Le code des familles, dernière étape... (+ VIDEO)
avant référendum !
Comme l’indique Lina Sankari, journaliste au quotidien l’Humanité, la consultation sur le Code des Familles est terminée. Il reste le dernier examen par l’Assemblée Nationale avant le vote par référendum. Nous l’avons à plusieurs reprises souligné, c’est un exercice de démocratie exceptionnel. Il se s’agit pas d’imposer un texte mais, par la discussion, la conviction, de trouver l’accord de l’immense majorité, sur des sujets complexes.
Afin de compléter votre information nous publions à la suite de cet excellent article, une vidéo de l’écrivaine, journaliste, Maïlys KHIDER à qui l’on doit le précieux ouvrage "Médecins cubains, les armées de la Paix" dont nous avons publié un interview.
Législation. Cuba adapte son Code de la Famille aux évolutions de la société
La consultation populaire sur la révision du Droit de la Famille s’achève aujourd’hui. Les citoyens ont discuté et amendé le texte qui ouvre de nouveaux droits tels que le mariage pour tous, une GPA « solidaire », la reconnaissance des droits des enfants et le renforcement de l’autonomie des personnes handicapées.
Dans tout le pays ont eu lieu des consultations populaires, comme ici dans un quartier de La Havane, le 11 février. Ramon Espinosa/AP/SIPA
Une révolution dans la Révolution. Aujourd’hui, la consultation populaire sur le nouveau Code de la Famille cubain touche à sa fin. La Grande Île a mobilisé 78 000 points de rencontre afin que 7 millions de citoyens – y compris les Cubains installés à l’étranger, dont les exilés – discutent du projet de loi validé par l’Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire (ANPP) et l’amendent depuis leur quartier, leur lieu de travail ou d’études. Le texte ouvert et inclusif vise à prendre en compte les évolutions de la société qui rendent caduc l’actuel Code, daté de 1975. À l’époque, le Code de la Famille jetait les bases matérielles et juridiques de l’émancipation des femmes et de l’égalité réelle, mettant en cause les rapports de domination hérités du colonialisme espagnol. « Nous sommes face à un Code dont nous devons être fiers et que nous devons transférer à notre peuple, indépendamment de toute différence », explique aujourd’hui Homero Acosta, Secrétaire de l’ANPP.
Mariage des couples de même sexe, familles multi-parentales, gestation pour autrui (GPA) dite « solidaire », c’est-à-dire sans échange d’argent et avec un contrôle légal, médical et judiciaire préalable, protection contre les violences, reconnaissance des droits des enfants, responsabilité vis-à-vis des personnes âgées dans une société vieillissante, possibilité pour les familles de convenir de l’ordre des noms, du régime économique et de la compensation du travail domestique… les évolutions sont substantielles.
Un texte à la portée éducative et inclusive
La famille mononucléaire s’ouvre à la possibilité de reconnaître, outre les parents biologiques, plusieurs mères et pères. « Le projet de loi reconnaît de nouvelles formes de parenté, comme la parenté socio-affective, qui n’est pas réglementée dans le code actuel, et reconnaît également la multi-parentalité et met fin au binarisme en matière de filiation », précise Leonardo Pérez, Président de la Société Cubaine de Droit Civil et Familial. Également professeur à la Faculté de Droit de l’Université de La Havane, ce dernier explique que la Loi Fondamentale cubaine, contrairement à d’autres, fait du mariage l’un des ferments de l’organisation des familles, mais pas le principal.
La garde et la prise en charge partagée des enfants garantissent par ailleurs un investissement accru des pères. De ce texte émerge également une nouvelle institution, le Bureau du Défenseur de la Famille, destiné à la protection des personnes vulnérables et handicapées. La suppression de la tutelle et de la déclaration judiciaire d’incapacité, afin de permettre aux personnes en situation de handicap d’accomplir des actes juridiques par elles-mêmes ou de manière assistée, implique également la révision du Code Civil.
« Je pense que le Code cubain des Familles deviendra l’un des plus modernes d’Amérique Latine et placera Cuba à l’avant-garde de la législation en matière de Droit de la Famille », insiste Leonardo Pérez, qui souligne la portée éducative et inclusive du nouveau texte. Au-delà de la reconnaissance des droits qui renforcent l’autonomie et le pouvoir de décision des personnes âgées, le vieillissement de la société cubaine et l’augmentation de l’espérance de vie obligent également à repenser la prise en charge et le rôle des aidants familiaux.
En attente d’une validation par voie référendaire
Après la consultation populaire, il appartient désormais au Parlement cubain d’évaluer une dernière fois le texte. Les députés pourront encore enrichir le texte en tenant compte des retours de la société. C’est une fois cette étape franchie qu’un dernier aller-retour aura lieu devant la population afin qu’elle valide ou non le document par la voie référendaire.
C’est déjà ce procédé qui avait été privilégié lors de la dernière révision constitutionnelle de 2019. Il y a trois ans, le Président Miguel Diaz-Canel s’était prononcé en faveur du mariage de personnes de même sexe, mais ce dernier avait soulevé l’opposition des Églises, catholique et évangélique, et d’une majorité de la population. La Loi Fondamentale ouvrait toutefois la porte en définissant le mariage comme une union « entre deux personnes », sans en spécifier le sexe. Francisco Rodríguez Cruz, militant des droits LGBTQ+, se félicite de la nouvelle version du Code de la Famille : « Pour arriver à ce qui se passe maintenant, beaucoup ont participé et j’avoue que ce qui a été réalisé est bien plus que ce que nous pouvions concevoir il y a une décennie. »