Patrimoine : la plantation de café "La Isabelica"
Témoignage de l’empreinte française, une des plantations les mieux conservées sur l’île.
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Le café a commencé à être cultivé à la fin du XVIIème siècle à Cuba. Après la révolution haïtienne de 1791, des milliers de colons français sont venus s’établir dans la zone de la Gran Piedra à Santiago de Cuba accompagnés de leurs esclaves. C’est ici que plus de 171 haciendas franco-haïtiennes réservées à la culture du café ont été construites. Il en reste aujourd’hui encore de nombreuses ruines.
La plantation de café La Isabelica est l’une des mieux conservées sur l’île. Située au kilomètre 14 sur la route de la Gran Piedra, elle se trouve à deux pas du parc naturel éponyme et du Mirador naturel, énorme bloc de pierre haut de 1234 mètres et pesant plus de 75000 tonnes.
Une hacienda musée
En plus de la maison seigneuriale, on peut visiter les séchoirs à café ainsi que les barracone, anciens baraquements des esclaves. L’architecture des lieux donne l’impression que le temps s’est arrêté ici. L’hacienda, construite par Victor Constantin Rousseau (un français fuyant Haïti), a été convertie en musée en 1961 à l’aide du chercheur Fernando Boyel Jambú.
La légende raconte que Rousseau serait tombé amoureux d’une esclave métisse du doux nom de María Isabel. C’est pour lui rendre hommage qu’il aurait donné son nom à la plantation de café (bien qu’il ne lui ait jamais rendu la liberté). Un portrait de Rousseau trône encore dans le salon de la résidence principale.
La demeure, construite à 1150 mètres au-dessus du niveau de la mer, se compose de deux étages. À l’origine, l’étage supérieur était destiné au logement alors que le rez-de-chaussée servait d’entrepôt pour le café. Le propriétaire se relaxait sur son balcon de bois et de pierre sous sa toiture en zinc. En face de la maison, on pouvait voir de longues esplanades de ciment où séchait le café.
La Isabelica avait une superficie de 130 hectares. On y trouvait 30 esclaves à temps plein. Quand la période des récoltes arrivait, Rousseau empruntait de la main d’œuvre aux cultivateurs de canne à sucre. A l’arrière des bâtisses, on pouvait apercevoir un trapiche (moulin) et les baraquements des esclaves dissimulés entre les arbustes.
Les propriétaires semblaient avoir honte des conditions de vie inhumaines imposées à leurs esclaves. C’est pourquoi les barracones étaient installés loin de la vue des maîtres mais gardés par un personnel de confiance. Aujourd’hui, La Isabelica est une étape cubaine importante de La route de l’esclave (projet de réhabilitation de la mémoire des esclaves).
La restauration de La Isabelica
Avant qu’elle ne soit convertie en musée, la demeure a été restaurée plusieurs fois. Toutes ses pièces ont été transformées en salles d’exposition où l’on peut y voir un piano, des meubles d’époque, des objets utilisés dans les plantations par les esclaves, une horloge solaire, la tahona (extracteur de café) et la cloche qui réveillait la demeure le matin.
Pendant la visite, on apprend les différentes techniques de traitement du café : le séchage, le battage (décorticage) et même la construction des aqueducs, chemins, séchoirs, moulins et fours nécessaires à la fabrication du café. L’UNESCO a décidé de mettre en avant la valeur historique des lieux en inscrivant la plantation au patrimoine mondial de l’humanité le 19 novembre 2000 sous la dénomination : site culturel et paysage archéologique des premières plantations de café du sud-est de Cuba.
L’UNESCO a précisé que les restes des plantations de café du XIXème siècle et du début du XXème dans l’est cubain sont un témoignage unique de l’exploitation agricole des forêts vierges qui ont disparu depuis. Ces plantations ont créé un paysage culturel unique illustrant une étape importante dans le développement de cette agriculture.
La Isabelica est un réel témoignage de l’empreinte française sur l’archipel cubain. Les colons de l’ancienne Saint-Domingue ont apporté leurs us et coutumes pour créer ce qu’est aujourd’hui le peuple cubain. Dans les ruines de La Isabelica, comme dans les haciendas de Santa Sofia et de Kentucky, on sent encore l’arôme du café si particulier produit à Cuba