Bilan économique de Cuba en 2018 et quelques perspectives pour 2019 (1ère partie)

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L’année qui s’achève a été d’une grande complexité pour l’économie cubaine avec un taux de croissance inférieur à ce qui était attendu malgré les efforts réalisés pour atténuer la conjoncture négative.
C’est ce que décrit l’auteur, José Luis Rodriguez, conseiller du Centre d’Investigations de l’Economie Mondiale (CIEM), ancien ministre de l’Economie de Cuba, dans une étude en quatre volets dont nous publions ci-dessous la 1ère partie.

L’année qui s’achève a été d’une grande complexité pour l’économie cubaine, ce que révèle le chiffre de la croissance atteint en 2018. En effet, le Ministre de l’Economie et de la Planification a informé l’Assemblée Nationale que le taux de croissance était autour de 1,2% , chiffre inférieur au 2% attendu, malgré les efforts réalisés pour atténuer la conjoncture négative.

Le taux de croissance annoncé coïncide avec celui atteint par l’Amérique latine et les Caraîbes en 2018, selon les estimations de la CEPAL.

Etant donné le niveau d’ouverture de l’économie nationale, un bilan objectf sur ce qui s’est passé doit nécessairement considérer en premier l’impact des facteurs externes survenus cette année.

En premier lieu, la situation économique internationale a évolué négativement en 2018, principalement à cause des effets de la guerre économique déclenchée par les Etats-Unis contre la Chine en augmentant fortement les droits de douane à l’exportation de cette dernière, pensant ainsi éliminer le déficit commercial nord-américain face à ce pays asiatique. D’autre part, l’administration de Donald Trump a augmenté les taux d’intérêt aux Etats-Unis dans le but d’attirer les ressources financières d’autres pays, ce qui entraîne une fuite de capitaux dans ces derniers, surtout dans les pays peu développés, avec des conséquences imprévisibles, spécialement avec l’ augmentation des crédits dans l’économie nord-américaine. Tout cela s’ajoute à une conjoncture dans laquelle on n’a pas surmonté les effets de la crise qui éclata il y a 10 ans et le danger de sa répétition n’est pas écarté.

Cette conjoncture négative génère partout incertitude et effets négatifs ; notre pays n’y échappe pas, surtout en ce qui concerne le financement externe et l’investissement étranger. A ce sujet, le Ministre de l’Economie et de la Planification a dit récemment :’ la situation de l’économie a été déterminée par une situation financière tendue, affectée par le manque de revenus générés par les exportations d’un groupe d’activités comme le tourisme , la production sucrière et les services de santé, à quoi viennent s’ajouter les dommages occasionnés dans plusieurs secteurs par différents phénomènes climatiques.

Quant au commerce extérieur, l’économie cubaine affichait déjà une baisse de 24,5% des exportations des biens et des services et une diminution similaire des importations entre 2012 et 2017, même si un solde positif s’est maintenu dans l’échange global.

La chute des revenus dûs aux exportations a été marquée, en premier lieu, par la baisse de la production de nickel, qui est passée de 72 530 millions de tonnes en 2011 à seulement 50 000 cette année, ce qui, et cela semble exact d’après les dernières études disponibles, serait inférieur à la production obtenue l’année précédente selon les estimations. Cette situation s’ajoute à la décapitalisation des usines et à des difficultés de financement suffisant pour freiner cette tendance , malgré les 50 millions de pesos investis cette année dans l’usine Che Guevara. On ne peut pas non plus oublier la fluctuation des prix de ce minerai ; en 2018 on estime qu’il atteint 13 344 dollars par million de tonnes ( une augmentaion de 28,5% par rapport à l’année précédente) mais sur les 5 dernières années on enregistre une baisse de 21% et les hausses prévues jusqu’à 2020 ne sont que de 5,1%.

Cependant, les perspectives s’améliorent si l’on considère que les prix du cobalt, associé au nickel dans les gisements cubains, se situent actuellement autour de 55 000 dollars la tonne, avec des perspectives de hausse supérieures à court terme. De même, la composition des résidus qui s’accumulent à partir du processus industriel, contiennent une quantité significative de minerais potentiellement précieux, on estime leur valeur en milliers de millions de dollars ; on recherche des investisseurs étrangers pour leur exploitation.

Dans le cas du sucre, la production de cette année a été estimée autour d’un million de tonnes, une chute de 43,7% par rapport à la récolte précédente, très affectée par des problèmes climatiques avec l’alternance de périodes de sécheresse et de pluies à contretemps ; est venu s’y ajouter l’impact négatif de l’ouragan Irma qui, en septembre dernier , arracha 380 000 hectares de canne à sucre et endommagea sérieusement 24 raffineries. D’autre part, le prix moyen de la livre de sucre est estimé cette année à 12.27 centimes, 22,8% inférieur à celui de 2017.

D’autre part, les exportations de services ont aussi été affectées.

Dans le cas du tourisme, d’un plan initial de 5,1 millions de visiteurs, cette année on en prévoit 4 millions 750 000, suite à la baisse enregistrée de touristes nord-américains, moins 6,8% jusqu’à novembre, et sa récupération postérieure à la fin de l’année, autour de 1% de hausse. D’autre part, l’année 2018 a connu une baisse des touristes européens. Ainsi, la hausse du nombre de visiteurs sera de 1,3%. Il convient aussi de signaler que le nombre de visiteurs a augmenté grâce aux croisiéristes, 92,8%, mais avec une moindre dépense par touriste et un séjour plus court. Tout cela concourt à une chute des revenus bruts par rapport à l’année précédente. Les capacités hôtelières atteignent désormais 70 879 chambres, auxquelles il faut ajouter plus de 23 000 chambres chez les loueurs privés.

On estime que les revenus dûs à l’exportation de la force de travail qualifiée diminueront à la fin de l’année à cause de la fin de la collaboration cubaine du personnel de santé au Brésil, suite à la position inadmissible du Président Jair Bolsonaro face à Cuba. S’ajoutent aussi des difficultés avec les revenus de la collaboration cubaine dans d’autres pays.

Au sujet des importations, on constate une hausse du prix par tonne d’une série d’aliments si on les compare à ceux de l’année précédente ; cela touche le riz (5,3%), le haricot de soja (2,2%), le blé (20,7%), la viande de poulet (3,8%). La facture d’aliments importés cette année tourne autour de 1 700 millions de dollars ; on peut les remplacer par des productions nationales, entre 35 et 47%, selon les estimations.

Le prix du barril de pétrole grimpe lui aussi, de 53 à 65,2 dollars, en augmentation de 23% et les restrictions avec le fournisseur traditionnel sont maintenues depuis 2016, On a essayé de compenser en achetant à des fournisseurs russes et algériens.

En conclusion, selon des estimations internationales, on calcule que la valeur totale des exportations de biens baisse de 12,6% cette année, tandis que les importations s’accroissent de 2,9%. D’autre part, le solde externe des services doit baisser de 5,5%.

Il est nécessaire d’examiner la situation du commerce extérieur en relation avec les finances internationales du pays. ( A suivre )

http://www.cubadebate.cu/opinion/2019/03/02/balance-economico-preliminar-del-2018-en-cuba-y-algunas-perspectivas-para-el-2019-parte-i/