Los déambulantes (2)

La rue pour exister

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La suite de l’article sur les « déambulants » souligne combien il est difficile, dans un contexte économique très tendu, de répondre à ce phénomène.
MCD

Depuis 2014, Cuba a défini une politique pour la prise en charge des « déambulants » (…) Même si cette question est du ressort de la société dans son ensemble, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale et celui de la Santé publique en sont, avec le ministère public et la police nationale les principaux responsables.

« Les travailleurs sociaux sont centraux, avec des groupes de prévention présents auprès des communautés. Il existe de tels groupes auprès de chaque Conseil populaire pour une prise en charge plus personnalisée » commente la directrice de la prévention sociale du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, Belkis Delgado Cáceres.

3 690 personnes relevant de ce dispositif ont été recensées à Cuba entre 2014 et septembre 2023. « Comparé à notre population et à d’autres pays, cela peut sembler peu mais que des personnes se retrouvent à la rue est grave » ajoute la spécialiste. « La situation de ces personnes découle en premier lieu du fait que la famille ne s’en est pas bien occupé, c’est ce que nous devons changer ».

Une solution a été trouvée pour 2 798 personnes : 599 ont été admises dans un foyer pour personnes âgées, certaines ont dû suivre temporairement un traitement psychiatrique. 1 983 ont réintégré le cercle familial, alors le travail ne s’arrête pas avec la réinsertion, « il y a ensuite un travail préventif avec la famille pour qu’elle accepte et prenne soin du patient qui souffre en général de troubles divers ». 63 personnes ont obtenu un nouveau logement, définitif ou temporaire alors que 572 restaient en attente d’une solution.

Il existe à Cuba 9 centres destinés aux « déambulants », un dixième devrait ouvrir cette année.

« Ce ne sont pas des centres de regroupement, ce n’est pas l’objectif. Un tel lieu permet au personnel médical et aux travailleurs sociaux d’évaluer la situation des personnes. Ce sont les autorités territoriales qui fournissent la nourriture, les médicaments et les vêtements nécessaires. (…) Il n’y a aucune restriction pour entrer ou sortir, toute personne a le droit de partir. C’est pour cela que certains restent dans la rue durant la journée et reviennent pour dîner et dormir au centre ». (…)

« 86 % des personnes suivies sont des hommes, 30 % sont en situation de handicap (visuel, auditif, intellectuel, etc.), 25 % présentent des troubles psychiques et 31 % sont de gros consommateurs d’alcool ». (…)

Delgado Cáceres reconnaît que la situation économique et sociale complexe aggrave le phénomène. « Un autre élément important, c’est la migration et le nombre de personnes âgées qui se retrouvent seules. Après la Covid 19, dans un contexte difficile pour tous, certaines personnes sont plus vulnérables aux niveaux social et économique. Même si elles reçoivent des prestations sociales, cela se révèle insuffisant ».

Les résultats de l’Enquête nationale sur le vieillissement de la population de 2017 (…) montrent que 17,4 % des personnes âgées vivent seules. Cinq ans plus tard, avec le vieillissement démographique qui s’accélère, ce chiffre a certainement augmenté.

« Nous savons aussi que certaines personnes sont dans la rue à la recherche de nourriture. Même si les causes sont multiples, la famille joue un rôle fondamental dans la recherche de solutions. Mieux appliquer le Code des familles et obtenir une plus grande participation de la population est fondamental. »

C’est dans la province de La Havane, la plus densément peuplée, que le phénomène est le plus important (…) [ Suivant Orestes Llanes Mestre, fonctionnaire du gouvernement provincial ] « Nous avons observé un accroissement significatif pendant la période spéciale (…) Toutes les personnes que nous voyons dans la rue ne sont pas des ‘déambulants’ (…) il peut s’agir de personnes qui recherchent dans les poubelles de la nourriture pour leurs animaux de compagnie ou les poules qu’ils élèvent dans leur jardin » (…)

On observe des personnes qui fouillent les conteneurs en plastiques près des hôtels où l’on trouve le plus de choses. « Beaucoup n’ont pas besoin d’être conduites dans un centre car elles ont un logement, une famille (…) ».

Un regard global

L’entourage familial et la responsabilité individuelle sont des facteurs essentiels pour la réinsertion de ces personnes (…) mais il est primordial d’analyser le contexte socio-économique actuel pour comprendre ce phénomène.

La crise économique aggravée par la pandémie de Covid 19 et le durcissement du blocus imposé par le gouvernement nord-américain ont accru les difficultés quotidiennes de la population. Malgré les efforts de protection sociale du gouvernement, il reste des problèmes évidents comme les salaires trop faibles, l’inflation, le déficit de logements et les retraites qui sont insuffisantes, avec au niveau démographique le vieillissement de la population et l’augmentation de l’émigration. (…)

La réalité économique du pays nous impose des défis significatifs dans la lutte contre la pauvreté et la marginalité. Il est nécessaire d’aborder ces problématiques dans leur globalité, pas seulement d’un point de vue individuel et familial, mais en prenant en compte le contexte socio-économique. Cela implique la mise en œuvre de politiques qui renforcent le système de protection sociale, augmentent les revenus et améliorent les problématiques de logement tout en offrant des opportunités économiques et en réduisant les inégalités.