Jorge Perugorría (Fresa y chocolate) : « Mario Conde fait partie de ma vie »
Auteur Adalys Pérez Suarez Traduit par Alain de Cullant
Le metteur en scène espagnol Félix Viscarret est sur le point de conclure, à La Havane, le tournage de l’adaptation pour le cinéma du roman Vents de Carême de l’écrivain Leonardo Padura Fuentes, dans lequel l’acteur Jorge Perugorría assumera le personnage de Mario Conde, l’un des plus populaires dans la littérature cubaine de tous les temps.
Il s’agit d’un projet produit par Tornasol Films, Nadcom Production et de Televisión Española qui comprend également le tournage pour le petit écran de trois autres roman de la série Les Quatre Saisons, comptant toutes cet ex policier devenu investigateur « à son compte », une sorte d’anti-héros de la narrative nationale.
Publié dans LETTRES DE CUBA d’Octobre
Vingt ans après Fresa y Chocolate...
Au milieu de l’agitation de la première à Cuba de son dernier film en tant que réalisateur, Fatima o El Parque de la Fraternidad, Jorge Perugorría a accepté une brève entrevue pour les lecteurs de Cubarte sur la façon dont il a fait face au défi d’assumer un personnage aussi vivant dans l’imaginaire populaire de ses compatriotes.
« De la même façon que j’ai affronté le Diego car, comme tu le dis si bien, c’est un grand défi. Quand il y a des personnages qui viennent du monde de la littérature et qui y sont emblématiques – aussi bien Diego à son moment que Mario Conde maintenant – on doit toujours faire face à un grand défi en tant qu’acteur. Les romans de Padura sont pratiquement une chronique de plusieurs générations qui sont nées et ont grandi dans la Révolution cubaine car, mis à part le genre policier, derrière on peut toujours voir un reflet de la société cubaine et de ces générations qui ont grandi dans la Révolution, dont je fais partie. Mario Conde n’est pas seulement un personnage, il fait partie de ma vie. Cela a été l’essence de ce travail ».
Comment as-tu conformé le personnage ?
Là j’ai cherché Mario Conde où j’étais, au lieu d’aller le chercher. J’aime toujours faire ceci, composer un personnage, puis le caractériser physiquement, etc. Mais dans le cas de Mario Conde il y a tant d’expériences que nous partageons, tant de rêves, tant d’utopies...
Mario Conde allait au Pre-universitaire de la Vibora et moi à celui de Boyeros. C’est pareil, nous avions un groupe d’amis. Nous nous rencontrions pour écouter de la musique. Nous avons été dans les Écoles à la Campagne. Nous avons cru en ce qui se faisait et qui a changé plus tard car le monde prend un autre chemin.
Mario Conde est resté avec toutes ces utopies dans sa tête. C’est aussi un peu comme moi : se réinventer. Comme tous les Cubains, selon moi.
Mais le personnage possède un lourd fardeau d’amertume, de cynisme parfois...
En ce sens il est plus sceptique que moi parce que je suis un peu plus jeune que Mario Conde. Nous avons vécu la même chose, mais je peux encore me réinsérer dans tous les changements qui ont lieu à Cuba, m’intégrer à ces changements et faire partie d’eux.
Mario le fait, mais plus lentement. Le passé lui pèse beaucoup, celui du rêve collectif et cela lui coûte plus qu’à moi.
Peux-tu donner une idée du travail qui a été fait jusqu’à maintenant ?
Nous avons fait un travail merveilleux. Il y a une équipe d’acteurs cubains de haut niveau, et le metteur en scène et le photographe sont arrivés à Cuba et, comme beaucoup, ils sont tombés amoureux des personnages, ils sont tombés amoureux de l’histoire, ils sont tombés amoureux des Cubains, ils sont tombés amoureux de La Havane.
Je pense que vingt ans après Fresa y Chocolate et d’avoir eu la responsabilité de jouer Diego, Mario Conde est le personnage le plus intéressant, avec le plus de nuances, le plus complexe que j’ai fait dans ma carrière.