour l’hémisphère occidental, inauguré en 1950, qui deviendrait quelques décennies plus tard, et jusqu’à ce jour, le Bureau Régional de la Culture pour l’Amérique Latine et les Caraïbes.

Cependant, c’est la mise en œuvre du projet social cubain, après le triomphe révolutionnaire du 1er janvier 1959, qui a marqué un tournant dans l’engagement de notre pays auprès de l’UNESCO.

Cela est dû à la coïncidence des valeurs et des principes fondateurs de l’Organisation avec le vaste programme de transformations sociales, culturelles et éducatives entreprises par la révolution naissante.

Cela a été réaffirmé par le Commandant en Chef, Fidel Castro, dans son discours au Conseil Exécutif lors de sa visite à l’UNESCO en mars 1995.

"Le projet social de la Révolution Cubaine, tant dans les domaines de compétence de l’UNESCO que dans ceux de l’éducation, de la culture, de la science et de la communication, ainsi que dans les domaines de la santé, de la femme, de la jeunesse et de l’enfance, s’identifie pleinement aux idéaux constitutifs de cette Organisation et offre dans la société cubaine un terrain d’excellence pour leur réalisation ».

Dès lors, l’UNESCO est devenue un espace pour faire connaître les réalisations et les progrès de Cuba dans les domaines de l’éducation, de la culture, des sciences et de la communication.

La coopération conjointe a permis d’œuvrer à l’éradication de l’analphabétisme, de promouvoir l’éducation comme un droit humain fondamental, les sciences pour le bénéfice de l’homme, le plein accès à la culture, à la protection du patrimoine et de réduire le fossé technologique, entre autres.

Par ailleurs, l’avant-garde intellectuelle cubaine, parmi laquelle il convient de citer Juan Marinello, Alejo Carpentier, Julio de Riverand, Vicentina Nuñez Jiménez, Armando Hart, Alfredo Guevara, Miguel Barnet et Silvio Rodriguez, engagée depuis le début dans le développement de Cuba, s’est associée au travail de l’Organisation, valorisant avec son action les principes et les valeurs de l’UNESCO.
Au cours de ces années, nombreux ont été les programmes et projets ayant germé dans la chaleur des relations entre Cuba et l’UNESCO.

L’UNESCO encourage, avec Cuba, la promotion de la lecture et promeut d’autres activités d’intérêt commun Photo : Ariel Cecilio Lemus

On pourrait souligner l’accompagnement précoce de la campagne d’alphabétisation de Cuba en 1961 et la reconnaissance internationale par l’Organisation du système éducatif cubain ainsi que de l’engagement du gouvernement de l’Île à garantir une éducation publique, inclusive, gratuite et de qualité tout au long de la vie, tel que le mentionne le Rapport Mondial de Suivi de l’Education 2020. Nombreuses sont les distinctions reçues dans ce domaine, en particulier en matière d’alphabétisation, tel le prix UNESCO Rey Seijon pour la méthode cubaine d’alphabétisation « Yo Sí Puedo » (Moi, Oui, je Peux).

Dans le domaine de la culture, nous pouvons remarquer l’engagement de notre pays, avec la ratification et la mise en œuvre de toutes les conventions liées à la culture et d’autres instruments normatifs de l’UNESCO dans ce domaine, destinés à la promotion et au respect de la diversité culturelle.

Torre de Manaca-Iznaga, ubicada en el Valle de los ingenios, declarada por la Unesco, en 1988, Patrimonio de la Humanidad. Foto : Tomada de Prensa Latina

C’est ce qu’a démontré le classement de 9 sites cubains au Patrimoine de l’Humanité (plaçant Cuba en tête des pays de la Caraïbe avec le plus grand nombre de sites classés et au 5ème rang de l’Amérique Latine) et de 4 éléments déclarés Patrimoine Immatériel de l’Humanité ; et plus récemment, en 2019, La Havane et Trinidad ont été déclarées Villes Créatives de l’UNESCO.

On se doit de souligner un projet tout particulièrement symbolique pour Cuba et pour l’UNESCO : le lancement de la Campagne Internationale pour la sauvegarde de la Vieille Havane en1982.

Le Directeur Général de l’UNESCO de l’époque, Amadou M’Bow, a reçu lors d’une cérémonie Place de la Cathédrale, des mains de Dr Armando Hart Dávalos et en présence du Commandant en Chef Fidel Castro, le texte de l’accord 1494 du Comité Exécutif du Conseil des Ministres approuvant le plan d’action pour la conservation et la restauration du centre historique de la Vieille Havane et de son système de fortification.

Aujourd’hui, un nouveau projet, de grande portée également, réunit Cuba et l’UNESCO dans un nouvel objectif : le Projet Transculturel Cuba, Caraïbes et Union Européenne, qui aspire à s’ériger en un pôle régional pour la formation culturelle et qui a Cuba comme épicentre. Un projet qui cherche à renforcer les capacités chez les jeunes des Caraïbes et de l’Amérique Latine dans divers domaines, tels que la création, les industries créatives, la gestion du patrimoine, les métiers liés à la conservation et à la restauration, la photographie et l’audiovisuel, entre autres.

Dans l’orbite des sciences, Cuba a toujours maintenu une présence importante dans les organes intergouvernementaux de l’UNESCO. L’Organisme a salué la réponse solidaire et engagée de notre pays dans la lutte contre le virus Ébola en Afrique et plus récemment contre le COVID 19. Deux prix cubains font partie du système des 23 Prix Internationaux de l’UNESCO : le Prix UNESCO-Carlos J. Finlay pour la Microbiologie et le Prix International José Martí de l’UNESCO, comme partie prenante de cet engagement pour le développement et la promotion des sciences en faveur du développement.

L’engagement envers la protection et envers l’attention portée à l’environnement a également été un domaine qui a favorisé la coopération avec l’Organisation. Cuba comptabilise 6 réserves de la biosphère déclarées par l’UNESCO, qui effectuent un travail significatif et internationalement reconnu.

D’autre part, l’Organisme a servi de tribune également pour la dénonciation de l’ordre mondial injuste de l’Information et la Communication, pour la gouvernance d’Internet ou pour l’éthique et la sécurité dans le Cyberespace.

Il s’avère important d’insister sur le travail effectué pour la préservation du patrimoine documentaire grâce au Programme Mémoire du Monde, dans le Registre International duquel Cuba s’honore de posséder trois des collections inscrites comme Patrimoine Documentaire de l’Humanité, à savoir : les actualités filmées de l’ICAIC, l’œuvre de José Martí et celle d’Ernesto Che Guevara.

Cuba a pu compter sur le soutien de l’UNESCO pour faire face à l’impact du blocus économique, commercial et financier que les Etats-Unis imposent à Cuba. Ses murs ont servi de cadre à la dénonciation de cette politique inhumaine et sa contribution est venue conjointement avec sa coopération opportune et responsable dans tous ses domaines de compétence.

Le fait est que la coopération a toujours été au cœur des relations entre Cuba et l’Organisation ; sur ce point, le Commandant en Chef avait déclaré :

"Cuba apprécie les efforts déployés par l’UNESCO en faveur du développement de programmes de collaboration dans les domaines de compétence de l’Organisation. Cuba est très heureuse d’avoir historiquement maintenu une relation étroite avec l’UNESCO et se félicite d’avoir reçu le soutien de l’Organisation dans un nombre considérable de programmes de développement dans les domaines de l’éducation, de la science et de la culture. Permettez-moi d’exprimer ici la reconnaissance de Cuba pour la sensibilité dont l’UNESCO a fait preuve à l’égard de nos besoins et de nos urgences, ainsi qu’à l’égard des énormes efforts déployés par le peuple cubain dans ces domaines... Nous pouvons être fiers d’avoir rendu la pareille à cette compréhension et à cette confiance en étant capables de montrer au monde les résultats que nous avons obtenus".

Comme notre pays, l’Organisation a également subi le chantage financier de celui qui était autrefois son principal contributeur et qui a fini par l’abandonner en 2018 et avec lui, ses nobles et louables objectifs. Cuba, malgré la situation financière complexe qu’elle a traversée à différents moments, a toujours honoré ses engagements et ses responsabilités en tant qu’État membre.

Tout au long de ces années, les relations se sont développées au plus haut niveau, comme en témoignent les différentes visites effectuées par les deux parties. Il convient de souligner les visites au siège du Commandant en Chef Fidel Castro en mars 1995, la visite du Président Raúl Castro en février 2016 et celle du Président Miguel Díaz-Canel en novembre 2018. En retour, huit des onze directeurs généraux que l’Organisation a eus ont visité l’île, certains à plusieurs reprises. La plus récente visite a eu lieu en décembre 2019 par son actuelle Directrice Générale, Audrey Azoulay.

Pendant plus de 7 décennies de relations ininterrompues, Cuba a été membre de nombreux organismes intergouvernementaux dans tous les domaines du mandat de l’UNESCO, d’où elle a non seulement promu les réalisations de notre pays, mais aussi mis à la disposition de l’Organisation nos expériences et connaissances dans tous ses domaines de compétence, dans un engagement clair envers la coopération internationale, le multilatéralisme et la solidarité.

Cuba a été très active en tant que membre du Conseil Exécutif, l’organe directeur de l’Organisation, chargé de contrôler son programme et son budget et de mettre en œuvre les décisions prises par la Conférence Générale. Elle est actuellement membre des organes intergouvernementaux du Programme MOST pour les transformations sociales, du Programme International pour le Développement de la Communication (PIDC), du Programme d’Éducation Physique et de Sport (CIGEPS), du Programme sur l’Homme et la Biosphère (MAB) et du Programme Hydrologique International. Elle a récemment terminé son mandat au sein des comités du Patrimoine Mondial et du Patrimoine Immatériel.

Au cours de ces années de travail intense, la participation des organismes et institutions nationaux compétents en matière d’UNESCO a été fondamentale et a contribué de manière définitive au renforcement des relations historiques entre Cuba et l’Organisation.

Les salles de l’UNESCO ont accueilli d’importantes expositions de peintres cubains, des spectacles artistiques et des conférences d’intellectuels cubains.
Soixante-quinze ans après son adhésion à l’UNESCO, notre pays renouvelle son engagement auprès de cette Organisation dans la recherche de la paix et la promotion du développement durable. Nous continuerons à défendre son caractère multilatéral et intergouvernemental, ainsi que ses valeurs et ses principes fondateurs, qui sont pleinement valables pour faire face aux défis mondiaux actuels.

L’Ambassadrice de Cuba à l’UNESCO et la Directrice Générale

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