Santiago, à toute vitesse

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Non, aucun TGV à l’horizon pour relier Santiago de Cuba au reste de l’Île ! L’expression métaphorique « a todo tren » est utilisée de manière appropriée et avec humour dans le titre de l’article puisqu’il s’agit de réparer des trains et de les remettre en service le plus vite possible « à toute vitesse », dans un grand atelier de maintenance ferroviaire de la province de Santiago. Le jeu de mots perd tout son sel car l’expression n’a pas d’équivalent littéral en français mais cela n’enlève rien aux efforts admirables des techniciens ferroviaires cubains pour contrer rapidement les effets dévastateurs du blocus revanchard imposé par les États-Unis depuis six décennies, en attendant l’aide de la France.
PH

À toute vitesse dans la réhabilitation des chemins de fer

Article d’Eduardo Palomares Calderón, Granma, 28 mars 2023

L’atelier de San Luis est inclus dans la stratégie de réhabilitation des chemins de fer et sa contribution s’avère inestimable dans la création de ferrobus et dans la réparation des locomotives.

San Luis, Santiago de Cuba. Fidèle à la tradition qui le maintient en première ligne pour la réhabilitation de ce secteur, l’atelier ferroviaire de cette commune de la province de Santiago avance dans la recherche de solutions alternatives qui, face à la conjoncture actuelle, permettraient d’améliorer l’infrastructure et les moyens de transports ferroviaires des marchandises et des passagers de la nation.

Cet état d’ esprit, qui, au milieu de ce qu’on a appelé la Période Spéciale, a distingué ce collectif dans la réhabilitation de voitures de passagers et d’autres équipements, est celui qui prévaut actuellement, alors que le pays lui a confié la réparation des moyens de traction et de transport de marchandises, ainsi que la transformation des omnibus Diana en ferrobus pour les zones rurales.

Marcia María Sierra Gómez, directrice de l’unité qui fait partie de l’Entreprise de Réparation des Équipements Ferroviaires, explique qu’il s’agit d’une stratégie aussi viable que nécessaire, car, même si leur prix élevé nous interdit aujourd’hui d’acheter des locomotives, il en existe de nombreuses qui sont à l’arrêt et qui, grâce à un investissement bien moindre et grâce aussi à l’application de la science et de l’innovation technologique, peuvent être remises en service.

Pour accomplir cette mission” -ajoute-t-elle- “nous disposons d’un centre consacré à la réparation générale, moyenne et légère des locomotives, des conteneurs, des wagons de transport standard, des plateformes pour les conteneurs et d’autres moyens de traction et, également, d’un autre centre destiné à la transformation des bus en ferrobus et à la réparation du train de secours technique équipé d’une grue - utilisée pour les déraillements- et des wagons plateformes.”

L’existence d’un projet avec une agence étrangère (1) pour la modernisation des ateliers ferroviaires de Ciénaga et de Luyanó (La Havane) est bien connue – a-t-elle précisé- et le nôtre est prévu pour le début de cette année. Mais loin de rester les bras croisés, dans l’attente de la nouvelle technologie, nous avons continué de remettre en état de marche les équipements, avec les ressources et l’infrastructure dont nous disposons.

LA QUALITÉ À L’ ÉPREUVE

La preuve en est ce centre de réparation des locomotives où Charles García Martínez, son chef depuis 23 ans, a lancé cette proposition : “Notez le numéro 53529, c’est celui de cette machine avec le moteur à moitié réparé et à laquelle il manque les moteurs de traction des roues. Dans moins d’un mois, vous la verrez rouler à travers Cuba en tête d’un train de passagers.”

Ses paroles sont ratifiées par des techniciens expérimentés et des jeunes qui reçoivent, pour leur réparation générale, ces masses de fer, dont l’exploitation intensive, l’exposition constante aux aléas climatiques et, dans certains cas, y compris la conduite erronée par leur contingent de chauffeurs, ont fini par les amener à un haut degré de détérioration technique et esthétique.

Sous les immenses hangars, on procède au démontage total ou de la plupart des pièces et des accessoires, car, même si environ 80% des composants pourraient demander à être remplacés, environ 30% de ceux que l’on change le sont avec des pièces de récupération, y compris le moteur de traction, les paires de roues, les amortisseurs et les manchons des freins.

Ici” - affirme García Martínez- “nous ne nous sommes jamais interrompus. Les équipements doivent sortir comme neufs en ce qui concerne leurs parties mécaniques, électriques et électroniques -dans le cas des locomotives chinoises-, avec la peinture en général et leurs logos, et avec une qualité telle que, même si les fabricants ne leur pronostiquent pas plus de 20 ans de longévité, nous autres, nous en maintenons quelques-unes en état, comme la GM-900, qui est toujours en service avec ses 70 ans”.

La modernisation de l’atelier permettra une meilleure application de la science et de la technique dans la transformation des ferrobus - Photo : Eduardo Palomares

Dans la cour du centre, après une réparation légère, on trouvait également la machine 52568, prête pour le départ, et d’autres attendaient leur maintenance ou d’autres interventions plus complexes, sous la responsabilité des 25 hommes du centre. Aux dires de leur chef, sans leurs connaissances, sans leur expérience et leur obstination pour palier le manque de ressources, il n’y aurait pas d’atelier.

D’autre part, en ce qui concerne les wagons et les plateformes, plusieurs équipements bénéficiaient d’actions de restauration sur leurs toits, leurs parois et leurs planchers, tandis que deux conteneurs flambant neufs, terminés en décembre, attendaient leur paiement de la part des Chemins de Fer de La Havane.

VOIX LIBRE POUR LE FERROBUS

Qualifiée d’alternative significative pour le transport des passagers dans les zones rurales, la fabrication de ferrobus occupe une place prioritaire dans les espaces restant du centre, dont les hangars, avec trois chaînes de travail chacun, permettent de travailler simultanément, aussi bien sur la carrosserie que sur la partie technique de véhicules qui étaient précédemment les omnibus Diana.

Ces moyens de transport permettent d’économiser des milliers de pesos en monnaie librement convertible. Les deux premiers desservent aujourd’hui des routes compliquées dans les communes de Palma de Soriano et de San Luis dans la province de Santiago. Ensuite, cinq autres ont été livrés à la province d’Holguín et un sixième, destiné à cette belle province, attend juste sa centrale radio pour la communication ferroviaire.

Comme un bon exemple de l’application de la science et de l’innovation technologique à laquelle a appelé la direction du pays, le projet incombe au collectif technique composé de Flora Eugenia Balanzó Paumier, Rodolfo García Martínez, Gustavo Torres Franco y Luis Enrique Girón Barriel et piloté par le Docteur en Sciences Omar Guillermo Pérez Rodríguez.

Pour aller dans ce sens, Pérez Rodríguez affirme que “cette transformation s’avère beaucoup plus difficile que la réparation générale d’un véhicule motorisé de série, car elle suppose la suppression, dans l’omnibus, d’un pourcentage significatif de pièces et de composants de la partie automotrice, qui seront remplacées par d’autres de nature ferroviaire.”

En toute logique, on remplace les pneumatiques avec leurs essieux et leurs fixations par des paires de roues ferroviaires en acier et on applique un processus similaire pour le système de freinage, qui comprend l’adaptation de ce que l’on appelle frein « avec sablière », exigé pour les systèmes de traction et il a précisé qu’en revanche on conserve le moteur, la boite de vitesse et le différentiel des autobus.

En ce qui les concerne, les roues ferroviaires exigent d’agrandir les garde-boues, de changer les amortisseurs et de modifier les marches d’accès à la porte avant. En outre, il faut remplacer les pare-chocs des Dianas par des pare-chocs de train, doter chaque voiture de phares et de klaxons de circulation ferroviaire, refaire la peinture, ajouter la raison sociale et d’autres éléments qui identifient leur nouvelle destination.

Actuellement, dans les hangars, on trouve le nouveau ferrobus d’Holguín et, pour la province de Santiago, un qui est bien avancé et un autre en cours de transformation pour la commune de Songo-La Maya, un autre pour Palma Soriano et deux pour San Luis. Ils conservent tous leurs 30 sièges d’origine et en ce qui concerne le transport de marchandises, Holguín a demandé une remorque pour distribuer le panier familial de base dans les endroits difficiles d’accès pour les camions.

Marcia María Sierra a affirmé que le personnel se prépare pour que, grâce à la modernisation technologique tellement désirée de l’atelier, ces procédures techniques et d’autres nouvelles qui seront mises en place pour prendre en charge les locomotives de tout le pays, la construction des ferrobus et la réhabilitation du reste des équipements puissent se dérouler avec une plus grande spécialisation et qualité et dans des délais plus courts qu’actuellement.

(1) française, plus précisément (NdT)