Cuba : D’où l’on s’enfuit sans qu’il y ait empêchement et l’on obtient asile sans être poursuivi

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Le franc succès du Ballet Nacional de Cuba lors de sa récente performance à Porto Rico n’a pas fait l’objet d’une information internationale.

Mais ce qui l’a été, auprès de dizaines de chaines de télévisions, radios et journaux c’est l’abandon de huit de ses intégrants, à qui le Gouvernement des E.U a offert l’asile politique et qui ont immédiatement intégré le Cuban Classical Ballet of Miami, compagnie avec laquelle ils ont présenté leur premier spectacle, seulement 7 jours après !

La Ballet National de Cuba, un des plus grands viviers du monde !

Un article du site "lapupilainsomne" traduit par Llucia Perez-Caballero

Les ingrédients de cette cynique comédie sont les mêmes que d’habitude. Premièrement : des personnes qui n’ont jamais été poursuivies dans leur pays et dont la motivation migratoire est uniquement et exclusivement économique, obtiennent l’asile « politique ». « Je n’ai aucune crainte, parce que je n’ai pas fait ça pour des raisons politiques, je suis artiste », assurait devant les caméras l’une des danseuses.

Deuxièmement, aucune de ces danseuses n’avait à Cuba d’obstacle légal pour voyager aux E.U lorsqu’elle le souhaitait, sous réserve d’avoir obtenu le très restreint visa nord-américain. Troisièmement, ces personnes bénéficient de la loi appelée Loi d’Ajustement Cubain, qui leur permet d’obtenir automatiquement la résidence par le seul fait d’être cubaines. En parallèle, les E.U déportent chaque jour plus de mille personnes sans-papiers, parmi lesquelles des professionnels de la dance, qui n’ont pas eu la chance d’être nées à Cuba.

Tout porte à croire que cette opération a été préparée depuis des mois entre la compagnie de ballet de Miami où ils travaillent actuellement et plusieurs médias. Le Canal 41 América Tevé de Miami, curieusement, a modifié ses pratiques habituelles et a envoyé à Porto Rico une équipe complète de télévision pour couvrir la présentation du Ballet National de Cuba. Ce qui les intéressait n’était pas, évidemment, d’informer du succès d’une compagnie formée par le « régime castriste », mais justement de couvrir en direct l’abandon des danseurs, qu’ils connaissaient déjà.

Les médias internationaux se sont eux aussi chargés de justifier ce jeu tordu. Le journal espagnol “El País” encensait les E.U comme étant la “terre des opportunités”, réellement, et non pas « de manière abstraite », après qu’ils eurent accueilli les danseurs. Il y laissait une grande place à l’organisateur de l’opération, Pedro Pablo Peña, directeur du Ballet Clásico Cubano de Miami, qui annonçait qu’il continuerait à mener à bien des opérations telles que celle-ci, « tant que Cuba ne serait pas réellement libre ».

L’agence espagnole EFE, laissait également un grand espace au message de propagande de ce personnage. « La fuite (des danseurs) (…) met en évidence « l’absolu mécontentement » des artistes face au régime (cubain) », l’on a pu lire dans une note de EFE reproduite dans de nombreux médias d’Amérique Latine.

Et cela s’explique lorsque l’on sait que cette agence d’information a signé une convention avec la Mairie de Miami, à travers laquelle elle s’engage à la « publication de (…) reportages (…) qui reflètent la réalisation du « rêve américain » dans cette ville ». Ainsi l’expliquait Tomás Pedro Regalado, Maire de Miami : “Le projet (de l’agence de EFE) de mettre en avant en Amérique Latine et dans le monde des personnes qui ont triomphé à Miami nous enorgueillit doublement, car nombre d’entre elles ne sont pas nées aux E.U et sont protagonistes du rêve américain ».

D’autres moyens digitaux, comme la BBC Mundo, étayaient ce même message, en assurant que « beaucoup de danseurs (…) de Cuba ont déserté (…) fréquemment pour des raisons politiques ». Un mensonge absolu, mais indispensable pour justifier l’aberration politique, légale et morale de ce cas et, en général, de la politique migratoire à double face du Gouvernement des E.U.

Mais s’il y a un média champion du cynisme c’est le journal « El País ». Dans un autre article sur ce cas, ils racontaient qu’une « erreur bureaucratique » avait permis qu’un neuvième danseur s’enfuie également aux E.U, en « trompant la norme officielle » (dixit).

Ce qui conduit à penser que ce danseur avait jonglé avec les interdictions de voyager imposées par les autorités de l’Ile. Mais rien n’est plus éloigné de la réalité. Ce danseur avait été écarté à la dernière minute pour aller à Porto-Rico, mais ayant déjà obtenu le visa étasunien, il en profita pour voyager par ses propres moyens vers les E.U. Personne à Cuba ne l’a empêché de sortir de l’Ile. Souvenons-nous, de plus, qu’il n’existe plus de « permis de sortie », nécessaire pour le faire. Mais El País ne pouvait renoncer au récit du mystère, et mettait en avant une « fuite » aux « accents héroïques » qui ouvrait au danseur « la porte de sa liberté ».

Le Ballet National de Cuba, symbole non seulement de son pays, mais aussi de l’Amérique Latine et du Tiers Monde, est l’objet permanent d’attaques à son image et à sa viabilité. Malgré tout, l’Ecole Nationale de Ballet de Cuba forme aujourd’hui 800 nouveaux professionnels de la danse, en étant un des plus grands viviers du monde, et la garantie de futur d’un des symboles culturels de la Révolution Cubaine.