Projet SDA à Cienfuegos

conduit par Cuba Coopération France et soutenu par le SIAAP (2èmepartie)

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Dans le premier article paru lundi 2 août nous vous avons présenté le Pourquoi du projet et les engagements de Cuba Coopération et du SIAAP dans la coopération avec une équipe d’ingénieurs de l’INRH et l’EAA en liaison avec les ministères concernés, la méthodologie proposée et les premiers « outils » fournis, ainsi que la 1ère phase d’étude.
Vous trouverez dans cette dernière partie les mesures et études faites sur le terrain, les propositions de traitement et enfin les recommandations émises par la partie française ainsi qu’un premier regard sur la poursuite des travaux en 2021.
PL

Mise en place de mesures de terrain sur les réseaux des eaux résiduaires
Dès l’origine du projet de coopération, il était prévu que l’EAA serait dotée de matériels permettant de conduire le diagnostic du système d’assainissement et que les agents seraient formés à l’utilisation des instruments de mesures de terrain.

C’est ainsi que 2 campagnes de mesures de débit en réseaux et de mesures de la pollution ont été réalisées en 2017 et en 2019 ;
Ces mesures ont permis de constater que :

La consommation d’eau est de l’ordre de 50 litres par jour et par habitant
Les réseaux d’eaux usées et les réseaux de pluviales sont interconnectés, plusieurs points de communication ont pu être détectés.
Les pollutions ont pu être quantifiées et corroborées aux nombres d’habitants.

Définitions des traitements

Schéma d’assainissement de Cienfuegos.

Actuellement :

La population raccordée aux égouts est de 70 %
La population avec fosses septiques : 20%

En ce qui concerne les techniques d’épuration, 3 systèmes existent  :

1 – pour la partie centrale de la ville : une conduite qui refoule les eaux usées dans la baie
2 – 4 zones périphériques qui utilisent un système par lagunage
3 – des fosses septiques

30 % des habitants ne sont pas raccordés à un centre de traitement, ils utilisent des fosses septiques individuelles ou collectives, certains quartiers n’ont aucun système d’assainissement, et rejettent dans les rios ou dans les fossés.

État d’un rio déversant dans la baie.

Les centres de traitement par lagunage sont tous à réhabiliter ;

Junco Sur, seul centre opérationnel collecte 13 000 habitants
Pueblo Griffo, hors service, collecte 10 000 habitants
Pastorita, hors service, collecte 5 000 habitants
La Espéranza, hors service, collecte 2 000 habitants

L’émissaire sous marin qui rejette directement les eaux usées dans la baie collecte 53 000 habitants (vieille ville).
Le quartier de Punta Gorda très touristique ne bénéficie d’aucun réseau et cinq stations de pompages dont 2 seulement (Reina et Junco Sur), sont opérationnelles, mais restent vétustes.

Trois propositions ont été faites
Éléments du système de traitement pour la Variante n° 1.

Réutilisation des lagunes d’oxydation existantes, après la réhabilitation de celles qui en auraient besoin, et de l’émissaire sous-marin.
Budget pour la variante 1 : 5 000 000 €

Éléments du système de traitement pour la variante n°2

Construction d’une station d’épuration (STEP), La technologie proposée est celle du lit bactérien rempli avec des bobines plastiques.
La STEP serait construite au bout du collecteur de Junco Sur. À la sortie de la station, les eaux passeraient dans les lagunes d’oxydation existantes, qui ne seraient pas modifiées.
Budget pour la variante 2 : 18 000 000 €

Éléments du système de traitement pour la variante n°3

Construction d’une station d’épuration à la Reina, et transformation des lagunes de JUNCO SUR avec un système d’aération pour le traitement de l’azote.
Budget pour la variante 3 : 9 000 000 €

Projet variante 3

À ces budgets s’ajoutent les coûts de modifications et/ou réhabilitations des collecteurs des réseaux d’eaux résiduaires et pluviales ainsi que ceux des stations de pompages qui sont toutes à réhabiliter et une à construire pour le nouveau réseau de Punta Gorda.

La Délégation provinciale de l’INRH et l’entreprise exploitante EAA ont retenu la variante qui propose la construction d’une STEP à Reina, d’une autre à Junco Sur et un système par lagunage à San Lázaro.

Recommandations pour un schéma directeur révisé.


À l’issue de ces travaux, la partie française émet les recommandations suivantes :

  • 1) Intégrer les impacts du dérèglement climatique sur l’élévation du niveau de la mer.
    En effet la fonte des pôles et des glaces du Groenland s’accélère au-delà de ce qu’attendaient les chercheurs et les effets sur l’élévation des eaux pourraient s’accélérer et se faire sentir de manière sensible dès le milieu du siècle.
    Les réseaux d’eaux pluviales ont leurs débouchés dans des zones plates et l’élévation du niveau d’eau dans la baie pourrait modifier les conditions aval d’écoulement des eaux. Il est donc conseillé de reprendre les simulations hydrauliques dans ces conditions. La partie basse de la ville autour de La Reina pourrait être sérieusement impactée.
    Pour ces mêmes raisons, il n’est pas recommandé de construire une station d’épuration à La Reina car elle sera en zone inondable.
  • 2) Compte tenu du risque d’eutrophisation, le traitement complet de l’azote (dénitrification) est recommandé. À ce titre la variante 2 est celle qui remplit le mieux cet objectif  ;
  • 3) Les propositions de la variante 2 concernant les réseaux ont la préférence de la partie française. Elles présentent les avantages suivants : soulagement des collecteurs Nord Sud. Ce sont des solutions plus résilientes au regard de la hausse du niveau de la mer ;
  • 4) Réviser les calculs de dimensionnement des ouvrages avec des consommations d’eau par habitant ramenée à 150 L/hab/j avec un coefficient de pointe de 3 ;
  • 5) Élaborer un plan complet et méthodique de désobstruction des conduites d’assainissement de la partie basse de la vieille ville. Une fois ce travail fait, ou en parallèle, faire une inspection caméra systématique et procéder aux remplacements des canalisations cassées ou non débouchables ;
  • 6) Rétablir en priorité l’écoulement principal vers La Reina ;
  • 7) Sur le collecteur des eaux pluviales qui a son débouché dans la baie, construire un ouvrage de reprise du flot de temps sec pour conduire ces eaux à La Reina et supprimer le déversement de temps sec dans la baie. Cela réduira la pollution de cette zone de la baie à proximité du Malecon (promenade de front de mer) ;
  • 8) Désobstruer le réseau d’eaux pluviales et installer des grilles sur les avaloirs ;
  • 9) Élaborer en parallèle le schéma directeur d’eau potable et mettre en œuvre les mesures prioritaires ;
  • 10) Concevoir une mise en œuvre par phase des installations de traitement du schéma directeur ou concevoir la station d’épuration avec des tranches séparées.
    Ce point sera à ajuster en fonction du planning de réhabilitation du système de collecte. Aujourd’hui 80 à 85% des eaux usées de la ville historique ne parviennent pas à la Reina.
    S’il apparaît qu’il sera long d’atteindre 100 % de la collecte, alors, faire évoluer les capacités de traitement en fonction de l’avancement des travaux sera peut-être intéressant.
    C’est aussi vrai par rapport au bénéfice escompté du schéma directeur d’eau potable qui devrait avoir un impact sur les volumes à traiter. Cette démarche permettra d’avoir de la souplesse dans la mise en service des installations de traitement et sera bénéfique pour les performances épuratoires.
    Une construction avec des tranches physiquement séparées permettra également d’offrir des possibilités de gestion intéressantes pour les travaux de maintenance.
    On peut recommander que cette station d’épuration soit construite en 2 tranches.
  • 11) Au regard des enjeux énergétiques il serait intéressant d’envisager une digestion anaérobie des boues incluant les matières de vidange des fosses septiques.
    Le biogaz produit pourra être utilisé pour la production d’électricité.
    Par ailleurs si à plus long terme la ville de Cienfuegos envisage un incinérateur des ordures ménagères, nous recommandons que celui-ci soit mitoyen de la station d’épuration pour y brûler les boues et augmenter la production de chaleur pour produire de l’électricité.

En conclusion, c’est un travail considérable qui a été réalisé par les équipes de l’INRH et de l’EAA.

Nous avons grandement apprécié, tout au long de ces 5 années d’études, la qualité professionnelle des ingénieurs et techniciens, leur investissement de chaque instant, et notamment celui de Fermin Montalvo Colarte (EAA), la mémoire des services, et celui de Marinée Caraballo Cuervo (EAA), ingénieure spécialiste et rédactrice du dossier

De gauche à droite : - Claudio Canello : traducteur - Fermin : Montalvo Colarte ingénieur EAA - Alain Renard : Cuba Coopération France - Pablo Fuentes Chaviano : directeur de la délégation provinciale de l’INRH - Marinée : Caraballo Cuervo ingénieure spécialiste EAA

Notre suivi en 2021 . . .

Après une année 2020 particulièrement dense, puisque les donations se sont montées à plus de 310 000€, et ce, malgré les conditions sanitaires que nous connaissons, des difficultés de transport mais également à cause du blocus toujours en vigueur, l’année 2021 a déjà fait l’objet de demande d’autorisation d’importation pour la fourniture de pièces de rechange pour les dégrilleurs de Caballero et de matériels de laboratoire pour l’ENAST.

Au total ce sera près de 240 000 € de donation pour 2021.
À noter qu’au cours du premier trimestre, 2 chargements sont arrivés à Cuba pour compléter le programme 2020 :

Panneaux solaires, pompe eau potable, réservoir tampon de 25 m3 et matériels de chloration pour la Gran Piedra
Le dégrilleur de Florés

Et à suivre  : matériels pour la maintenance de détecteurs de gaz qui devraient partir dans les jours à venir.