Les femmes à Cuba (II)

Entre « rôle » et « droits »

Partager cet article facebook linkedin email

Deuxième volet de notre de notre « pêche » dans la presse cubaine concernant les femmes à Cuba à l’occasion du 63ème anniversaire de la FMC, nous livrons ci-dessous un article d’opinion sur ce sujet traduit par Chantal Costerousse.
GD

De grands pas restent à franchir pour parvenir à l’égalité homme-femme.
Elle peut toujours s’inscrire dans les lois, les décrets, même si c’est déjà ça car tous les pays du monde n’en sont pas là et d’autres, comme le nôtre, ont avancé à petits pas au rythme des luttes des femmes.
Faut-il rappeler que les femmes n’ont pu exercer leur droit de vote en France qu’en 1947, et qu’il y a à peine 60 ans qu’elles ont pu ouvrir seule un compte en banque et travailler sans le consentement de leur mari ? 1965, ce n’est pas le moyen âge !
Cette égalité se gagne tous les jours, par le dialogue et surtout l’éducation dès le plus jeune âge.
A Cuba comme ici, il y a encore « du pain sur la planche » !

CC

Opinion

Tu cuisines et j’entretiens le jardin

Par Ana Maria Dominguez Cruz
Publié par Juventud Rebelde le 30 août 2023

Féministe, toi ? demandent-ils. Et le terme fait encore peur, surtout lorsqu’il s’agit d’un homme qui se reconnaît comme tel. Il partage, comme d’autres, une idéologie qui accorde des droits et des devoirs égaux aux hommes et aux femmes parce qu’il reconnaît que les femmes ont les mêmes capacités que les hommes.

J’insiste. Nous parlons de droits et non de rôles, car si nous avons progressé dans la réflexion collective au niveau mondial, la société a malheureusement peu évolué d’un point de vue socioculturel.

On trouve des femmes dans le monde du travail, de la politique, de la vie civique, de la culture et dans d’autres mais elles restent attachées à leur rôle dans la vie domestique qui, semble-t-il, n’est pas transférable.

L’émancipation ? Dans plus d’un cas, oui, mais sans se défaire de certaines attaches.

Notre pays se pense différent, aspire à être différent et 111 ans après la première impulsion du mouvement féministe ici (le précurseur de celui qui s’est développé plus tard en Amérique latine) nous devrions en tenir compte.

Aujourd’hui, la femme exerce son droit de vote, elle peut divorcer, elle peut occuper des postes de direction et des postes politiques dans le cadre de son travail, elle peut diriger sa famille et ce sont là des faits que nous considérons comme quotidiens ou banals mais ils sont dus à ces femmes qui, en 1912, se sont dressées contre l’inégalité et les canons hégémoniques de la masculinité.

Elles furent incomprises, étiquetées comme lesbiennes (comme si l’idéologie déterminait l’orientation sexuelle), elles ont pourtant créé à la Havane le Parti national des femmes, le Parti des suffragettes cubaines et le Parti populaire féministe pour faire valoir leurs droits dans une société qui, comme nous le savons, continue d’être encore patriarcale et machiste.

Vivre dans une société plus juste, plus équitable et moins traumatisante implique, entre autres questions de respecter cette lutte féministe qui a toujours été basée sur l’union parce qu’elle a rassemblé des travailleuses, des enseignantes, des avocates, des infirmières et aussi des hommes comme Julio Antonio Mella, Rubén Martínez Villena, Juan Marinello, Miguel de Carrión et Carlos Lobeira.

L’histoire est enseignée et les actions menées par la Fédération des femmes cubaines sont reconnues comme des jalons mais nous avons besoin de plus que cela.

Il est nécessaire dans la Cuba d’aujourd’hui de bannir, chez les hommes comme chez les femmes, l’idéologie contraire au féminisme, c’est-à-dire l’idéologie qui reproduit les schémas familiaux classiques qui, dans de nombreux cas, encouragent la violence fondée sur l’inégalité et l’injustice.

Persistent le rose pour les filles et le bleu pour les garçons, les jeux de cuisine pour les filles et les soldats de plomb pour les garçons, le commandement "tu dois toujours être coiffée et délicate" et "les hommes ne pleurent pas" et puis, devant le miroir, quel autre enseignement pourrions-nous donner à nos enfants et petits-enfants si c’est ce que nous avons appris ?

J’applaudis les lois et leur mise en œuvre correcte, qui constituent en soi un grand pas en avant.

Cependant, elles ne suffiront pas à effacer les préjugés, les phobies et les concepts ambigus. C’est à chacun d’entre nous, hommes et femmes de le faire dans la mesure du possible.

Assez de beautés féminines stylisées et vêtues de bikinis dans l’audiovisuel et d’hommes rudes et "performants" qu’elles supplient.

Le féminisme ne se trouve pas dans une boîte de conserve et ne s’injecte pas dans les veines. Il s’apprend dans la vie de tous les jours. Si le terme vous effraie, considérez-vous comme un anti-macho ou comme un défenseur de l’équité et de la justice.

Un homme ne peut-il pas cuisiner et moi entretenir un jardin ?. L’exemple est extrêmement simpliste, mais j’espère qu’il est parlant.