Tirer le meilleur parti de la terre, de ses fruits et même des pelures : ça marche pour Pedro

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Pedro a fait visiter ses deux hectares et demi de terre, utilisés à 100%, à Granma, parce que ses stratégies valent la peine d’être racontées, et que les résultats qu’il obtient ne sont plus de simples chiffres lorsqu’ils se traduisent par des aliments destinés à 26 centres de consommation sociale de la municipalité de Playa, à La Havane

Auteur : [Gladys Leidys Ramos]

Pas de simples chiffres, mais des aliments pour la population de l’Ile !

Ferme intégrale MINCTOY à la double excellence nationale et située un peu plus loin que le Reparto Barbosa.
Photo Ricardo Lopez Hevia

Personne ne croirait, sans le voir, que quelque part dans la commune havanaise de Playa, sur un terrain pas aussi grand que les fruits qu’il donne, gaspiller un millimètre de terre est considéré comme une hérésie et être vraiment efficace, ce n’est pas qu’un slogan. En témoignent les résultats des six ou sept hommes qui y travaillent, y compris de Caramelo et Rosado, les deux bœufs qui, faute de tracteur, font leur part pour labourer la terre.

Pedro Valdés Pérez, propriétaire de la ferme intégrale Minctoy, avec une double excellence nationale et située un peu plus loin que le Reparto Barbosa, est vétérinaire de profession, mais il a hérité son lien avec la terre de son père, et celui-ci de son père. La tradition paysanne coule dans ses veines comme l’eau dans les sillons où il place tous ses efforts, même s’il lui en coûte en ingéniosité et, parfois, lui apporte quelque contrariété.

Pedro a fait visiter récemment ses deux hectares et demi de terre, utilisés à 100%, à Granma, parce que ses stratégies valent la peine d’être racontées, et que les résultats qu’il obtient ne sont plus de simples chiffres lorsqu’ils se traduisent en légumes, fruits et aliments destinés à 26 centres de consommation sociale de cette municipalité, dont des foyers pour enfants sans soutien familial, des maternités, des jardins d’enfants et des foyers pour personnes âgées, ainsi que plusieurs points de vente.

A la ferme de Pedro Valdes Perez, on ne gaspille rien, même les pelures de fruits qui sont utilisés pour fabriquer des aliments pour animaux.
Photo Ricardo Lopez Hevia

Le blocus économique, le manque d’engrais, le besoin de technologie et même les nombreux obstacles qui subsistent dans toute la chaîne agricole sont une réalité, mais rien de tout cela n’arrête un entrepreneur comme Pedro Valdés Pérez.

D’après Yoel Barreto Rodriguez, président de la coopérative Aristides Estévez – à laquelle Pedro est associé – la ferme Minctoy dépasse les paramètres du plan de l’année, et ces calculs ne vont que jusqu’en septembre.

Il a indiqué, par exemple, que la coopérative a réussi à livrer près du double de la quantité prévue de racines comestibles et de légumes, et elle a également fourni plus d’une tonne et demie de fruits au-delà du contrat signé. 

Pedro a fait visiter ses deux hectares et demi utilisés à 100 % !
Photo Ricardo Lopez Hevia

Les clés, dit modestement Pedro, c’est d’avoir la culture et la volonté de ne pas laisser un petit bout de terre sans le cultiver. Faute d’engrais, non seulement il ramasse les excréments de ses animaux, mais il va même jusqu’à nettoyer la ferme avicole étatique qui jouxte sa propriété afin d’utiliser ces déchets pour fabriquer son compost. « De là provient une matière organique de luxe », dit-il avec satisfaction.

PEDRO S’OCCUPE AUSSI DE « LA TERNURA »

Ici, on ne peut rien jeter, tous ces déchets doivent être valorisés, répète-t-il, car il est conscient que cela fait une différence, même s’il s’agit d’une livre de viande supplémentaire, dit Pedro.

« La plupart des gens épluchent un fruit et jettent la peau, mais pas moi. Je traite ces déchets, puis je les mélange avec 20 à 25 % de céréales et j’alimente mes animaux. C’est une solution parfaite pour réduire la consommation d’aliments pour animaux, que l’on trouve rarement, et en monnaie librement convertible (MLC). Avec ce produit, le bétail reçoit les vitamines et les protéines dont il a besoin », explique-t-il.

Six ou sept hommes travaillent sur cette ferme de la municipalité havanaise de Playa.
Photo Ricardo Lopez Hevia

Le bruit de la machine artisanale qui broie ces écorces doit être aussi bien un soulagement pour le portefeuille de Pedro qu’une sorte de musique aux oreilles des porcs. Il les élève, ainsi qu’une vingtaine de vaches et dix veaux, à La Ternura, une ferme dont il est usufruitier depuis plus de 12 ans.

« Nous passons notre vie à justifier que nous ne pouvons pas faire ceci ou cela à cause du blocus, mais le blocus ne m’empêche pas d’inventer des choses comme celle-là », dit-il.

Et c’est pourquoi il a atteint les 0,18 kg de viande de petit bétail prévus pour cette année 2021 et le double pour ce qui est du gros bétail.

Il est également considéré comme le meilleur producteur de lait de la municipalité de Playa. Aux 3 120 litres qu’il devait livrer à l’Entreprise laitière, il a ajouté plus de 2 000 litres, et le décompte ne se termine pas là, car 2021 n’est pas encore fini.

Cependant, confie-t-il, il est l’un des nombreux producteurs qui n’a pas reçu son paiement en MLC de la part de l’Entreprise laitière. Il explique que la procédure de conciliation prend une journée entière et, selon lui, il est nécessaire que dans ce processus, l’entreprise établisse davantage de relation avec l’agriculteur et qu’elle change sa façon de traiter cette question.

À son avis, toutes les mesures qui sont prises pour stimuler la production agricole ont apporté de nombreux avantages, mais le chemin à parcourir est encore long et l’approche doit être respectée. Bien qu’il faille, comme il en bénéficie, le soutien des autorités du Parti et du gouvernement au niveau local.

Il reconnaît qu’il ne dispose pas de 134 hectares de terre et que sa contribution peut ne pas sembler si importante, mais il parvient à planter des avocats et à intercaler toute l’année du café pour ses ouvriers le matin et il tente de récupérer des arbres fruitiers qui ont presque disparu de la mémoire des Cubains, comme l’anone, la guanabana et le quenettier (mamoncillo). Il consacre également un espace aux cultures semi-protégées et installera bientôt une pépinière.

Pour l’instant, il ne lui reste peut-être plus qu’à perfectionner son travail, à surmonter telle ou telle difficulté externe.

Mais l’énorme défi du pays – nourrir toute la population – doit être atteint avec davantage de producteurs comme Pedro, qui se fixent des objectifs similaires aux siens, plus grands ou plus petits, peu importe, tant qu’il s’agit de tirer le maximum de fruits du sillon qu’ils labourent à la sueur de leur front.