La souveraineté alimentaire : une question qui concerne tous les Cubains et pas seulement l’État

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par Fidel Rendón – Publié dans Cubahora le 20 septembre 2022.

Améliorer les processus de production, de transformation, de commercialisation et de consommation des aliments et protéger le droit des personnes à une alimentation saine et appropriée sont les objectifs fondamentaux de la Loi 148 sur la Souveraineté Alimentaire et la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle, laquelle entrera en vigueur, avec son règlement, le 28 octobre prochain...

Les modalités de la chaîne de valorisation et la production alimentaire sont favorisées par la mobilisation des ressources existantes dans la commune (Nature secrète de Cuba).

Si l’une des lois les plus récemment approuvées à Cuba résume un intérêt présent depuis le triomphe de la Révolution, puisqu’il s’agit d’une question stratégique et d’une préoccupation du commandant en chef Fidel Castro et du général d’armée Raúl Castro, la Loi sur la Souveraineté Alimentaire et la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (loi SSAN) reçoit également une impulsion particulière de la part du Président Miguel Díaz-Canel.

Après son approbation le 14 mai par l’Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire et sa publication au Journal Officiel Ordinaire le 28 juillet, la Loi 148/2022 entrera en vigueur le 28 octobre, mais pas avant que des activités de formation et de sensibilisation soient menées à tous les niveaux en direction des acteurs responsables de sa mise en œuvre et de ceux qui l’appliqueront dans les territoires.

Un simple regard sur les énormes défis et problèmes auxquels Cuba a été confronté au cours de ces six décennies de processus révolutionnaire dans l’ensemble de la chaîne alimentaire, de la production à la consommation en passant par la distribution et la commercialisation, ainsi que les graves contraintes financières, la dépendance vis-à-vis du marché extérieur et l’impact d’un blocus criminel, de crises économiques mondiales et d’événements climatiques fréquents, justifiaient depuis longtemps l’existence d’une telle législation : large, exhaustive, moderne et globale.

LE MOMENT NE POURRAIT PAS ÊTRE MIEUX CHOISI

À l’heure où, au niveau mondial, les prix des aliments et des intrants augmentent en raison de la pandémie, et où la guerre économique criminelle du gouvernement des États-Unis contre le pays s’intensifie, il n’y a pas d’autre alternative que d’achever de transformer l’agriculture - et l’esprit de nombreux compatriotes - en tenant compte des défis, d’aujourd’hui et de demain, et de nos conditions et potentialités endogènes.

Nous ne pouvons pas non plus oublier que des phénomènes internes tels que l’exode rural et le vieillissement de la population ont une incidence sur la diminution de la main-d’œuvre, ce qui oblige à être plus efficace quant à la production.

La souveraineté alimentaire est la capacité d’une nation à produire des aliments de manière durable et à donner à l’ensemble de la population l’accès à une alimentation suffisante, diversifiée, équilibrée, nutritive, sûre et saine, en réduisant la dépendance à l’égard de moyens et d’intrants extérieurs, ce qui en fait une question de sécurité nationale, surtout lorsque l’empire du nord a cherché à nous affamer et entrave le commerce avec Cuba.

Ce n’est pas pour rien que la Constitution de la République, dans ses articles 77 et 78, établit que toutes les personnes ont droit à une alimentation saine et appropriée et à consommer des biens et des services de qualité qui ne nuisent pas à leur santé. Elles ont également le droit d’accéder à des informations exactes et vérifiées sur ceux-ci, ainsi que d’être traitées équitablement et avec dignité, conformément à la loi.

De même, l’Agenda 2030 pour le Développement Durable vise à en finir avec la faim, à assurer la sécurité alimentaire et une meilleure nutrition, et à promouvoir l’agriculture durable en tant que condition préalable pour parvenir à la viabilité économique, sociale et environnementale.

Avec de tels antécédents, qui ne sont pas les seuls, nous disposons d’une loi SSAN tout à fait conforme à la réalité cubaine, fruit des contributions et des idées de producteurs, de scientifiques, d’universitaires, de fonctionnaires et de spécialistes de différents domaines, ainsi que des meilleures expériences internationales.

Rappelons-nous qu’avant son approbation, un large processus de consultation et d’analyse dans les territoires et au sein de l’Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire a permis d’esquisser le projet de règlement qui régira conjointement les plans du pays pour garantir l’alimentation de la population.

Il convient également de souligner l’assistance technique et logistique fournie par le projet de collaboration Renforcement des Politiques Publiques pour la Sécurité Alimentaire Durable à Cuba (POSAS), mis en œuvre par l’Organisation des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO), avec un financement de l’Union Européenne.

LA LOI SEULE NE FOURNIRA PAS LA NOURRITURE, MAIS...

Compte tenu de l’absence de réglementations relatives à ce domaine dans la législation cubaine, cette loi innovante apporte un soutien technique et juridique au Plan de Souveraineté Alimentaire, approuvé en juillet 2020 par le Conseil des Ministres, dans le but de parvenir à des systèmes alimentaires locaux et durables. En d’autres termes, tous les éléments stratégiques de ce plan sont inclus dans la législation susmentionnée, laquelle lui confère une autorité pour des obligations et des droits, et constitue son application juridique.

Comme l’a souligné Mayra Cruz Legón, Directrice Juridique du Ministère de l’Agriculture, la loi à elle seule ne fournira pas de nourriture, mais elle contribuera à la stabilité, à la disponibilité et à l’accès aux aliments car elle réorganisera les processus pour faciliter leur production, leur transformation et leur commercialisation.

Dans plusieurs scénarios, la fonctionnaire a souligné, parmi les nouveautés présentes dans le texte, l’établissement d’un système d’éducation nationale fondé sur les bonnes pratiques alimentaires, le renforcement de l’autonomie municipale et la promotion de la pratique d’une agriculture durable sur des bases agro-écologiques.

Comme si cela ne suffisait pas, elle a attiré l’attention sur le fait qu’à Cuba des aliments sont perdus et gaspillés lors des étapes de production, de transformation, de commercialisation et de consommation, ce qui affecte la quantité et la qualité de la nourriture destinée à la consommation humaine. C’est pour ces raisons que le nouveau règlement aborde cette question afin de contribuer à satisfaire la demande alimentaire de la population, à protéger l’environnement et, en général, à améliorer l’économie cubaine.

En outre, sa mise en œuvre devrait permettre de réduire les importations de denrées alimentaires, de matières premières et d’intrants, et de garantir la qualité et la sécurité des aliments.

La loi elle-même définit les responsabilités des agences de l’Administration Centrale de l’État, des organes locaux du Pouvoir Populaire et des acteurs des systèmes alimentaires locaux en matière de souveraineté et de sécurité alimentaires et nutritionnelles et de droit à l’alimentation, car cela ne concerne pas uniquement le Ministère de l’Agriculture.

Il s’agit de favoriser les modalités de la chaîne de valorisation et la production alimentaire par la mobilisation des ressources existantes dans la Municipalité, et l’on définit les questions à prendre en compte par les acteurs des systèmes alimentaires locaux pour y parvenir en intégrant le rôle du commerce extérieur et des investissements étrangers dans ce secteur.

LA FORMATION ET LA SENSIBILISATION DES ACTEURS SONT PRIMORDIALES

Mais ce qui constitue un pilier essentiel pour la réalisation des objectifs poursuivis par le plan SSAN, c’est une formation adéquate et une communication cohérente en direction des acteurs responsables de la mise en œuvre de la loi, depuis les producteurs jusqu’aux spécialistes et aux fonctionnaires des organismes gouvernementaux locaux et du système agricole, en mettant particulièrement l’accent sur le rôle des femmes et des jeunes.

Depuis le début du mois de septembre précisément, on développe ce que l’on nomme des ateliers de renforcement des capacités, au niveau des institutions et des organismes nationaux, provinciaux et municipaux, dans le but de former et de sensibiliser à une législation qui entrera en vigueur le 28 octobre.

En raison de son importance stratégique, celle-ci mérite d’être contrôlée et évaluée en permanence, en rendant ses résultats publics, en stimulant ceux qui, depuis le sillon, la ferme ou tout espace urbain et rural, sont conscients de l’enjeu et considèrent la souveraineté alimentaire et la sécurité alimentaire et nutritionnelle comme une question concernant tous les Cubains, et pas seulement l’État.