LES ÉNERGIES RENOUVELABLES A CUBA : UN ENJEU POUR LA PLANÈTE ET CONTRE LE BLOCUS

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A tous points de vue : énergétique, économique, écologique, politique et défense, l’option pour le développement des énergies renouvelable est une évidence. Cuba a défini un programme pour avancer dans ce secteur pour lequel le pays possède quelques avantages.

Pétrole et gaz, principales énergies fossiles.

Le pétrole et le gaz fournissent 80 % de l’énergie totale produite dans l’île. Les biocombustibles et les déchets fournissent les 20 % restants. La consommation de charbon est très faible.
95 % de l’électricité produite provient des combustibles fossiles et 5 % des énergies renouvelables et plus de la moitié du combustible utilisé dans l’île sert à la production d’électricité. (tableau).
En 2018, Cuba a produit 50 000 barils de pétrole brut et en importait autant chaque jour. L’île détenait 124 millions de barils en réserves qui diminuent rapidement.

Réserves prouvées de pétrole et de gaz

En 2015 Cuba a produit 104 100 barils de produits pétroliers raffinés (à partir de brut produit et importé), alors qu’elle consommait 175 000 barils de produits pétroliers raffinés, chaque jour. Il fallait donc importer la différence.
Ces chiffres permettent de mesure la dépendance aux importations du pays. La plus grande partie du pétrole importé vient du Venezuela avec une baisse importante due à la crise qu’a traversée ce pays. Cuba importe aussi du pétrole russe sans pouvoir couvrir ses besoins, ce qui explique les coupures régulières de courant électrique.

Importance de l’énergie électrique

Au fur et à mesure que le secteur touristique se développe dans l’île, la demande électrique augmente, compte tenu des besoins en air conditionné et en réfrigération.

Répartition des sources de production électrique

De plus, afin d’être moins dépendante des énergies fossiles, Cuba encourage l’utilisation de véhicules électriques.

Bien sûr, on encourage aussi les économies de consommation avec l’utilisation de LED pour l’éclairage public et privé, les chauffe-eaux et pompes solaires, le remplacement de matériels électrodomestiques anciens par des produits plus économiques (cuisinières, télévision, air-conditionné, etc.), mais cela a aussi un coût initial.

D’ici 2030, l’île a pour objectif de produire 24 % de son électricité (soit 2 144 MW) en partant de sources renouvelables.
Pour mieux comprendre l’enjeu, il faut savoir que la capacité de génération électrique de l’île était de 6 660 MW en 2020. Récemment, l’Union Nationale Électrique de Cuba a actualisé son programme et estime qu’elle pourrait atteindre 37 % d’électricité produite grâce aux énergies renouvelables en 2030.

Pour le moment, la puissance installée en termes d’énergies renouvelables est d’environ 300 MW.

Répartition des énergies renouvelables en 2030

L’enjeu des énergies renouvelables

Il s’agit bien sûr de diminuer les émissions de dioxyde de carbone, de diminuer les coûts de production de l’énergie, d’améliorer l’efficacité du système électrique, d’accroître la compétitivité de l’ensemble de l’économie, mais aussi d’en finir, à terme, avec la dépendance aux énergies fossiles, dont plus de la moitié est importée avec tous les risques de rupture d’approvisionnement dus au blocus qu’exercent les USA sur le pays.

Le photovoltaïque

Compte tenu des réalités de l’île, la source la plus sûre d’énergie renouvelable réside dans le photovoltaïque, qui est aussi facile et rapide à installer. Le pays compte déjà près de 70 parcs installés.

Simple et rapide à installer

L’île reçoit une radiation solaire moyenne très homogène sur l’ensemble du pays, évaluée à plus de 5kWh/m2 par jour. Elle peut donc utiliser les systèmes photovoltaïques mais aussi l’énergie solaire thermique (pour l’eau chaude par exemple).
Le pays dispose d’une usine de panneaux photovoltaïques à Pinar del Rio et l’importation de systèmes photovoltaïques ainsi que des pièces de rechange n’est pas soumise aux droits de douane et n’est pas limitée en quantité.

La biomasse

L’utilisation de la biomasse est principalement liée à la production sucrière par l’utilisation des déchets de la canne à sucre (cogénération). On installe donc de nouvelles centrales bioélectriques aux abords des usines sucrières. Par exemple, l’usine sucrière Ciro Redondo (province de Ciego de Avila) a ainsi généré 115 000 mWh en un an.
Le groupe sucrier cubain, AZCUBA, compte environ 60 usines rattachées à 17 centrales bioélectriques en phase d’essai ou en fonctionnement. Les usines sucrières sont ainsi capables de produire leur propre énergie, à un faible coût, et de revendre le surplus (environ 15%).

Usine bioélectrique Ciro Redondo

L’électricité produite par la biomasse représente aujourd’hui 3% de l’électricité produite dans le pays. Il est prévu que ce chiffre passe à 14 % en 2030. L’ensemble devrait produire 755 MW en fonctionnant plus de 200 jours par an et évitera de rejeter 1,5 millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère. Des investissements sont nécessaires pour moderniser les installations (utilisation de chaudières à haute pression, turbines d’extraction-condensation de vapeur). Il est prévu de moderniser l’usine de chaudières d’AZCUBA et des ateliers produisant des ventilateurs, surchauffeurs et autres produits. La reprise de la production de sucre devrait avoir pour effet secondaire d’augmenter la biomasse disponible pour produire de l’électricité.

L’hydraulique

Plusieurs barrages utilisent déjà l’énergie hydraulique (0,6 % du total) avec des limites dues à la géographie de l’île. Un programme a été élaboré pour construire 74 petites centrales hydrauliques de plus de 56 MW. Une usine produit déjà des petites turbines hydrauliques.

L’éolien

L’utilisation de l’énergie éolienne (0,5 % du total) est à l’étude et 4 parcs éoliens expérimentaux d’une puissance totale de 12 MW sont en cours d’installation, principalement dans le nord d’Holguin. Deux autres parcs sont en construction dans la province de Las Tunas avec une puissance totale de 101 MW. L’Union Electrique a étudié la possibilité d’implanter 13 parcs éoliens produisant 633 MW. Il est prévu d’implanter des usines pour fabriquer les matériels nécessaires.

Le biogaz

Il s’agit de récupérer les effluents des élevages pour réduire la contamination du milieu ambiant et installer des biodigesteurs qui produisent du gaz et des engrais organiques. On compte environ 3 500 biodigesteurs dans le pays. Les biodigesteurs installés dans le secteur porcin sont capables de produire 40 000 m3 de biogaz par jour, ce qui peut permettre, chaque jour, de fabriquer 60 à 90 MW (grâce à des petits générateurs), d’économiser 200 tonnes de bois à bruler et de réduire de 343 000 tonnes les émissions de CO2 dans l’atmosphère. On utilisera, de plus, les déchets de l’industrie alimentaire et les déchets organiques solides urbains. L’usine Franck Pais, dans la province de Matanzas, a installé une des premières usines à biogaz, avec un biodigesteur géant de 1 850 m3, qui lui permet de produire sa propre électricité.

Cuba dispose des moyens techniques et humains pour réussir cette évolution.

Les sociétés d’ingénierie IPROYAZ d’AZCUBA et INEL de l’Union Électrique, le Groupe d’Entreprises de l’Industrie Sidérurgique et Construction Mécanique, des entreprises du Ministère de l’Agriculture et du Ministère de l’Industrie Alimentaire possèdent un personnel très qualifié pour exécuter les programmes prévus, ainsi que des usines et des ateliers.

Le pays compte plus de dix universités, dédiées à une formation scientifique et technique d’un niveau élevé dans différentes spécialités techniques. Elles préparent à des licences économiques et sociales, etc... ainsi qu’à de hautes études universitaires, dont des mastères et des doctorats.

Cependant, l’île ne dispose pas des ressources suffisantes pour financer ces programmes d’investissement.

Dans ce domaine, comme dans d’autres, l’investissement étranger est vital pour réussir la transition énergétique du pays. Cuba a pour objectif d’investir 3,5 milliards de $ pour le développement des énergies renouvelables d’ici 2030.
Plusieurs projets d’affaires sont présentés dans le portefeuille d’opportunités et font l’objet d’études de la part d’investisseurs.
C’est ainsi que la France et Cuba viennent de signer, le 22 juin, un accord concernant un projet d’installation de neuf parcs photovoltaïques dans l’île pour une puissance de 50 MW.

Exemples de projets

Portfolio

Sources des émissions de CO2