Cuba et les Etats Unis, une histoire secrète ce que ne dit pas le film "LE PONT DES ESPIONS"

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Par : Peter Kornbluh,traduction Françoise Lopez

Le diplomate états-unien James Donovan (Tom Hanks) est le héros du film nominé aux Oscars intitulé "Le pont des espions" et dans la vie réelle le principal artisan de la libération de centaines de prisonniers à Cuba. Des archives secrètes de la CIA et de la Maison Blanche révèlent la mission de Donovan pour négocier le rétablissement des relations avec le gouvernement de Fidel Castro qui fournit le fond historique au prochain voyage d’Obama à Cuba. La CIA a instauré un groupe de travail secret pour soutenir les négociations Donovan-Castro- Savez-vous comment les porc épics font l’amour ?" demande Donovan à Fidel. (Voir la réponse ci-dessous)

Un fond historique peu connu au prochain voyage d’OBAMA !

Avec le soutien secret de la CIA, James Donovan, la figure centrale du film nominé aux Oscars "Le pont des espions" a mené à bien les premières négociations secrètes avec Fidel Castro, selon des archives de la Maison Blanche et de la CIA publiées par les Archives de la Sécurité Nationale - qui apportent un fond historique peu connu au prochain voyage du président Obama à Cuba.

Les documents montrent qu’après la Crise d’Octobre, Donovan a partagé avec Fidel Castro des propositions pour améliorer les relations des Etats-Unis et de Cuba et a prédit qu’avec le temps, "on pourrait arriver à un accord de point de vue".

Dirigé par Steven Spielberg et nominé pour le meilleur film, la meilleur acteur, le meilleur scénario et 3 autres premiers prix qui seront connue le 28 février, "Le pont des espions" représente dans l’histoire de la Guerre Froide les efforts tenaces d’un avocat de New York, James Donovan, pour négocier le fameux échange entre le pilote Francis Gary Powers, capturé dans un U-2 états-unien en URSS et l’agent de renseignement soviétique Rudolf Abel, prisonnier aux Etats-Unis. L’échange spectaculaire de février 1962 sur le pont berlinois de Glienicke à Potsdam, Allemagne) a valu à Donovan -interprété par l’acteur Tom Hanks l’appellation de "mega-diplomate".

Cependant, seulement quelques semaines plus tard, le Ministre de la Justice Robert Kennedy recruta Donovan en secret pour mener à bien une mission encore plus spectaculaire et également digne d’un film d’espionnage à Hollywood : la négociation avec Fidel Castro de la libération de plus de 110 prisonniers après l’échec de l’invasion de Playa Girón soutenue par la CIA et dès lors, la libération de quelques 2 douzaines de citoyens états-uniens emprisonnés à Cuba pour des délits contre-révolutionnaires parmi lesquels 3 membres de la Division des Services Techniques de la CIA, capturés après l’installation de dispositifs d’écoute à La Havane.

Projet Misericordia

L’histoire de la mission secrète de Donovan à Cuba a été rapportée dans ce qu’on appelle le "Projet Mercy" et ses longues délibérations avec Castro sont racontées dans le livre récemment publié "Diplomatie secrète avec Cuba : Histoire des négociations secrètes entre Washington et La Havane."Dans la nature respectueuse de leurs conversations", selon le livre "Castro a trouvé le premier représentant fiable des Etats-Unis avec qui il pourrait parler sérieusement de la façon dont La Havane et Washington pourraient se déplacer vers la restauration de la civilité et de la normalité au milieu des ondes obscures de Playa Girón et de la crise des missiles cubains."

Après que Donovan ait négocié, à la veille de Noël 1962, le retour de 1113 prisonniers de Playa Girón - il obtint également l’autorisation de Castro pour que plus de 5 000 membres quittent l’Ile - des officiers de la CIA ont fait pression pour obtenir la libération de 3 agents secrets qui avaient été arrêtés en 1960 alors qu’ils installaient des micros sur le toit de l’immeuble du service de presse de la China. Après la tenue de plusieurs réunions à La Havane entre janvier et avril 1963, Castro se déclara très intéressé pour utilsier la libération des prisonniers pour ouvrir la porte aux conversations pour la normalisation des relations. Après une réunion fin janvier, Donovan informa la Maison Blanche et la CIA que le principal collaborateur de Fidel " a abordé le sujet du rétablissement des relations diplomatiques avec les Etats-Unis".

La CIA, le Département d’Etat et le National Security Council (NSC) essayèrent d’influencer le président Kennedy à propos de la réponse que donneraient les Etats-Unis à l’intérêt de Castro pour un rapprochement. Des fonctionnaires du Département d’Etat ont suggéré que Donovan "devait faire une promenade d’une semaine sur la plage avec Castro" et établir des conditions pré-négociables pour les conversations sur l’amélioration des relations : couper les liens de Cuba avec l’URSS et mettre fin à l’interférence cubaine dans d’autres parties de l’Amérique Latine. Un memorandum de la CIA intitulé "Instructions pour James Donovan" (cité dans "Diplomatie secrète avec Cuba") ajoute qu’on "doit persuader Castro d’expulser les communistes de son gouvernement".

Si Castro n’était pas d’accord avec toutes les exigences des Etats-Unis, dans les instructions proposées par la CIA, on déclare que Donovan doit "montrer à Castro une image... l’obscure image qui prévaudra (avec un seul terrible résultat) si Cuba continue à être un ennemi des Etats-Unis."

Le président Kennedy, cependant, prit une position beaucoup plus souple. Lors d’une réunion avec son conseiller national McGeorge Bundy, il suggéra que "nous ne voulons pas présenter à Castro une condition qu’il est évident qu’il ne peut pas remplir. Nous devons commencer à penser dans des lignes plus souples. Dans un memorandum Top Secret du 4 de mars 1963, Bundy informa que "le Président lui-même est très intéressé".

Le rôle de McCone

Selon un document interne de la CIA déclassifié l’année dernière, la CIA a joué un rôle important derrière la scène dans la mission de Donovan à Cuba. Le directeur John McCone a rencontré secrètement Donovan plusieurs fois. McCone établit un ensemble de tâches de la CIA avec le nom de code MOISÉS "pour fournir un soutien secret aux discussions de Donovan” et a désigné un avocat de l’agence, Milán Miskovsky, comme son principal gérant. (Le nom de Miskovsky apparaît dans le livre "John McCone As Director of Central Intelligence, 1961-1965" et dans beaucoup d’autres registres déclassifiés de la CIA.) La CIA a fournit à Donovan une feuille de code pour les communications téléphoniques et les messages de texte alors qu’il se trouvait à Cuba et en Floride. Le nom de code de Fidel était “Erie”. Celui de Che Guevara “Fulton”.

McCone agit aussi comme intermédiaire clef avec des membres du Congrès et les entreprises pharmaceutiques qui ont contribué avec leurs médicaments à l’échange qui a conduit à la libération de la brigade qui avait envahi Playa Girón. La CIA a créé un compte secret de plusieurs millions de dollars pour financer l’embarquement des produits pharmaceutiques que Donovan présenterait à Fidel Castro. A la fin, les fonds de la CAI ont été utilisés pour payer la nourriture et les médicaments envoyés dans l’Ile.

Pendant les conversations, le directeur adjoint de la CIA a annulé une proposition du leader de l’Opération Mangouste, Edward Lansdale, qui voulait accompagner l’envoi d’une opération classique de propagande noire : l’impression de l’image de Fidel dans les plis intérieurs du papier hygiénique qui serait envoyé avec la nourriture et le matériel pharmaceutique que Donovan négocierait en échange des prisonniers. Selon une note de

Lansdale citée dans un document interne, le papier hygiénique frelaté avait pour but "réellement d’obtenir que les Cubains rient de Fidel”.

quand la Crise d’Octobre a commencé en ces mois de 1962, McCone se mit d’accord avec John et Robert Kennedy pour suspendre les voyages secrets de Donovan à Cuba de crainte que la nouvelle des négociations arrive jusqu’à la presse. Ensuite, quand la crise fut terminée, McCone, une fois de plus, fit pression sur la Maison Blanche pour retarder la reprise des conversations secrètes jusqu’à la fin novembre.

Mais l’épisode le plus sinistre se produisit quand une équipé d’agents de la CIA décida qu’ils pouvaient utiliser la relation unique de Donovan avec Fidel pour assassiner le leader cubain. Les documents déclassifiés de la CIA mentionnent seulement dans une note de bas de page que "à un certain moment, pendant les négociations de Donovan con Castro" des fonctionnaires de la division des opérations secrètes "imaginèrent un plan pour utiliser Donovan comme fournisseur involontaire du vêtement de plongée et du tuba contaminés avec des champignons et des bactéries de la tuberculose qui devaient être offerts à Castro". La machination échoua quand Miskovsky avertit Donovan d’éviter toute manipulation ou contamination avant de remettre le costume de plongée à Fidel, ce qui a empêché qu’“Executive Action” - le groupe de la CIA qui se chargeait des assassinats - puisse la mener à bien.

Pendant l’un de ses derniers voyages à Cuba au début d’avril 1963, Donovan offrit à Fidel Castro un costume en néoprène et un tuba comme une preuve de confiance. "Ils pêchaient dans la Baie des Cochins et Castro donna une explication sur l’endroit de l’invasion de Playa Girón", a indiqué Miskovsky à McCone après s’être renseigné auprès de Donovan. Alors qu’ils travaillaient sur les détails finaux de l’échange des citoyens états-uniens et des agents de la CIA contre 4 Cubains prisonniers aux Etats-Unis, ils ont partagé leur intérêt sur le rétablissement des relations avec Washington :

"Si on devait commencer une nouvelle relations entre les Etats-Unis et Cuba", a demandé Fidel, comment pourrait-on arriver à commencer et quels pré-supposés cela impliquerait-il ?"

Selon une transcription de son interrogatoire de la CIA, Donovan répondit :

"Maintenant, savez-vous comment les porc-épics font l’amour ? Bon, la réponse est "en faisant très attention". C’est ainsi que vous et les Etats-Unis devrez entrer là-dedans. Je crois qu’on pourrait arriver à un accord de point de vue".

Plus d’un demi-siècle plus tard, le président Obama et le président Raúl Castro ont efnin avancé dans cet "accord de point de vue".

Source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/?p=708485#.VtFdY4RQkRE

 :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2016/03/cuba-et-les-etats-unis-une-histoire-secrete-ce-que-ne-dit-pas-le-film-le-pont-des-espions.html