Cuba : une puissance culturelle
Appellation justifiée pour cette petite île des Caraïbes peuplée de près de 12 millions d’habitants ! Mais oui !
Le 21 octobre est la Journée de la Culture à Cuba. À cette occasion Roger Grévoul m’a demandé deux articles sur la culture à Cuba. Voici le premier « Cuba une puissance culturelle ».
Il présente l’histoire et le cadre d’un choix politique en faveur de la culture, mais aussi de la réhabilitation du patrimoine de la Vieille Havane ; pari culturel qui aboutit à la reconnaissance de la Vieille Havane au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO.
L’ancienne colonie espagnole a toujours veillé à disposer d’une élite cultivée dont les liens internationaux rayonnaient.
La Révolution de 59/60 porte bien son nom. La Culture est essentielle.
Oui, mais pour tous avec l’alphabétisation de tout un chacun, c’était un pari fou. 60 ans après, Cuba est l’un des pays du monde où la population est la mieux formée. Ce pays peut prétendre exporter ses ressources humaines, pas seulement ses médecins, mais aussi ses techniciens de nombreux domaines et surtout ses créateurs émanent de divers horizons.
Quelles ont été les premières mesures prises dès la Révolution ?
Bon nombre concernent la culture. L’une des premières lois fut érigée pour la défense du patrimoine.
L’outil cinématographique majeur : l’ICAIC est créé quelques semaines après, ainsi que la Casa de las Americas qui marque la volonté de placer la culture dans une dimension internationale et solidaire de ce que l’on appelait alors le Tiers Monde.
Donner aux jeunes artistes des moyens de formation et de réflexions sur leurs pratiques est un enjeu. Alors Cuba va créer tout un réseau d’enseignement culturel. Le symbole : des architectes cubains et italiens vont transformer en école d’art... Un ancien golf. Culture pour tous, contre divertissement de privilégiés !
Les "cultureux" du monde entier vont se précipiter à Cuba, à l’exemple de la manifestation de 68 avec une centaine d’artistes internationaux qui sont allé créer ensemble à La Havane.
Un homme symbole : Eusebio Leal
L’attachement à l’histoire et au patrimoine est lié à celui qui ne s’est pas contenté de poursuivre l’excellent travail de son prédécesseur, l’historien Emilio Roig, mais qui a inventé, avec le Bureau de l’Historien, une pratique culturelle complète.
Il réussit (dans les années 70) à obtenir l’accord de Fidel Castro pour créer un outil de rénovation de la Vieille Havane, exemplaire pour le monde entier. La culture est alors un enjeu complet. Lier la restauration de la Vieille Havane, avec les outils économiques (musées, hôtels, restaurants) sous la même direction, c’est ce que la France appelait alors une administration de mission totale.
Restaurer intelligemment, en maintenant les habitants sur place, former des milliers de jeunes aux métiers de la restauration, créer en parallèle, outils et manifestions culturelles pour tous, montrer que l’approche culturelle globale est autant sociale qu’économique, tout cela a conduit à la reconnaissance internationale par l’UNESCO de la Vieille Havane comme patrimoine mondial de l’Humanité. Ce sont des dizaines de lieux culturels qui vont émerger et vivre, dont la Maison Victor Hugo à laquelle les Français sont si attachés.
Des milliers de créateurs, d’artistes, de médiateurs culturels
Placer la culture au cœur du développement est une réussite rare pour un petit pays isolé et sous blocus. En quelques années, des milliers de créateurs venant de tous les domaines vont faire de ce pays une puissance culturelle, au service, à la fois de sa population et de sa notoriété internationale. La création est ce qui reste pour l’éternité. En France, on se souvient davantage des livres de Victor Hugo de son itinéraire politique.
Le prochain article reprendra quelques exemples par secteur culturel.
Aller à La Havane, c’est chaque jour choisir parmi les innombrables propositions culturelles qui vous sont offertes gratuites ou à bas prix. N’hésitez pas, vous comprendrez l’intérêt de Cuba mieux que sur ses plages ou paysages magnifiques.
Philippe Mano