L’Argentine du football c’est aussi …le Che Guevara. Hier comme aujourd’hui

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L’épopée du Mondial de foot mène à tout. A la victoire pour le meilleur (l’Allemagne, vainqueur de l’Argentine de Lionel Messi). Mais aussi à plein d’histoires de footeux, d’hier et d’aujourd’hui. Amateurs ou légendaires. Parmi les premiers, un certain Ernesto Guevara de la Serna, parmi les seconds le légendaire Alfredo Di Stéfano qui vient de mourir à l’âge de 88 ans, à Madrid. Les deux Argentins, de la même génération, se sont rencontrés et connus il y a bien longtemps, c’était en juillet 1952, à Bogota, capitale colombienne. Le jeune Ernesto, un inconnu, n’était pas encore le Che, Alfredo ne jouait pas encore au Real Madrid (1953-1964). Mais il était déjà une « figura » du foot latino-américain.
Par ailleurs, à contre-courant du football mondial, dans la province argentine de Córdoba, un club baptisé du nom du Comandante refuse de faire du business avec ses joueurs.
Quelques liens reviennent sur cette époque à Bogota et cette dernière histoire, comme à celle, éphémère du Comandante Mascherano, n°5 malheureux de la finale contre l’Allemagne.

L’Argentine du football c’est aussi…le Che Guevara. Hier comme  aujourd’hui   

Par Michel Porcheron

Mots-clés: Ernesto Guevara-Alberto Granado-Di Stéfano-Pedernera- Maradona-Mascherano-Messi-le Che Guevara Football Club

Ils sont tous les deux Argentins, l’un à 24 ans, c’est un inconnu, il se trouve en ce mois de juillet 1952 à Bogota en compagnie de son camarade de voyage, Alberto Granado.

En décembre 1951, Ernesto Guevara de la Serna, étudiant en médecine,  atteint d’asthme, s’était laissé entraîner par Granado, médecin, dans un projet aventureux : la traversée de l’Amérique latine à moto, une Norton, de leur pays natal jusqu’à la mer des  Caraïbes, en passant par le Chili, le Pérou, la Colombie et le Venezuela (jusqu’au 26 juillet 52). En moto, mais aussi en cargo, en camionnette, en petit bateau à moteur, à bord d’un radeau…Les deux amis se donnent quelques semaines, leur périple durera sept mois. Ernesto Guevara, de retour à Buenos Aires, obtient son diplôme de médecin en novembre 52.

Ernesto note ses impressions de voyage (à retrouver, entre autres, dans « Voyage à motocyclette », Ed. Mille et une nuit, 2003, texte intégral, 223 pages), Alberto noircit des carnets lui aussi. (« Sur la route avec Che Guevara »,Archipoche, 2005, 311 pages).Le jeune Guevara repartira en juillet 53 pour un second voyage en Amérique latine avec son ami Carlos Ferrer. 

Début juin 52, Guevara et Granado sont à la Léproserie de San Pablo, au Pérou, puis à bord du Mambo-Tango, un radeau, ils descendent l’Amazone jusqu’à Leticia, en Colombie (23 juin), où ils séjournent une semaine. Le 2 juillet, ils gagnent Bogota en avion.     

Dans une longue lettre du 6 juillet 1952, adressée à sa mère et datée de Bogota, Ernesto,  écrit notamment : « Je verrai demain le match Millonarios /Real Madrid, depuis la plus populaire des tribunes, car nos compatriotes sont plus difficiles à taper que des ministres ».

Texte intégral de la lettre en espagnol : http://www.lapastera.org.ar/spip.php?article611

L’autre Argentin c’est Alfredo Di Stéfano de l’équipe de la capitale …colombienne, los Millonarios, qui, à 26 ans, a déjà un palmarès de grande vedette du foot latino-américain. Champion d’Argentine avec River Plate en 1947, international argentin (vainqueur de la Copa América 1947) il quitte son pays avec d’autres joueurs argentins en 1948, à la suite d’un conflit professionnel qui dura six mois. Il signe aux Millonarios, une équipe formée de joueurs venus de toute l’Amérique latine. Il jouera quatre matchs avec la sélection colombienne [puis, naturalisé espagnol,   disputa sans succès les éliminatoires pour les Mondiaux 54 et 58 avec l'Espagne]

                  

Guevara et Granado que le premier appelait Pedernerita, étaient prêts à remuer ciel et terre pour voir jouer Di Stéfano et pourquoi pas le rencontrer. L’Argentin Adolfo Pedernera avait été l’homme-orchestre du River Plate avant de rejoindre lui aussi Los Millonarios.

                                   Le Real Madrid à La Havane  

Le Real Madrid est en tournée en Amérique latine depuis le 28 juin 52. Il va jouer en Colombie, au Venezuela et …à Cuba, deux matchs amicaux. Le 31 juillet, au Stadium de la Habana, le CD Marianao est battu par le Real (2-3) et le 4 août le Real écrase la Juventud Asturiana 8 à 2, au Stadium del Cerro de la capitale.  

 

Voici quelques liens qui relatent à  Bogota la rencontre Ernesto Guevara et Alfredo Di Stéfano Laulhé, surnommé à l’époque « la Saeta rubia » (la Flèche blonde). Si les pages en espagnol sont nombreuses, les liens en français sont plutôt rares. 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Millonarios_F%C3%BAtbol_Club   (ébauche d’article)

Voir plutôt si vous lisez l’espagnol :

http://www.millonarios.com.co/sitio/?q=search/node/di%20stefano

http://futbolrebelde.blogspot.fr/2007/10/el-che-guevara-de-portero-comandante.html

http://ca-13.blogspot.fr/2012/07/la-maquina-del-tiempo-albiazul-el-dia.html

http://www.tiempo.hn/editorial/noticias/el-che-guevara-el-revolucionario-que-jugaba-al-futbol

Nicolas Harguindey, originaire d’Argentine, consacre un très bon texte : « La fois où Ernesto Guevara s’est improvisé entraîneur et autres anecdotes footeuses du Che », découvert sur le site lefooteur.com

http://lefooteur.com/2013/01/la-fois-ou-le-che-guevara-sest-improvise-entraineur-2-2/

                        

                                                 Di Stéfano, deuxième à gauche

Dans son récit de voyage, Alberto Granado en dit plus sur leurs aventures footballistiques à Bogota :  

« Je suis fou de joie. Nous voilà à Bogota, nous avons des pesos colombiens gagnés de la plus étrange façon- en tant qu’entraîneurs de football (…).Hier après-midi, en nous promenant dans le parc derrière la cité universitaire, nous sommes tombés sur un groupe de jeunes jouant au football. Nous nous sommes joints à eux et avons un peu joué — mais l'altitude m'a mis presque KO. J'avais du mal à courir sans m'essouffler (…) Nos partenaires de jeu étaient des ouvriers travaillant dans une usine toute proche. Nous avons parlé football et leur avons donné un aperçu des aventures que nous avions vécues depuis le début de notre périple. Ils riaient de bon cœur à certaines de nos anecdotes, tout en échangeant des regards qui semblaient demander s'il fallait croire à nos histoires.

Toujours en date du 3 juillet Granado poursuit : « Nous avons fait un saut jusqu’au club de football des Millonarios pour saluer quelques joueurs argentins. Nous avons rencontré Banegas, et lui avons laissé entendre que nous serions heureux d’assister au match qui les opposera dimanche au Real Madrid. Il a fait mine de ne pas comprendre (…) Le reste de la journée a été consacré à essayer d’obtenir un visa pour le Venezuela.

Bogota, 6 juillet 1952 : L'après-midi, nous sommes allés voir jouer le Millo­narios contre le Real Madrid. C'était un bon match, dans lequel la beauté du jeu sud-américain s'opposait à la puissance et à la technique du football européen, effi­cace à défaut d'être brillant. Du côté du Millonarios, Di Stéfano était inégalable et bien épaulé par Rossi, Pini, Baez et Cozzi. J'ai été particulièrement surpris par Mourin, qui n'a jamais montré en Argentine le talent dont il a fait preuve aujourd'hui.

Côté espagnol, la défense était impressionnante, pour ne rien dire du gardien de but, Alonso, qui bloqua très efficacement (mais pas très gracieusement) cinq tirs qui auraient dû entrer. J'ai aussi pu admirer Oliva, un milieu de terrain qui joue très en arrière, mais qui a un excel­lent contrôle de ballon, ainsi qu'un autre défenseur, Mutioz, vétéran de l'équipe nationale espagnole. Du côté des avants, Molowny, des îles Canaries, avait fière allure avec son style de jeu sud-américain, et Pahirio, de Galicie, qui, avec brio et courage, a plusieurs fois porté le danger dans le camp adverse.

C'était un match vraiment très plaisant. Il a tout à fait sa place dans la liste de mes matches préférés, qui ne sont pas nombreux, ni si rares que ça. (…)

Bogota, 8 juillet 1952 : Nous sommes restés toute la matinée avec Di Sté­fano, à parler de football, de médecine et enfin, des montagnes de Cordoba. Il nous a offert du maté ainsi que deux tickets pour le match de demain. L'après-midi a été consacré à obtenir des visas pour le Venezuela (…).

Bogota,  9 juillet 1952 : Aujourd'hui, nous n'avons pas chômé. Le matin, nous étions à l'université où nous étions conviés à disputer une partie de football. À 11 heures, nous sommes partis rejoindre le stade Campin, où se déroulait le second match Millonarios-Real Madrid. On aurait dit un clone du premier : grâce et virtuosité du côté sud-américain, étalage de puissance du côté espagnol (…)

Guevara et Granado sont à Cúcuta, ville frontalière de Colombie, les 12 et 13 juillet : l’après midi du 13, « nous avons écouté à la radio la retransmission du match entre l’équipe brésilienne de Botafogo et le Millonarios. Ce sont les Brésiliens qui ont gagné »  

Voici les détails des deux matchs vus par Guevara et Granado à Bogota, selon la presse de l’époque:

06 julio de 1952. Amistoso. En Bogotá (COL) (El Campín)

CD MILLONARIOS (COL) - REAL MADRID   2-1 (Arbitro:  Grill (Colombia)/Goles: 0-1 Olsen 17´, 1-1 Di Stéfano 60´, 1-2 Pedernera 85´)

CD Millonarios: Cozzi; Pini, Zuloaga, Ramírez, Rossi, Soria, Reyes, Pedernera, Di Stéfano, Báez, Mourín.

Real Madrid: J. Alonso; G. Alonso, Oliva, Navarro, Muñoz, Zárraga, Sobrado, Olsen, Pahiño, Molowny, Cabrera.

09 julio de 1952. TROFEO DE LA CANCILLERIA. En Bogotá (COL) (El Campín)

CD MILLONARIOS (COL) - REAL MADRID   1-0 (Arbitro:  Grill (Colombia)./ Goles: 1-0 Báez 52´).

CD Millonarios: Cozzi; Pini, Zuloaga (Setemberg 75´), Ramírez, Rossi, Soria, Reyes, Pedernera, Di Stéfano, Báez, Mourín.

Real Madrid: J. Alonso; Alonso II, Oliva (Hon 75´), Navarro; Muñoz (Zárraga 24´), Montalvo; Olmedo, Olsen, Pahiño, Molowny, Cabrera (Narro 29´, Sobrado 45´)

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                          « Comandante Mascherano »

Si Diego Maradona porte depuis longtemps à pleine peau sur le bras le Che Guevara, le « 5 » argentin de la finale, Javier Mascherano, héros national (mais malheureux pour le titre contre l’Allemagne) depuis la victoire en demi-finale du Mondial de foot contre les Pays-Bas, avait déchaîné les passions en Argentine, où une chanson parodiant celle sur Che Guevara lui a été consacrée, "Hasta siempre comandante Mascherano!". "Ici il reste la clarté / La profonde fermeté / De ta chère présence / Commandant Mascherano", dit le refrain, une adaptation libre du chant consacré au célèbre révolutionnaire argentin, né à Rosario, comme le joueur de Barcelone.    

http://www.lematin.ch/CM2014/insolites/hasta-siempre-comandante-mascherano/story/24230999

Sur Youtube, une vidéo de la chanson parodique, interprétée par les frères Lautaro et Guadalupe Passadore, avait été visionnée 20'000 fois seulement 48h après sa mise en ligne. La presse argentine a surnommé le milieu argentin "MasChe". Mais ça n’a pas suffi. Régulateur du milieu argentin, appelé aussi «El Jefecito», leader moral de l’Albiceleste, n’a pas fait de miracle. Le capitaine 4 fois Ballon d’Or Lionel Messi non plus.   

Un trucage photo a connu également un franc succès qui présente le milieu de terrain en mode Che Guevara. 

En 2011, recrue vedette de Manchester City, l’Argentin Sergio Agüero (entré contre l’Allemagne à la 46 e minute, en remplacement de Lavezzi) ne fit pas dans la demi-mesure devant les journalistes du Sun : « A chaque époque il y a une révolution complète dans le foot et quelqu'un doit être celui qui l'active. C'est moi (...) Je suis le Che Guevara du football moderne »…

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De son côté le site sofoot.com vient de republier un long entretien avec Di Stéfano, où il est beaucoup question de foot et un peu de ses rencontres avec Ernesto Guevara. Propos recueillis par Javier Prieto Santos 

http://www.sofoot.com/di-stefano-je-ne-suis-pas-un-heros-je-ne-suis-personne-186547.html

                       Au Che Guevara FC, qu’importe la victoire

Dans la province de Córdoba, à contre-courant du football mondial, un club baptisé du nom du Comandante refuse de faire du business avec ses joueurs.

Par Juan Pablo Meneses 

« La révolution est en marche. Et tous espèrent qu’elle sera victorieuse. C’est le calme avant la bataille, rompu par l’apparition d’un commando de guévaristes en culottes courtes. Ils sont 11 garçons, les bras levés, en baskets à crampons et maillot rouge à l’effigie du Che. Ils pénètrent sur la pelouse la mine sérieuse, concentrée, comme s’ils savaient que seules la discipline et la concentration leur permettront de dominer l’équipe adverse et de planter le ballon au fond des cages ennemies. Parents, frères et sœurs, amis, grands-parents, oncles et tantes et voisins saluent leur entrée aux cris de “Allez Che Guevara !”, “Vas-y, le Che !”, “Hasta la victoria siempre !”, ou encore “Guévaristes en finale !”

Et dans cette histoire, le Che, c’est une équipe de foot. Tous les week-ends, ses matchs sont des événements familiaux. Il n’y a qu’un seul et unique Che Guevara dans l’histoire du football mondial, et c’est ce club, où de jeunes Argentins évoluent dans plusieurs divisions.

Avant le coup de sifflet d’engagement, les proches déploient une grande banderole frappée du portrait d’Ernesto Guevara, tandis que sur le poste de radio retentit la chanson Hasta siempre, Comandante – un hymne au Che composé en 1965 par le Cubain Carlos Puebla [pour saluer le départ de Guevara de Cuba]. D’ici, en tout cas, de ces petits guévaristes désormais lancés à la poursuite du ballon sur ce terrain, il se peut qu’émerge la nouvelle étoile du foot latino-américain.

                      

Quatre joueurs du Che Guevara FC lors de la présentation du nouveau maillot du club, qui intègre le portrait de Che Guevara, en novembre 2013 - DR

L'important n'est pas de gagner

Mais le plus important, en tout cas pour la présidente du club, n’est pas là : l’important, c’est que de leurs rangs sortiront peut-être les nouveaux modèles du quartier, des acteurs du changement social, qui ouvriront la voie à la population pauvre de la ville de Jesús María. Au Guevara FC Club, on attend davantage que des stars : on attend l’homme nouveau. Jesús María se trouve dans la province de Córdoba, dans le centre-nord de l’Argentine, à 50 kilomètres au nord de la capitale provinciale. Mónica Nielsen vit dans un quartier résidentiel de Jesús María : c’est elle, la présidente du Club Social y Deportivo Che Guevara, fondé le 14 décembre 2006.

“Laissez-moi d’abord dire une chose. Nous, nous ne sacrifions pas un seul gamin sous prétexte de financer les activités de 200 autres. Nous n’allons pas vendre des joueurs pour de l’argent, lance-t-elle d’emblée. Nous allons à contre-courant de ce qui a corrompu le foot. Avec le nom illustre que nous portons, je ne peux pas me permettre de commencer à faire du business sur le dos des gamins.”

La présidente du Che Guevara sait qu’elle n’aura pas la tâche facile. Que la soif de gloire guette de toutes parts, en permanence. Elle le sait, car elle se souvient que les choses n’ont jamais été simples, et ce dès le début.

Aujourd’hui, le club compte 120 joueurs de 6 ans et plus, répartis sur 7 divisions. Et tout est gratuit : aucun d’eux ne débourse un peso. C’est cette cause qu’elle défend, insiste Mónica, dont l’enthousiasme est visible. Les jeunes footballeurs ont déjà été invités à jouer à l’étranger et le club fait des émules. La présidente sait qu’une bonne saison, avec des championnats et des victoires, ferait beaucoup pour sa cause. Mais elle sait aussi que, dans son club en tout cas, l’important n’est pas de gagner.

Solidarité

“C’est un club à vocation sociale, avant tout. Le gamin qui entre au Che Guevara FC sait qu’il sera toujours libre de partir pour un autre club. Les portes sont ouvertes, personne n’est prisonnier, chez nous. Nous affrontons des clubs qui tiennent leurs gamins en otage. Mais nous avons le courage de rencontrer des équipes qui ont un pouvoir d’achat supérieur au nôtre. Des équipes qui, elles, font du business avec leurs joueurs, qui encaissent des droits, qui vendent des jeunes. De notre championnat, ici, à Jesús María, sont sortis des footballeurs qui aujourd’hui évoluent au River ou au Boca [les deux grands clubs de Buenos Aires]. Et les gens trouvent normal que le gamin s’en aille, que le club touche de l’argent, que la famille touche de l’argent, que le gamin soit une marchandise. Un produit de plus sur le marché, dans cette société de consommation qui est la nôtre.”

 

          

Le Che Guevara FC a désormais un statut juridique, ses joueurs sont rattachés à la Ligue de football de la province de Córdoba et évoluent en Ligue régionale Colón. Depuis l’année dernière, ils participent aussi aux championnats des moins de 17 ans et des moins de 12 ans. Les joueurs s’entraînent sur le terrain de clubs qui, par amitié et par solidarité, leur ouvrent leurs installations.

“Vous vous rendez compte que le Che Guevara a un modèle qui va à contre-courant de tout ce qui se passe dans le football actuel, où la vente de jeunes joueurs semble être le business à la mode ?

— Bien sûr, mais je ne peux pas faire des affaires sur le dos des enfants, insiste Mónica Nielsen. Quand tu es guévariste, c’est à la vie à la mort : le guévarisme, c’est le sens du sacrifice.

— Et si vous tombez sur le nouveau Lionel Messi ?

— Si c’est un gamin qui sait tendre la main à ses semblables et à ceux qui suivent, cela se verra. Là est tout le défi. Ce petit saura s’il veut tendre la main au club, s’il veut rendre la solidarité qu’il a reçue de nous.”

Révolution

Nous sommes à quelques minutes de la mi-temps, et le Che Guevara FC a encaissé 2 buts. Mais cela n’entame en rien l’allant des jeunes joueurs, ni de leur famille, ni de cette présidente de club qui refuse de vendre ses footballeurs. En France, il y a un parfum baptisé Che Guevara. La marque de baskets Converse a fait une pub utilisant le portrait du Che. Le mannequin Gisele Bündchen a défilé à New York vêtue d’un bikini estampillé de centaines de visages du révolutionnaire argentin.

Ernesto Guevara de la Serna est mis au service de cigares, de T-shirts, de maisons d’édition. Au Che Guevara FC, l’appropriation de cette figure révolutionnaire va au-delà de la mode rétro chic. D’ailleurs, le club ne brille pas : il se classe systématiquement en bas du tableau.

Quand il sera grand, Joaquín Rojas veut être footballeur. Pour l’heure, il est sur le terrain tous les week-ends, vêtu du maillot à l’effigie du comandante Ernesto “Che” Guevara. Joaquín Rojas a 6 ans, il fait du football depuis qu’il en a 5 ; il est originaire du quartier de Güemes, un bidonville où le paco, mélange de résidus de cocaïne et de solvants ultratoxiques, se vend à tous les coins de rue. Joaquín a obligé son père et ses frères à l’accompagner au Che Guevara : malgré son âge, il savait qu’il voulait faire du foot.

Certains clubs sont prêts à acheter des joueurs dès l’âge de 6 ans, pour peu qu’ils leur voient un avenir radieux sur les pelouses. Mónica, elle, sait dénicher d’autres talents, et elle voit déjà en Joaquín un modèle et un acteur de la vie sociale. Cet après-midi-là, le Che Guevara FC a perdu son match. Mais personne n’a l’air de trop s’en soucier. Pour ce commando de petits guévaristes, la révolution ne fait que commencer.

(traduction de Courrier International, n° 1230, du 28 mai au 4 juin 2014)

On trouve ce texte sur :

http://el-siglo.blogspot.fr/2014/06/argentine-au-che-guevara-fc-quimporte.html 

et

http://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-debats/coupe-du-monde-football-stars-du-foot-risquaient-carriere-voire-vie-democratie-justice-f-ruffin/ Bas du formulaire

 

Pour lire l’intégralité, voir l’original en espagnol :

http://www.soho.com.co/vida-soho/articulo/el-che-guevara-futbol-club/33940

L’auteur : Juan Pablo Meneses est un écrivain, essayiste et journaliste indépendant né en 1969 à Santiago du Chili. Il a notamment publié Niños futbolistas (Enfants footballeurs, Ed. Blackie Books), une enquête sur les dessous du football latino-américain, notamment l’achat et la vente des jeunes joueurs.

On peut lire aussi en espagnol : http://cacheguevara.blogspot.fr/

                                      Le Che en joueur de rugby

On peut lire :

http://www.tlaxcala.es/pp.asp?reference=4403&lg=fr  , écrit à l’occasion de la qualification de l’Argentine en demi-finale ( contre l’Afrique du Sud) de la Coupe du monde de rugby, le 14 octobre 2007, au Stade de France, à Paris. « C’est du jamais vu », titrait logiquement le quotidien sportif L’Equipe.  (mp)

 

          

 

        

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