La bataille interne

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Nous vous proposons la lecture d’un article, paru dans Granma le 17 avril dernier, d’Ernesto Estévez Rams, professeur à l’Université de La Havane, membre de l’Académie des Sciences de Cuba et auteur de nombreux articles.
Il ne s’agit pas pour nous d’entrer dans les débats internes de la société cubaine, mais de montrer que ces débats existent et qu’ils posent parfois des questions fondamentales, avec une liberté de ton qui peut surprendre les personnes ne connaissant pas vraiment la réalité cubaine.

La bataille interne

Le temps est en faveur des plus petits, mais c’est toujours la variable sociale qui domine notre dynamique particulière d’assiégés. Le pays fait un effort de transformation colossal dans le pire scénario géopolitique depuis la chute du socialisme européen. À bien des égards, « c’est l’heure des mameyes » *.
L’ennemi, connaissant la conjoncture particulière, ne veut pas nous laisser le temps de changer ce qui doit être changé. Ils ont aussi le sentiment que, par rapport à nous, « l’heure des mameyes »* est venue. Ils réussissent ou, vaincus, ils verront passer ce qui aura peut- être été leur dernière chance de nous abattre pour plusieurs générations, s’ils ont quelque autre chance d’y arriver.

Mais le temps est aussi contre les plus petits si nous n’accélérons pas le pas. Nous n’avons pas tout le temps de l’univers pour changer les mentalités, ni pour réparer les pots cassés qui sont de notre responsabilité. Nous n’avons pas tout le temps de l’univers pour lutter contre la corruption, pour vaincre le bureaucratisme, pour détruire la négligence. Nous n’avons pas tout le temps du monde pour renverser l’indifférence, pour noyer l’incapacité, pour démasquer l’opportunisme.
Nous n’avons pas tout le temps de l’univers pour nous en sortir.

Parce qu’il ne s’agit pas d’appeler au combat, il s’agit de combattre. Il ne s’agit pas d’appeler à augmenter la production, il s’agit de produire. Il ne s’agit pas d’appeler à la libération des forces productives, il s’agit de les libérer. Il ne s’agit pas d’appeler à l’amélioration des services, il s’agit de les améliorer. Il ne s’agit pas non plus d’appeler à l’élimination de la corruption, il s’agit de l’éliminer. Il ne s’agit pas d’appeler à la destruction de la bureaucratie, il s’agit de la détruire. Il ne s’agit pas d’appeler à plus d’efficacité, il s’agit d’être plus efficace. Il ne s’agit pas d’appeler à une meilleure éducation, il s’agit de l’améliorer. Il ne s’agit pas d’appeler à produire plus d’aliments, il s’agit d’y parvenir. Il ne s’agit pas d’appeler à vaincre le blocus, il s’agit de le vaincre. Il ne s’agit pas d’appeler à être autocritique, il s’agit de l’être. Il ne s’agit pas d’appeler à un meilleur journalisme, il s’agit de l’améliorer. Il ne s’agit pas d’appeler à une meilleure communication sociale, il s’agit de l’améliorer.
Il ne s’agit pas d’appeler à marquer des points, il s’agit de les marquer. Il ne s’agit pas d’appeler à sauver la culture, il s’agit de la sauver.
Parce qu’il ne s’agit pas d’appeler à sauver la Révolution, il s’agit de la sauver.

Il ne s’agit pas non plus de prétendre combattre, il s’agit de combattre. Il ne s’agit pas non plus de prétendre que la production augmente, il s’agit de l’augmenter. Il ne s’agit pas non plus de prétendre que les forces productives se libèrent, il s’agit de les libérer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre que les services s’améliorent, il s’agit de les améliorer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre qu’on élimine la corruption, il s’agit de l’éliminer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre qu’on détruit la bureaucratie, il s’agit de la détruire. Il ne s’agit pas non plus de prétendre être plus efficace, il s’agit de l’être. Il ne s’agit pas non plus de prétendre qu’on améliore l’éducation, il s’agit de l’améliorer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre qu’on obtient plus d’aliments, il s’agit de les obtenir. Il ne s’agit pas non plus de prétendre que nous vainquons le blocus, il s’agit de le vaincre. Il ne s’agit pas non plus de prétendre être autocritique, il s’agit de l’être. Il ne s’agit pas non plus de prétendre améliorer le journalisme, il s’agit de l’améliorer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre améliorer la communication sociale, il s’agit de l’améliorer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre marquer des points, il s’agit de les marquer. Il ne s’agit pas non plus de prétendre sauver la culture, il s’agit de la sauver.
Parce qu’il ne s’agit pas de prétendre qu’on sauve la Révolution, il s’agit de la sauver.

Rappelez-vous que Fidel n’a pas appelé à attaquer la Moncada, il l’a attaquée. Fidel n’a pas appelé à débarquer du Granma, il a débarqué. Fidel n’a pas appelé à entrer dans la capitale le 8 janvier (1959), il y est entré. Fidel n’a pas appelé à vaincre l’envahisseur à Girón, il l’a vaincu. Fidel n’a pas appelé à résister lors la crise d’octobre (1962), il a résisté. Fidel n’a pas appelé à surmonter l’effondrement socialiste, il l’a surmonté.

Fidel ne nous demande pas de prétendre que le socialisme est irréversible, c’est à nous de le rendre irréversible. Fidel ne nous demande pas de seulement crier « la Patrie ou la Mort », c’est à nous de vaincre.

(*)L’heure des mameyes (sapotes)
La Havane a été occupée par les Anglais en 1762. Les habitants de la ville qui avaient du mal à supporter la présence des soldats, habillés de rouge, se moquaient d’eux et les surnommaient « les mameyes », un fruit dont la chair est rouge.
Afin de mieux contrôler la population, les Anglais ont imposé un couvre feu en fin d’après-midi. Quand arrivait l’heure fatidique, les Havanais avaient pris l’habitude de dire, en voyant arriver les uniformes rouges, « c’est l’heure des mameyes », ce qui signifiait qu’il était temps de rentrer chez soi sans délai.
L’expression est restée dans le langage courant à Cuba pour signifier qu’il est temps d’agir, qu’il faut se bouger ou qu’on arrive à un moment décisif.