Elian Gonzalez : un « exilé » contre son gré
La drôle de bataille
J’étais à La Havane. Ce soir de novembre 1999, l’amie qui me recevait au siège de Juventud Rebelde fut convoquée « sans délai » par El Comandante. Il était près de minuit.
L’affaire Elian Gonzalez venait de commencer.
L’article de Prensa Latina résume parfaitement ce qui s’est passé. Mais les tractations avec le Gouvernement des Etats-Unis furent longues et soulignons l’intervention indirecte du Président Clinton dans la résolution de ce qu’il faut bien appeler un rapt d’enfant. La bataille n’était pas tant contre le Gouvernement U.S. d’alors que contre cette mafia cubano-américaine qui s’arroge beaucoup trop de droits et de pouvoir en Floride.
Cette affaire a marqué l’histoire de Cuba. C’était la fin de la « période spéciale » (a t’elle fini un jour ?) et « El Comandante » confia à mon amie la gestion de la bataille idéologique qui suivit. De là naquit l’émission Mesa Redonda, le concept de « Batalla de ideas » et les mois qui suivirent jusqu’en juin 2000 furent longs, très longs. Toute la U.J.C. était vent debout. Les images de l’intervention des SWAT dans le logement en Floride pour reprendre cet enfant, comme toute l’affaire d’ailleurs, ne fut jamais traitée comme il se devait par nos médias… Une fois encore !
GD
Elian Gonzalez résume les valeurs du peuple de Cuba
La Havane, 28 juin (Prensa Latina) Rarement l’histoire n’aura autant résumé les valeurs du peuple cubain que dans la lutte pour le bien-être de l’enfant Elián González et son retour dans sa patrie et sa famille, il y a 24 ans aujourd’hui.
Elián n’était qu’un petit pionnier de six ans lorsque, le 22 novembre 1999, sa mère a tenté de le faire sortir clandestinement de Cuba à bord d’une embarcation rustique qui a fait naufrage au milieu du détroit de Floride.
Ils se sont rendus aux États-Unis avec la promesse d’une résidence permanente dans ce pays, après l’entrée en vigueur de la loi d’ajustement cubain, mais seuls le petit garçon et deux autres personnes ont pu survivre.
Lorsque des pêcheurs l’ont trouvé au large de la Floride, le service américain de l’immigration et de la naturalisation (INS) de l’époque l’a confié à Lázaro González, un grand-oncle vivant à Miami qui ne l’avait vu qu’une fois.
Le père d’Elián, Juan Miguel González, n’était pas au courant du départ de son fils de Cuba et a immédiatement demandé son rapatriement, un acte qui a été soutenu par le gouvernement cubain et tout le peuple cubain.
Le 2 décembre 1999, González a été reçu par le leader historique de la révolution, Fidel Castro, qui a pris connaissance de sa vie, de sa relation avec l’enfant et lui a même dit que s’il voulait aller aux États-Unis pour être avec son fils et y rester, il n’y avait pas de problème.
"Je lui ai dit que je n’avais aucun intérêt à aller là-bas, que ce que je voulais, c’était qu’Elián me revienne”. Il m’a répondu : "Ne t’inquiète pas. Dès demain, le peuple, tout le pays, se rendra sur place pour le réclamer", se souvient M. González.
Fidel Castro savait qu’en plus de 40 ans, Washington n’avait jamais accédé à une demande légale de cette nature, de sorte que la restitution ne pouvait "être obtenue que par une intense bataille politique et par l’opinion publique nationale et internationale".
C’est ainsi que le 5 décembre, avec la manifestation de centaines de jeunes devant l’ancienne section des intérêts de Washington (aujourd’hui l’ambassade) dans la capitale, le retour de l’enfant est devenu une revendication populaire, qui a fait descendre dans la rue l’ensemble des citoyens, avec en première ligne le leader historique de la révolution cubaine, Fidel Castro.
Cet événement a été le prélude à la "bataille des idées", une initiative du commandant en chef, qui a élaboré plus de 170 programmes dans les domaines social et économique de Cuba.
Le 5 janvier 2000, le service américain de l’immigration et de la naturalisation a reconnu le droit de Gonzalez à l’autorité parentale sur son fils et, le 14 janvier 2000, le délai fixé par le procureur général des États-Unis, Janet Reno, pour le retour d’Elian dans son pays a expiré ; mais cette démarche a été entravée par des parents et des groupes anti-cubains de Miami devant les tribunaux.
À l’issue d’une longue procédure judiciaire, à certains égards contraire au droit international et au droit américain lui-même, et avec un large soutien du peuple américain, le 28 juin, le petit Elian a été renvoyé dans son pays d’origine, sous la tutelle de son père, à la suite d’une décision de la Cour suprême des États-Unis.
Deux décennies plus tard, il est un jeune ingénieur industriel diplômé, un membre de l’Assemblée nationale et un père dévoué à sa famille et à son pays.
rgh/ebe