Geydy Grey, une arbitre internationale de boxe. Interview.

Ses difficultés pour s’imposer dans un monde d’hommes !

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Cubadebate – 22 juin 2022
Par Abel Padrón Padilla et Daniel Martínez

Traduit par Nicole Bedez

Geidy Grey est arbitre internationale de boxe. Dans l’interview qu’elle accorde à Cubadebate, elle décrit son parcours dans cette discipline sportive dominée par les hommes, et fait part de ses difficultés pour se faire accepter, mais aussi de ses réussites et de ses rêves . . .

Geydy Grey, arbitre internationale de boxe – Photos : Abel Padrón Padilla/ Cubadebate

De la passion, de la persévérance, de l’amour et beaucoup de ténacité, voilà quelques-unes des pierres qui pavent le chemin de la vie de Geydy Grey, laquelle a décidé il y a quelque temps qu’être femme et arbitre de boxe, c’est une conception de la vie.

« J’ai toujours ressenti un attrait particulier pour les sports de combat », dit-elle, les yeux fixés sur le ring pendant l’un des combats du Tournoi national de boxe de Playa Girón qui se déroule à cette époque de l’année dans la salle Rafael Fortún.

« Malheureusement, je n’ai pas pu les pratiquer. Seulement le badminton de loisir, car lorsque je me suis lancée dans le sport, ce n’était pas une discipline de haut niveau », ajoute-t-elle en demandant une pause pour assumer ses fonctions professionnelles au bord du ring...

« Je suis originaire de Santiago de Cuba, mais j’ai déménagé à Guantánamo », précise-t-elle avec un large sourire. « C’est là que j’ai commencé à m’intéresser aux règles et à l’arbitrage au niveau de la province », poursuit-elle après s’être acquittée de sa tâche et s’être assise à côté d’un groupe de collègues qui attendent un autre combat.

« L’opportunité d’entrer dans le monde de la boxe s’est présentée en 2009. La commission nationale a proposé une formation pour les juges et les arbitres, et trois femmes ont obtenu leur diplôme dans la zone orientale. À partir de ce moment-là, il a été décidé que chaque collectif provincial devrait inclure une femme dans l’organisation de chaque événement ».

Notre interlocutrice ne craint pas le dialogue, ni des sujets encore polémiques. « Quelques hommes nous ont acceptées. D’autres avaient certains tabous, ils étaient surpris. Il y en avait même qui se sentaient menacés parce que c’était un poste en moins. Je me suis heurtée à plusieurs d’entre eux, j’ai même dû m’imposer dans des débats où l’on me reprochait de ne pas assister à toutes les compétitions ».

« Ce que je leur disais ? C’est très simple. Tout est réglé quand vous rentrez chez vous ; pour moi, c’est juste l’une de mes nombreuses tâches », affirme-t-elle sérieusement. « Je l’exprime ainsi : comment réussit-on à être mère et épouse avec un travail aussi exigeant ? ».

« J’ai l’aide de ma mère. Sa présence auprès de mon fils est fondamentale et encore plus lorsque je me rends à des compétitions comme celle de Playa Girón. Ce qui me fait également avancer, c’est mon caractère. Je suis habituée à la pression ».

« Au début de mon parcours dans l’arbitrage, j’ai eu quelques petits problèmes sur le ring. Il y avait parfois des combattants et des entraîneurs qui ne me respectaient pas. Avec le temps et grâce à mon travail, cela a changé. Il arrive encore des petites choses dans le feu de l’action, mais pas comme avant », explique-t-elle en laçant l’une de ses baskets.

Elle reconnaît que jamais d’autres femmes ne l’ont critiquée. « Tout ce qu’elles disent, c’est comment je peux m’interposer entre deux hommes qui se battent à coups de poing ? Ce que je leur réponds ? Que je suis fière qu’ils se battent pour moi », affirme-t-elle dans un bref mais intense éclat de rire.

« Mon mari me dirige professionnellement »
, dit-elle encore, prête à faire la différence sur le ring. « Ses exigences sont élevées. Je rêve en grand. Participer aux Jeux olympiques serait grandiose, j’en veux davantage ».

Nietzsche disait que « seules les pensées que nous gardons en mouvement ont de la valeur ». Celles de Geydy Grey sont remarquables et particulièrement brillantes, car elles naissent et se renforcent à partir de son immense condition de femme.

http://www.cubadebate.cu/especiales/2022/06/22/digase-mujer