En février, s’est tenu le 13ème Congrès International Université 2022, sur les questions « Université et Innovation pour un Développement Durable et Inclusif », autour de divers forums thématiques, 140 délégués issus de 23 pays, dont plusieurs ministres, et Frances Pedro, la Directrice de l’Institut International de l’UNESCO pour l’Enseignement Supérieur en Amérique Latine et dans les Caraïbes. La conférence inaugurale était assurée par le Président de la République lui-même, Miguel Diaz-Canel, témoignant de l’intérêt majeur du pays pour l’enseignement supérieur et l’innovation.
En juin, s’ouvrait à la Havane le 2ème Congrès International Science et Education, réunissant quelques 1600 professionnels de 13 pays (en virtuel et présentiel) sous le slogan « Rechercher et innover, agenda 2030 ». Dans le but de consolider les partenariats stratégiques pour la formation des enseignants … 17 objectifs cohérents de développement durable ont été définis à l’issue de cette rencontre importante, au cours de laquelle la Ministre cubaine de l’Education Ana Elsa Velazquez Cobiella a insisté sur la promotion des échanges scientifiques et pédagogiques.

L’éducation est – notre site en fait souvent état - l’un des fleurons des choix politiques de Cuba depuis la Révolution ; cela à tous les niveaux, selon les 2 principes intangibles : la gratuité et l’accès pour tous, de l’école à l’Université.
Les crédits consacrés à l’enseignement approchent globalement les 10 % du PIB (à titre de comparaison ils sont de 6,5 % en France) dont près de la moitié vont à l’enseignement supérieur. Malgré des difficultés matérielles de tous ordres - auxquelles le blocus n’est pas étranger – ses établissements réunissent des conditions intellectuelles de formation de grande qualité, largement reconnues internationalement. Ainsi, l’Université de la Havane a intégré en 2020 le top 500 des meilleures universités du monde (classement QS 2021 World University Ranking) !
Quelques éléments marquants sur l’enseignement supérieur et la recherche à Cuba :
Dès 1976, Cuba s’est doté d’un Ministère de l’Enseignement Supérieur (MES). Il assure la tutelle des 22 universités pluridisciplinaires et travaille en coordination avec le Ministère de la Santé (MINSAP) à la tête de 16 facultés de médecine, avec le Ministère des Relations Extérieures (MINREX) qui gère l’Institut des Relations Internationales et avec le Ministère des Sciences, des Technologies et de l’Environnement (CITMA) en charge avec le MES des centres de recherche scientifiques.
En 1978, le gouvernement a mis en place une démarche d’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur dispensé, menée sur la base des objectifs de l’Agenda Educatif 2030 cubain. Ses résultats servent à l’accréditation des universités.
Dans ce cadre, il est intéressant d’observer que les critères humains de bien-être, de cohérence d’équipe et d’efficacité sociale figurent, au sein des 3 groupes mesurés – étudiants, professeurs, chercheurs – comme des indicateurs (parmi d’autres) de l’innovation économique sociale et managériale de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Pour autant, les universités cubaines manquent cruellement de moyens pour parvenir à leurs objectifs prioritaires, comme celui de doubler d’ici 2030 le nombre de doctorants, sachant qu’aujourd’hui un peu plus de 10 % seulement des enseignants chercheurs y sont titulaires d’un doctorat. D’où l’attention portée aux échanges et aux financements, nationaux et internationaux.
Cuba s’est dotée en 2014 d’un Fonds de Financement de la Science et de l’Innovation (FONCI) qui promeut la recherche et l’innovation dans le secteur public et privé. A ce jour, si l’essentiel de la recherche provient de fonds publics (80 %), il est à noter que 15 % sont issus d’entreprises, et 5 % de coopérations internationales.

• Une coopération internationale empreinte de valeurs et de vitalité…}}
  Les besoins de financement renforcent la pertinence de développer les partenariats avec d’autres pays. Mais ils ne sont pas la seule ni la première motivation.
  • Car, dans l’accueil chaque année de quelque 10 000 étudiants étrangers, il y a d’abord l’expression d’une solidarité internationale forte, sachant que plus des ¾ sont originaires d’Afrique Subsaharienne (Angola, Congo, Ethiopie, Zimbabwe) et que 14 % viennent d’autres pays d’Amérique Latine (Bolivie, Equateur, Nicaragua, Pérou…). De plus, Cuba a ouvert l’Ecole Latino-américaine de Médecine qui accueille aujourd’hui des milliers d’étudiants répartis dans différents cycles et universités. Ils sont issus principalement d’Afrique, d’Amérique Latine et des Caraïbes (55 pays au total). Le rayonnement international et solidaire de Cuba repose sur une politique de bourses d’études (pour les études de médecine surtout), octroyées par l’Etat.

• Les partenariats internationaux recouvrent une diversité d’autres domaines et d’autres pays :
• Des échanges qui transcendent le blocus US, puisque divers accords existent avec des universités et centres de recherche américains ; ils portent sur des échanges de connaissance, de formation d’enseignants et un consortium d’universités a même ouvert une antenne à la Havane !

• Des co-publications scientifiques avec l’Espagne, le Mexique, le Brésil, l’Allemagne et les Etats-Unis.

• Plusieurs pays européens ne sont pas en reste ; c’est le cas de la Belgique, très active dans ses relations avec les établissements d’enseignement supérieur cubains : financements de projets de coopération entre enseignants et d’équipements, octroi de bourses étudiantes… Entre 2003 et 2016, le programme s’est élevé à plus de 16 millions d’euros, essentiellement en faveur des Universités d’Oriente et de Santa Clara. Le Royaume-Uni, pour sa part, a ouvert depuis 2016 des places universitaires aux étudiants cubains.

…avec la France aussi

Le principal acteur de la coopération entre la France et Cuba est l’Université de la Havane, avec une collaboration très dynamique, engagée dès les années 1970 sous l’impulsion d’enseignants chercheurs de l’Université Paris, dans les domaines mathématiques. Les Facultés de Droit et de Physique Chimie – au sein de l’Université de la Havane- entretiennent également des relations soutenues avec des établissements français : au plan juridique, avec les universités de Nanterre, d’Aix-Marseille et l’IEP Grenoble ; dans les champs de la physique-chimie moléculaire, avec les Universités de Bordeaux, Toulouse, Lille, Orsay, le Havre, Besançon et les Antilles. Au total 20 doctorats y ont été soutenus.

En 2017, la France et Cuba ont signé un accord intergouvernemental pour créer le partenariat Hubert Curien « Carlos J. Finlay » en vue de renforcer leur coopération scientifique. A ce jour, 9 projets de recherche franco-cubains en ont découlé, sélectionnés sur des critères d’excellence.

Enfin, même si, en raison du coût de la vie, peu d’étudiants cubains peuvent venir se former en France, l’Ambassade de France, avec quelques universités, finance quelques formations de doctorants (principalement) ; 44 Cubains en ont bénéficié en 2019.

Au total en 2019, 87 Cubains sont venus étudier ou participer à un programme de recherche en France, certains sur fonds propres, d’autres ayant bénéficié d’aides financières (autres que ci-dessus).

Il s’agit là d’un aperçu très synthétique de cette autre dimension de la réalité cubaine et de son ouverture sur le monde. Dans les domaines de l’enseignement supérieur et de la recherche, les opportunités de coopérations internationales sont nombreuses et ne demandent qu’à se développer et se diversifier. Mais, avant tout, ce qui les rend possible, c’est le haut niveau de compétence scientifique de Cuba, utile au pays bien sûr, mais aussi à tous ceux qui souhaitent collaborer. A suivre donc…

Source des données : Plate-forme CurieXplore – fiche Cuba - 13/06/22